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ront tout d'un coup à l'ame, fans qu'il y en ait aucun qui luy foit caché: au lieu que dans cette vie, ils luy font prefque tous cachez; parce qu'elle les oublie à mefure qu'elle les commet. De forte qu'elle fe trouvera enyironnée comme d'une infinité de monftres dont elle fentira les morfures.

2. Que dans ce Jugement toutes les œuvres humaines, & qui n'ont point été faites par un motif d'amour de Dieu, disparoîtront aux yeux de l'ame, qui fe trouvera privée de l'appuy qu'elle y avoit mis durant fa vie, & ne fe foûtiendra que fur ce qu'elle aura fait dans la vûe de Dieu, & par fon amour; ce qui reduira tous ceux qui n'auront fait que de ces œuvres humaines à une honteufe pauvreté, & à une desolation ef→ froyable.

3. Que l'ame par la lumiere que Dieu luy donnera, verra les moindres pechez dans une effroyable grandeur, par rapport à la rigueur inflexible de la juftice de Dieu, qui Juy fera découverte. Ce qui fera un poids fi épouvantable pour les méchans, que pour fe cacher aux rayons penetrans de cette juftice, qui les confondra, ils fe précipiteront eux-mêmes en Enfer.

4. Que toutes les créatures, & Dieu même s'armeront contre les méchans dans le Jugement; parce qu'il n'y aura aucune créature qui ne leur reproche leur ingratitude, & leur méchanceté outre qu'ils ne décou

,

vriront rien en Dieu qui ne les confonde & fur tout la mifericorde, la Croix & la Mort de Jefus-Chrift.

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D. Quelles veritez faut-il fuppofer, pour comprendre la grandeur de la peine interieure des damnez?

R. Il faut fuppofer que l'ame étant feparée du corps, aura une étendue & une penetration infiniment plus grande que celle qu'elle a dans le corps: ce qui luy donnera moyen de voir une infinité d'objets affligeans, & de les penetrer bien plus clairement.

D. Comment prouvez-vous cette étendûë?

R. Par le Jugement dernier, où il est certain que Dieu fera connoitre à l'ame tous fes pechez, & tous ceux des autres: ce qui renferme une étendue prefque infinie de connoiflance. Cependant elle ne les connoîtra pas pour un moment, mais pour toujours, puifque cette connoiffance doit faire partie du fupplice des reprouvez. Outre cela, il faut fuppofer que la violence des mouvemens de la volonté augmente à proportion de l'étendue & de la clarté des connoiflances. de l'ame: d'où il s'enfuit que voyant les biens

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qu'elle a perdus, l'impuiffance où elle eft de jouir jamais de ce qu'elle defire, & toutes les circonftances de fon malheur; elle concevra une douleur qui furpaffera infiniment tout ce que l'on peut s'en imaginer dans cette vie.

D. D'où peut-on conclure encore la grandeur de ces peines interieures ?

R. 1. De ce qu'elles ne feront point affoiblies par la mortalité du corps, qui ne peut fouffrir en cette vie les grandes.douleurs de l'efprit, parce qu'elles le détruiroient.

2. De ce que l'ame des reprouvez fera continuellement appliquée aux objets qui l'affligeront.

3. De ce que toutes les caufes de douleurs que l'ame aura, agiront en même-temps fur elle, fans que l'impreffion de l'une, diminuë celle de l'autre.

4. De ce que l'ame des reprouvez regardera tous ces maux comme éternels, fans esperance d'en être soulagée.

5. De ce que les maux des reprouvez ne feront balancez d'aucun bien; en forte que leur ame ne pourra jetter les yeux fur rien de confolant.

6. De ce que l'ame ne pourra ignorer fes maux, ni fe perfuader qu'elle fouffre injuftcment, ni fe les deguifer en aucune forte.

7. De ce que les reprouvez fe verront entre les mains de Dieu pour toute l'éternité, & qu'ils le regarderont comme un cruel ennemi.

8. De ce que defirant avec paffion de détruire leur être, ils fe verront dans l'impuiffance de le faire.

9. De ce qu'aucun de leurs defirs ne fera fatisfait, & que leur volonté n'aura aucun mouvement qui ne les tourmente.

D. D'où concluez-vous la grandeur de la peine que les reprouvez fouffriront dans les fens?

R. . Le feu agira fur un corps incapable. d'être détruit, d'où il s'enfuit que la douleur en fera plus vehemente.

2. Ce feu agira fur toutes les parties du corps, interieures & exterieures; & l'ame fera capable de fouffrir toutes ces douleurs, fans que l'une étouffe l'autre.

3. Les Peres nous affurent a que le feu d'enfer est tout autrement actif que celuycy, & que l'ame fera tout autrement susceptible de douleur.

a Non erit ifte ignis ficut focus tuus, S. Aug. in Pf. 49. Vida S. Chryfoft. hem. 44 in Matth.

QUATRIE ME

INSTRUCTION.

DE LA CHARIT E’.

D.

CHAPITRE PREMIER.

De l'Amour en general,

U'eft-ce que l'amour ?

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R. a C'eft la pente l'inclination & le poids de l'ame vers quelque objet; c'est ce qui l'y fait tendre, & qui l'y attache. b Ainfi,comme c'eft par l'amour que l'ame eft portée vers l'objet qu'elle aime; on dit que l'amour eft le pied de l'ame, & que les pieds de l'ame font pris, quand fon amour l'a liée à quelque objet. C'est par la même raifon qu'on appelle l'amour, l'aile de l'ame; ce qui donne

a Animus quippe velut pondere amore fertur quòcumque fertur S. Aug. Ep. 89.

b Pes anime rectè intelligitur amor; qui cùm pravus eft, vocatur cupiditas aut libido; cùm autem rectus, dilectio vel caritas. Amore enim movetur tanquam ad locum quò tendit .... pes ergo pecid eft amor, comprehenditur in mufcipula quam occultant. Id. Pf. 2.

catorum,

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