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quelle vous m'avez départi votre grace. « Je detefte la vanité, je renonce aux inte- << rêts & aux plaifirs, & je declare une haine «< immortelle à tout ce qui m'en pourroit détourner: j'avoue que je fuis trop foible, " je fçay bien que je me laiffe aifément « furprendre, & je ne doute pas que je ne fois en danger dé fuccomber aux premiers efforts de la tentation; mais j'implore vo- " tre Saint Nom, & je protefte, fur l'appuy " de votre grace, que je ne veux nullement «< confentir aux mouvemens que la nature "< n'oppofe que trop fouvent à de fi faintes refolutions. "

CHAPITRE V.

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A quoy le Précepte d'aimer Dieu oblige, fous peine

D.

P·LE

tel?

de peché mortel.

E précepte d'aimer Dieu n'oblige-til à rien, fous peine de peché mor

R. Il oblige à aimer Dieu d'un amour de préference à toutes les créatures; c'est-àdire, à préferer Dieu à toutes les créatures, & à mettre en Dieu notre fouverain bien & notre derniere fin.

D. En quoy confifte cet amour de préfe

rence?

R. Saint Augustin en marque une condi

tion effentielle par ces paroles: a Celuy dit-il, qui a tellement Dieu dans le cœur qu'il ne luy préfere aucune chofe temporelle, non pas même celles qui font licites & permifes, à Jefus-Chrift pour fondement; mais s'il luy préfere quelque chofe, en forte qu'il en fafle fa derniere fin; quoyqu'il sem¬ ble avoir la Foy de Jesus-Christ, il n'a point Jefus-Chrift pour fondement.

D. Mais fuffiroit-il d'avoir ce defir de ne pas préferer les créatures à Dieu, fi l'occafion fe prefentoit de renoncer à l'un ou à l'autre ?

دو

R. Non: il faut que la préference que l'amour de Dieu doit avoir au deffus de toutes les autres affections,foit actuelle; c'est-à-dire, qu'il faut actuellement que ce foit l'affection dominante de notre cœur : ce que S. François de Sales explique en ces termes, dans le dixiéme livre de l'amour de Dieu. b Y ayant tant de divers degrez d'amour entre les vrais amans, il n'y a néanmoins qu'un feuf Commandement d'amour qui oblige generalement & également un chacun d'une ,, toute pareille & totalement égale obligation................ C'est l'amour qui doit prévaloir fur tous nos amours, & regner fur tou

دو

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a Quifquis fic habet in corde Chriftum, ut ei nec terrena & temporalia, nec ea quæ licita funt, atque conceffa præponat, fundamentum habet Chriftum. Si autem præponit, etfi videatur kabere fidem Chrifti, non eft tamen in eo fundamentum Chriftus, cui talia proponuntur. Aug. de Civit. Dei. l. 21. c. 26.

S. Fr. de Sales l. 10. de l'amour de Dieu, cb. 7.

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tes nos paffions. Et c'eft ce que Dieu re- << quiert de nous, qu'entre tous nos amours, le fien foit le plus cordial dominant fur " tout notre cœur, le plus affectionné оссиpant notre ame, le plus general employant " toutes nos puiffances, le plus relevé rempliffant tout notre efprit, & le plus ferme “ exerçant toute notre force & vigueur. << Et vers la fin du même chapitre, le même Saint ajoûte:,, C'eft cette fuprême dilection qui "< met Dieu en telle eftime dans nos ames , & fait que nous prifons fi hautement le " bien de luy être agréables, que nous le " préferons & affectionnons fur toutes cho- «< ses. Or ne voyez-vous pas, Theotime, que quiconque aime Dieu de cette forte

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il a toute fon ame & toute fa force dédiée << à Dieu; puifque toûjours & à jamais, en toutes occurrences, il préferera la bonne “ grace de Dieu en toutes chofes, & fera toû- " jours prêt de quitter tout l'Univers, pour conferver l'amour qu'il doit à la divine “ bonté. "

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D. Expliquez plus exactement en quoy doit confifter la préference que nous devons à Dieu, que vous appellez l'amour domi

nant.

R. C'eft que par cette préference d'amour, nous devons prendre Dieu pour notre derniere fin, & qu'ainfi, l'amour de Dieu doit être la paffion dominante de notre cœur. Or, le propre de la paffion dominante, c'est

de rapporter à fon objet le gros de la vie & le corps des actions. Ainfi, ceux que l'ambition domine, rapportent à leur grandeur le corps de leurs actions; ils étudient, ils travaillent, ils parlent par ce motif. C'eft ce qui leur fait faire le choix de leurs liaisons de leurs, emplois; c'eft ce qui les occupe le plus. Il en eft de même de ceux qui ont le gain & les richeffes pour fin. C'eft la regle par laquelle ils jugent de toutes choses. Il y a plus à gagner en ce parti-là: ils le choififfent, ils ne penfent qu'à cela, & ils en font plus occupez que de toute autre chose.

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Voilà quel doit être l'amour de préference, que nous devons à Dieu. Il faut que ce foit la paflion dominante de notre cœur qu'elle rapporte à Dieu le gros de notre vie, & que nous jugions par ce motif de toutes les chofes qui fe prefentent, en choisissant celles qui nous font utiles pour nous approcher de Dieu, & en rejettant celles qui y font contraires: il faut enfin, que cet amour foit le principal objet de notre cœur.

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CHAPITRE V I.

Quand nous fommes obligez d'exercer des Actes d'Amour de Dieu.

D.

CE

ce

Et amour dominant & de préference, dans lequel on fait confifter qui eft commandé, fous peine de peché mortel par le précepte de l'amour de Dieu, étant plutôt une habitude qu'un acte; ne s'enfuit-il point de là, que l'acte de l'amour de Dieu ne nous eft point précisément commandé, au moins fous peine de peché mortel?

R. Cela ne s'enfuit nullement : car ceux

qui font déchûs de cet amour, ne le fçauroient recouvrer qu'en fe convertiffant à Dieu, & en luy rendant ce qu'ils luy avoient ôté par le peché; c'eft-à-dire, la préference fur toutes chofes, & l'empire de leur cœur. Ainfi, l'acte d'amour de Dieu eft commandé à tous ceux qui font dans le crime; puifqu'il eft neceffaire pour fe reconcilier à Dieu: il eft auffi commandé à ceux qui poffedent cet amour, puifqu'ils ne le fçauroient conferver que par des actes frequens.

Car il ne faut pas s'imaginer cette habitude de l'amour de Dieu, comme une habitude morte, qui puiffe fe conferver longtemps, lorfqu'on a l'âge de raifon, fi l'on ne

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