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Sans le fecours des Vers, leurs noms tant publiez
Seroient depuis mille ans avec eux oubliez.
Non, à quelque hauts faits que ton deftin t'appelle,
170 Sans le fecours foigneux d'une Muse fidelle,
Pours t'immortaliser tu fais de vains efforts.
Apollon Te la doit : ouvre- lui tes trésors.

En Poëtes fameux rends nos climats fertiles.
Un Augufte aisément peut faire des Virgiles.
175 Que d'illuftres témoins de ta vaste bonté
Vont pour Toi dépofer à la Pofterité !

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Pour moi, qui fur ton nom déja brûlant d'écrire, Sens au bout de ma plume expirer la Satire, Je n'ofe de mes Vers vanter ici le prix. 180 Toutefois, fi quelqu'un de mes foibles Ecrits Des ans injurieux peut éviter l'outrage, Peut-être pour ta gloire aura-t-il fon ufage. Et comme tes exploits, étonnant les Lecteurs, Seront à peine crûs fur la foi des Auteurs; 185 Si quelque Esprit malin les veut traiter de fables, On dira quelque jour pour les rendre croïables; Boileau, qui dans fes Vers pleins de fincérité, Jadis à tout fon fiécle a dit la vérité;

Qui mit à tout blâmer fon étude & fa gloire, 190 A pourtant de ce Roi parlé comme l'Histoire.

EPITRE II

A MONSIEUR

L'ABBÉ

DES ROCHE S*.

La principale raison pour laquelle l'Auteur compofa cette Epitre, fut pour conferver la fable de l'Huître & des Plaideurs, qu'il avoit retranchée de l'Epitre précedente. Il y décrit en pen. de mots la fotife de ceux qui ont la fureur de plaider.

AQU 01 bon réveiller mes Mules endormies,

Pour tracer aux Auteurs des Regles ennemies? Penfes-tu qu'aucun d'eux veuille fubir mes loix, Ni fuivre une raison qui parle par ma voix ? O le plaifant Docteur, qui fur les pas d'Horace, Vient prêcher, diront-ils, la réforme au Parnasse! Nos Ecrits font mauvais, les fiens valent-ils mieux? Jentens déja d'ici Liniere furieux,

Qui m'appelle au combat fans prendre un plus long

terme.

10 De l'encre, du papier, dit-il ; qu'on nous enferme. Voïons qui de nous deux plus aifé dans fes Vers, Aura plûtôt rempli la page & le revers?

* Mr. l'Abbé des Roches. Imier Medecin de Charles VII. Jean-François-Armand Fumée, fils de François Fumée, Seigneur des Roches. Il def cendoit d'Adam Fumée, Pre

Vers 1. A quoi bon réveiller, &c.] Les fix premiers vers font connoître que l'Auteur travailloit à fon Art poëtique.

Vers 8. J'entens déja d'ici Liniere furieux, &c.] Horace, L. 1、 Sat. 4. V. 14.

Crifpinus minimo me provocat: accipe, fi vis

Accipe jam tabulas, &c.

Moi donc qui fuis peu fait à ce genre d'efcrime,

Je le laiffe tout seul verser rime sur rime, 15 Et souvent de dépit contre moi s'éxerçant, Punir de mes défauts le papier innocent.

Mais toi qui ne crains point qu'un rimeur te noir

ciffe,

Que fais-tu cependant feul en ton Bénéfice?

Attens-tu qu'un Fermier païant, quoi qu'un peu tard, 20 De ton bien pour le moins daigne te faire part? Vas - tu, grand défenseur des droits de ton Eglife, De tes Moines mutins réprimer l'entreprise ? Croi-moi dût Auzanet t'affurer du fuccès, Abbé, n'entreprens point même un jufte procès. 15 N'imite point ces fous dont la fotte avarice Va de fes revenus engraiffer la Justice; Qui toujours affignans, & toujours affignez, Souvent demeurent gueux de vingt procès gagnaz. Soutenons bien nos droits: Sot eft celui qui donne. 30 C'est ainfi devers Caën que tout Normand raisonne. Ce font là les leçons, dont un pere Manceau Inftruit fon fils novice au fortir du berceau. Mais pour toi, qui nourri bien en deça de l'Oife As fucé la vertu Picarde & Champenoise

Vers 23.1

Normanifme.

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Vers 33. Bien en deça de l'Oife. ] Riviere qui a fa

Dût Auza-ne ; mais il a préferé Devers net t'aflurer du fuccès.] Barthé- Caën, qui est une espece de lemi Auzanet, célebre Avocat au Parlement de Paris Vers 30. C'est ainfi devers Caën que tout Normand raison-fource dans la Picardie, vers ne. L'Auteur auroit pû dire: les limites du Hainaut & de vers Caen. C'est ainsi que vers la Champagne. Caën tout bas Normand raison-A

35 Non, non, tu n'iras point, ardent Bénéficier, Faire enroüer pour toi Corbin ni le Mazier. Toutefois, si jamais quelque ardeur bilieuse Allumoit dans ton cœur l'humeur litigieuse, Confulte-moi d'abord, & pour la réprimer, 40 Retien bien la leçon que je te vais rimer. Un jour, dit un Auteur, n'importe en quel chapître,

Deux voïageurs à jeun rencontrérent une huître. Tous deux la contestoient, lorsque dans leur chemin, La Justice paffa la balance à la main.

45 Devant elle à grand bruit ils expliquent la chose. Tous deux avec dépens veulent gagner leur cause. La Justice, pefant ce droit litigieux,

Demande l'huître, l'ouvre, & l'avale à leurs yeux; Et par ce bel Arrêt terminant la bataille: 50 Tenez; voilà, dit-elle à chacun une écaille. Des fottifes d'autrui nous vivons au Palais : Meffieurs, l'huître étoit bonne. Adieu. Vivez en paix.

Vers 36. Faire enrouer pour | geoient fouvent de mauvaises toi Corbin ni le Malier.] Deux caufes.

Avocats criards, qui fe char

KAR·KKKKKME KUKKEK KEK

EPITRE III.

A M. ARNAULD.

Le sujet de cette Epitre eft la mauvaise honte qui empêche le retour vers le bien, lorsqu'on s'en est une fois écarté; elle fus composée en 1673.

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UI, fans peine, au travers des sophismes de
Claude,

ARNAULD, des Novateurs tu découvres la fraude,

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Vers 1. Au travers des fophifmes de Claude. ] Jean Claude Miniftre de Charenton, l'un des plus favans hommes de la Religion Prétendue Réformée, naquit à la Sauvetat dans l'Agenois en 1619. Son rare mérite le fit recevoir Miniftre de fa Religion à l'âge de 26 ans. Quoi qu'il eût un exterieur peu impofant, une voix aflez défagréable, & même un stile brillant, fon éloquence étoit cependant très-féduifante, Le ftile de fes écrits, qui eft exact & ferré, découvre un grand fond d'érudition, une grande juftefle d'efprit, & une adrefle

peu

merveilleufe à mettre en œuvre toutes les finefles de la Logique. Les qualités du cœur répondoient à celles de l'efprit, & il a pallé même parmi fes adverfaires pour un parfaite ment honnête homme. Il étoit l'ame & le chef de fon parti en France; & c'eft, pour ainfi dire au nom du corps des Proteftans qu'il eft entré en

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lice de vive voix & par écrit avec les plus grands hommes de la Catholicité, tels qu'étoient les Arnaulds, les Boffuets, les Nicoles, &c. A la révocation de l'Edit de Nantes. M. Claude fe retira à la Haye, où il mourut le 12 Janvier 1676.

Vers 2. Arnauld.] Antoine Arnauld, Docteur de la Maifon & Societé de Sorbonne, illuftre par fes difgraces & par fon érudition, naquit à Paris le 6 Fevrier 1612. Il fut reçu de la Maifon de Sorbonne d'une façon affez finguliere. Etant entré en Licence fans avoir fait les démarches né. ceffaires pour être admis dans cette Société, & ne pouvant plus en être reçu felon les regles ordinaires, la Societé de Sorbonne demanda au Cardinal de Richelieu qu'il fût reçu extraordinairement à cause de fon rare mérite. Mais de puiflans ennemis aïant deffervi M. Arnauld auprès de cette Eminence, cette grace fut re

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