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vous. Si vous euffiez été du monde, le monde aimeroit ce qui feroit à lui: mais parce que vous n'êtes point du monde, & que je vous ai choisis au milieu du monde, c'est pour cela que le monde vous haït. Le ferviteur n'est pas plus grand que fon Maître : s'ils m'ont perfecuté, vous épargneront-ils ?

Je fuis bien aile de vous prevenir; Luc. t. vous ferez perfecutez pour l'amour de moi de toutes les manieres. On fe faifira de vous, on vous maltraitera, vous livrant aux fynagogues, vous emprifonnant, vous traînant devant les Rois, & devant les Gouverneurs à caufe de mon nom : & cela vous arrivera, afin que vous me ferviez de temoins dans tous les fiécles. Ne craignez rien cependant, & mettez-vous bien dans l'efprit, de ne point fonger par avance comment vous devez repondre ? car je vous donnerai des paroles, & une fageffe à quoi tous vos ennemis ne pourront refifter, ni rien oppofer. Toutes les puiffances de la terre & de l'enfer fe dechaîneront contre vous. Vous ferez livrez par vos peres, & vos mieres, par vous freres, par vos parens, par vos amis; on s'imaginera rendre fervice à Dieu de vous ôter la vie. Cependant

Le pre

Morale

raffurez-vous, il ne fe perdra pas un cheveu de vôtre tête, j'en fçai le nombre; & j'aurai foin de vous. Je vous ai voulu prevenir, afin que quand tour cela vous arrivera, vous ne foyiez point effrayez, vous fouvenant de ma parole; & étant sûrs de mon fecours.

§. XXIII.

Pendant que le Sauveur inftruifoit cis de la ainfi fes Apôtres, l'affemblée avoit chrétien- extrêmement groffi par le concours du Matth. peuple qui venoit de toute part en fou→

ne.

5.

le pour entendre fes inftructions. Ainf s'addreffant à tous ceux qui l'écoutoient Ne croyez point vous autres, leur dit-il, que je fois venu pour abolir la Loi, & les Propheties, le Ciel & la Terre periront plûtôt qu'elles manquent d'être accomplies; & c'est pour les accomplit que je fuis ve nu au monde. Je fuis venu pour accom plir cette Loi felon fon efprit, & dans toute fa perfection qu'on avoit jufqu'ici ignorée.

Les Scribes, & les Pharifiens font profeffion d'obferver cette Loi, & leur apparente regularité impofe; mais fi vôtre vertu ne furpaffe la leur, vous

n'entrerez jamais dans le Royaume de mon Pere. On s'eft contenté jufqu'ici d'avoir horreur de l'homicide: & moi je vous dis, que la moindre parole injurieufe eft un peché. Le facrifice le plus eftimable fera rejetté, s'il y a la moindre froideur dans le cœur de celui qui l'offre. L'adultere eft un grand cri-. me & moi je vous dis, qu'on s'en rend coupable par un feul defir criminel. La moindre penfée impure doit être rejettée ; j'ajoûte que le plus leger confentement à cette pensée, eft un peché mortel. La pureté que j'exige est une vertu fi delicate que le trop grand hâle la fane, & le moindre fouffle la ternit. Si vôtre ceil droit vous fcandalife, arrachez-le, c'est-à-dire, fi ce vous avez de plus precieux, & de plus cher, vous eft une occafion de peché, retranchez-le, fuïez-le, faites en fans. delai le facrifice, quoi qu'il en coûte. Eloignez-vous de toutes les occafions dangereuses. Celui qui aime le peril y perira. Tout divorce eft profcrit; les vains juremens font autant défendus que le parjure. Ne jurez jamais ni par le ciel, ni par la terre, ni par aucune créature la verité n'a pas besoin de tant d'étayes, contentez-vous de dire

:

que

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fimplement, oüi cela eft, non cela n'eft pas, car ce qui fe dit de plus vient d'un mauvais principe.

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Vous avez appris qu'il a été dit : œil pour œil, & dent pour dent: & moi je vous dis de ne point faire de refiftance fi on vous maltraite mais fi quelqu'un vous frappe fur la jouë droite, prefentez-lui encore l'autre, Abandonnez-même vôtre manteau, à celui qui veut vous plaider pour avoir vôtre robbe ; & qui que ce foit qui vous preffe de faire mille pas pour fon fervice, faites-en deux mille de plus pour l'amour de lui; tellement je veux que la charité & la douceur faffent vôtre caractere.

On vous a dit jufqu'ici : vous aimerez celui avec qui vous avez quelque liaifon, & vous haïrez vôtre ennemi. Pour moi je vous dis : aimez mêine vos ennemis faites du bien à ceux qui vous haïffent; priez pour ceux qui vous perfecutent, & pour ceux qui vous ca▾ lomnient. Ce n'eft point affez de ne leur vouloir point de mal; il faut encore leur faire du bien, & les prevenir par vos bons fervices. Car pour aimer ceux qui vous aiment, quelle recom. pense meritez-vous les Publicains en

font autant; & fi vous ne falüez que vos freres, que faites-vous d'extraor dinaire les Payens mêmes ne le fontils pas ? imitez en cela la conduite de vôtre Pere celefte ; & tâchez, autant que vôtre foibleffe vous le permettra, d'arriver à ce qu'il y a de plus parfait, de plus élevé dans la vertu.

Dire feulement de bouche qu'on pardonne le tort qu'on nous a fait, & l'injare qu'on a reçûë, c'est un pur compliment qui peut impofer aux hommes, mais non pas à Dieu qui veut qu'on pardonne du fond du cour; & fouvenez-vous que le pardon des injures qu'on a accordé à fes freres, eft pour ainfi dire, la regle & la mefure de celui qu'on attend de Dieu. Au refte la charité que vous devez avoir pour tout le monde doit bannir tout jugement temeraire, & tout foupçon. C'est à Dieu feul qu'appartient tour jugement; c'eft impieter tous fes droits, que de fe conftituer Juge des fentimens des autres, nul homme ne doit juger de l'intention. Ne faites jamais rien par refpect humain, & encore moins par vaine gloire ; ce n'eft pas feulement à pure perte alors qu'on travaille : tout ce qu'on fait par vanité merite châtiment.

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