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ne fe roidiffent point contre les impreffions de la grace, qui font dociles, & qui ne ferment point les yeux aux lumieres de la foi, qui puiffent comprendre ce grand Myftere. Ignorez vous, leur dit-il, qu'il eft écrit dans les Prophétes? ils feront tous Difciples de Dieu même; ils feront tous dociles à la voix de Dieu. Et erunt omnes docibiles Dei. Joan. 6. Il faut de la docilité, il faut une foi fimple, humble, & foûmife dans l'E-cole de Dieu, Sans cette foi, il n'y a qu'aveuglement, qu'erreur, que mort durant & après cette vie.

Vous me dites que vos Peres ont mangé de la Manne dans le defert ; il eft vrai mais ils n'ont pas laiffé que de mourir, Cette Manne n'a pû ni les preferver de la mort dans le tems; ni leur procurer la vie éternelle. Il n'y a que moi à proprement parler, qui puiffe les preferver de la mort, parce que je fuis le pain de vie. Je donnerai à ceux qui croiront en moi la vie de l'ame, qui fera un gage sûr de leur refurrection bienheureufe, & de l'immortalité de leur corps. C'est ici proprement le feul pain defcendu du Ciel, afin que fi quelqu'un en mange avec les difpofitions neceffaires, il ne meure point de la

Jefus

declare

mort de lame. Ce pain divin dont je vous parle, fera pour les bons, c'est-àdire, pour ceux qui animez d'une vivefoi, le mangeront en état de grace, un gage fùr, & comme les arrhes d'une vie bienheureuse & éternelle ; il fera auffi pour les méchans qui manqueront de foi; ou qui ayant la foi, le mangeront en état de peché mortel, un gage de leur éternelle damnation.

§. XXIX.

Jefus Chrift ayant ainfi preparé à Chrift ce grand Myftere de l'Euchariftie les pofitive- efprits materiels & groffiers des Juifs, ment fa commence à leur parler clairement & prefence fans figure de la manducation véritable dans le & réelle de fon corps. Les paroles dont ment de il fe fert font fi expreffes & fi pofitives l'Eucha- que les Juifs quoi qu'accoûtumez à un

réelle

Sacre

riftie.

ftile metaphorique, & figuré felon le genie & l'ufage du païs, ne purent s'empêcher de les prendre dans le fens pro pre & litteral; tant il étoit clair que Jefus-Chrift parloit en ceci fans metaphote, & fans figure; ce qu'ils n'avoient pas fait lorfque le Sauveur avoit dit qu'il étoit la véritable vigne, Ego fum vitis vera; qu'il étoit la porte de

la bergerie: Ego fum ovium oftium ; qu'il étoit le bon Pafteur.: Ego fum Paftor bonus; qu'il étoit la lumiere du monde : Ego fum lux mundi; enfin qu'il étoit la vie, la verité, & la voye : Ego fum via, veritas, & vita; auffi nul des Juifs alors qui ofât fe recrier contre toutes ces propofitions; ils voyoient affez qu'il parloit dans un fens figuré, & par metaphore. Mais quand il dit ici, qu'il eft le pain vivant qui eft defcendu du Ciel Ego fum panis vivus qui de calo defcendi; quand il dit que fa chair eft veritablement une nourriture, & que fon fang est véritablement un breuvage: Caro mea verè eft cibus ; & fanguis meus verè eft potus; quand il dit que le pain qu'il doit leur donner, c'eft fa chair: Panis quem ego caro mea. eft; & que s'ils ne mangent la chair du Fils de l'homme, & s'ils ne boivent fon fang, ils n'auront point en eux la vie ; & qu'il le dit d'une maniere fi pofitive fi affurée, qu'il y ajoûte même une ef pece de ferment: Amen, amen dico vobis nifi manducaveris carnem Filii hominis, & biberitis ejus fanguinem, non habetis vitam in vobis ; Quand, dis-je, il parle de cette manducation réelle de fon corps, il le fait d'une maniere fi

dabo

G

claire fi pofitive, fi expreffe, qu'il n'eut pas pû s'expliquer plus clairement, ni dire en des termes plus formels plus propres, ni plus énergiques; que le pain qu'il leur donneroit à manger étoit réellement & fans figure fon propre corps, fa chair, & fon fang: Panis quem ego dabo caro mea eft pro mundi

vita.

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Les Juifs entrerent bien dans la penfée du Sauveur ; ils comprirent que Jefus-Chrift ne parloit point dans un fens figuré, mais d'une manducation propre & réelle: auffi fe dirent-ils les uns aux autres: comment cet hommeci nous peut-il donner fa chair à manger? fi Jefus-Chrift n'eut dit que ce que les heretiques de ces derniers tems lui font dire; qu'il n'eût parlé que de la manducation par la foi, & qu'il n'eût voulu dire autre chofe, fi ce n'eft que ce pain étoit la figure de fon corps, & non pas fa chair même ; connoiffant ce que les auditeurs penfoient, fçachant ce qui les revoltoit, & entendant même leurs murmures; pouvoit-il les laiffer dans une erreur que fes propres paroles avoient fait naître pouvoit-il fe dispenser de leur dire, qu'ils ne devoient pas prendre pour la réalité ce qu'il ne

leur difoit qu'en figure, pouvoit-il fe difpenfer d'adoucir & de modifier fes expressions, & ses termes : n'y étoit-il pas même obligé ? cependant il fait tout le contraire : il les confirme dans leur opinion; il fe fert de termes encore plus forts & plus clairs; & il ajoûte une maniere de parler qu'il n'employoit, que quand il vouloit dire quelque chofe qui meritoit une particuliere attention, & qu'il vouloit mieux faire entendre: En verité, en verité je vous le dis, & je ne fçaurois trop vous le dire: fi vous ne mangez la chair du Fils de l'homme, & fi vous ne beuvez mon fang, cette chair & ce fang qui compofent réellement mon corps, vous n'aurez point la vie en vous. Et par une furabondance de manifestation de fa pensée, & du vrai fens de fes paroles, il ajoûte immédiatement Car ma chair eft véritablement une nourriture, & mon fang eft véritablement un breuvage; & celui qui mange ma chair boit mon fang demeure en moi, & moi en lui, En verité, en verité je vous le dis: fi vous ne mangez la chair du Fils de l'homme, & fi vous ne beuvez fon fang, vous n'aurez point la vie en vous, c'est-à-dire, vous ne perfevererez pas long-tems en état de grace. Je fuis

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