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les paroles de ces Actes avec quelques mouvemens de cœur, ces mouvemens font auffi grands que les paroles les expriment. Car il fe peut faire que le mouvement d'amour qui accompagnera ces paroles, quelque fortes qu'elles foient, foit tres-leger & tres-foible,

3. En s'imaginant qu'il n'y a point d'autres Actes d'amour de Dieu, que ceux qui font conçus dans les termes de ces formules. Car il y en a une infinité d'autres.

D. Donnez-nous quelques exemples d'autres Actes de l'amour de Dieu.

R. Tous les verfets du Pfeaume cent dixhuitiéme, Beati immaculati, font autant d'Actes de l'amour de Dieu : car ce font des Actes de l'amour de la Loy de Dieu. Or, aimer la Loy de Dieu, c'eft aimer Dieu même, parce que fa Loy eft la verité, & la verité eft Dieu.

Tout ce qui porte de même l'ame à aimer la Juftice, la Sageffe, l'Eternité, la porte à aimer Dieu, & par confequent, peut être pris pour un modéle d'Acte d'amour de Dieu, auffi-bien que ces formules.

Non-feulement ces Actes formels, mais les lectures des Livres de pieté ; la meditation des Veritez Evangeliques & des Myfteres de Dieu; la confideration de fes devoirs dans la vûë de Dieu, entrent dans ces moyens de conferver l'amour de Dieu dans le cœur : & tous ces exercices pratiquez dans cette vûë, font autant d'Actes d'amour de Dieu.

D. Que doit-on conclure de tout cecy? R. Que comme il y a bien des gens qui s'imaginent faire des Actes d'amour de Dieu, & qui n'en font pas ; il y en a beaucoup auffi qui s'imaginent n'en point faire, & dont toute la vie en eft remplie.

CHAPITRE

VIII.

Des fignes de la presence de l'amour de Dieu, neceffaire à la juftification.

D.

Q

Uels fignes peut-on avoir de la prefence ou de l'abfence de l'amour de Dieu, neceffaire pour être juftifié ?

R. Les mêmes que l'on a de la prefence ou de l'abfence des autres paffions dominantes dans le cœur de l'homme, excepté que la fenfibilité eft plus grande dans les paflions qui ont des objets fenfibles.

D. Pourquoy faites-vous cette exception à R. Pour confoler plufieurs bonnes ames qui fe croyent privées de la grace & de l'amour de Dieu, lorfqu'elles voyent que les affections pour les chofes du monde font des impreffions plus fenfibles fur leur cœur, que celles qu'elles ont pour Dieu. Cependant cette confequence n'eft pas jufte; car de ce que les impreffions des affections humaines font plus fenfibles, cela vient de ce que leur objet étant fenfible, frappe plus vivement

P'imagination, qu'un objet fpirituel tel que Dieu; mais il fuffit que l'impreffion de l'amour de Dieu foit plus forte, quoyque moins fenfible, & que nous foyons interieurement dans les difpofitions de tout quitter pour Dieu, & renoncer à toutes les affections tendres & fenfibles, s'il étoit neceffaire.

Il faut donc juger de la prefence de l'amour de Dieu par des effets réels, plûtôt que par des affections fenfibles.

D. Quelles font les marques les plus ordinaires de la presence de l'amour de Dieu dans le cœur ?

R. On a fujet de croire que l'amour de Dieu regne dans le cœur ;

1. Quand le defir de plaire à Dieu nous fait abftenir actuellement de toutes les actions criminelles; car c'eft une marque que nous participons au premier degré de la liberté Chrétienne, a qui, comme dit Saint Auguftin, confifte dans l'exemption des.

crimes.

2. Quand nous fommes foigneux d'éviter tout ce qui nous peut faire perdre l'amour de Dieu.

3. Quand nous fommes portez à embraffer tous les moyens de nous conferver ce

trefor.

4. Quand nous fommes fenfibles aux interets de Dieu, & que nous ne fommes point

Prima libertas carere criminibus. Aug. Tr. 41. i Joann,

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indifferens à ce qui bleffe son honneur & fa gloire.

5. Quand nous nous fentons portez à attirer au fervice de Dieu tous ceux que nous pouvons, & que nous avons de l'ardeur pour les entreprifes qui regardent fon fervice.

6. Quand notre vie eft tellement reglée, que le corps de nos actions tend à Dieu, & fe rapporte à luy; en forte qu'on peut reconnoitre que c'eft luy feul & fon amour qui regnent dans la conduite de notre vie.

7. Quand la difpofition de notre cœur nous rend fufceptibles de la verité, que nous l'écoutons avec joye, que notre cœur ne s'y oppofe point; car c'eft ce que Jesus-Chrift dit dans l'Evangile, que a fes brebis entendent Ja voix; & que b quiconque eft du parti de la verité, écoute fes paroles...

8. Quand on travaille ferieufement à fe détacher de l'affection des chofes du monde. 9. Quand on a foin de fon ame,& que l'on luy defire avec ardeur le bien de la justice. 10. Quand on aime fincerement fes freres; c Car il eft impoffible, dit Saint Jean, que l'on aime veritablement Dieu, qu'on ne voit pas ɔ fi l'on n'aime point fon frere, l'on voit.

37.

que

II. Quand on fent de l'oppofition pour les

a Oves vocem ejus audiunt. Joann. 10. 3.

b Omnis qui eft ex veritate, audit vocem meam. Ibid. 18.

c Si quis dixerit, quoniam diligo Deum, & fratrem fuum oderit, mendax eft. Qui enim non diligit fratrem fuum, quem vi let Deum quem non videt, quomodo poteft diligere 1. Ep. Joan.

folies, les pompes & les divertiffemens du monde.

12. Quand on fent un poids qui nous éloigne des objets de concupifcence, & qui nous fepare de la jouiffance des chofes temporelles, en forte que nous mettions toute notre joye dans les choses éternelles, & dans la feparation des créatures.

D. Chacun de ces fignes fuffit-il pour donner une jufte confiance que l'on a l'amour de Dieu dans le cœur ?

ou

R. Non; il en faut joindre plufieurs, pour mieux dire, il faut les avoir tous dans quelque degré.

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Des fignes de l'absence de l'amour de Dieu.

D. Ar quels fignes peut-on juger qu'une ame n'a point en elle l'amour de Dieu neceffaire pour être justifiée ?

R. a On peut dire qu'on le peut juger certainement à l'égard de la plupart des hommes car il eft conftant que qui n'observe point les Commandemens de Dieu, ne connoît point Dieu, & n'a point en luy l'amour de Dieu, neceffaire au falut, ainfi que Saint

a In hoc fcimus quoniam cognovimus eum, fi mandata ejus obfervamus, qui dicit fe noffe eum, & mandata ejus non cuf todit, mendax eft, & in hoc veritas non eft. 1. Joan. 2. 3. 4.

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