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qu'il est né aveugle; mais nous ne fçavons pas d'où vient qu'il voit prefentement; nous ne fçavons pas non plus par qui fes yeux ont été ouverts. Interrogez-le, il eft affez d'âge : qu'il parle luimême fur ce qui le touche. Les Juifs donc firent venir pour la feconde fois celui qui avoit été aveugle, & ils lui diren; rends gloire à Dieu. (Les Juifs fe fervoient de cette formule quand ils exigeoient le ferment de quelqu'un, & qu'ils l'obligeoient de prendre Dieu à remoin qu'il diroit la vérité) rends done gloire à Dieu, lui dirent-ils, nous fça vons que cet homme eft un pecheur, un méchant homme. Je ne fçai s'il est mechant, leur repond cet homme ; ce que je fçai, c'eft que j'étois aveugle, &que je vois maintenant. Sur cela ils lui demanderent de nouveau, comment il lui avoit rendu la vûë; & il leur re pondit: je vous l'ai deja dit ; & vous l'avez entendu, d'où vient que vous voulez que je le redife? avez vous auffi envie vous autres, d'être de fes Difciples ils s'emporterent alors contre lui& en le maudissant ils lui dirent: foyez Je vous-même fon Difciple; pour nous, nous fommes Difciples de Moïfe; nous fçavons que Dieu a parlé à Moïfe, mais

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pour celui-ci, nous ne fçavons de quel le part il vient.

C'eft quelque chofe d'admirable repart cet homme, que vous ne fçachiez pas de quelle part il vient, ni qui il eft;& que cependant il ait ouvert mes yeux, & m'aic rendu la vûë! Or nous fçavons que Dieu n'exauce point lés pecheurs, mais fi quelqu'un fert Dieu, & lui obeït,c'eft celui-là que Dieu exauce. Depuis le commencement des fiécles on n'a point entendu dire que perfonne ait rendu la vue à un homine né aveugle. Sicelui-ci ne venoit de la part de Dieu, il ne pourroit rien faire de ce qu'il fait.

Une réponse fi fage les mit encore plus de mauvaise humeur : tu n'es que peché dès le ventre de ta mere, lui dirent-ils, & tu te mêles de faire le Docteur, & de nous faire ici des leçons; & ils le chafferent. Jefus ayant appris qu'ils l'avoient mis dehors, & l'ayant rencontré, lui dit : croyez-vous au Fils de Dieu ? & qui eft il, Seigneur, répondit-il, ce Fils de Dieu, afin que je croye en lui: Jefus lui dit alors: vous l'avez vû, & c'est lui-même qui vous parle. Alors cet homme s'écria: je crois, Seigneur, & fe jettant à fes pieds, il

l'adora. Le Sauveur adreffant alors la parole à tous ceux qui étoient presens : Je fuis venu au monde, dit-il, pour faire justice, c'est-à-dire pour manifef ter un fecret impenetrable de la Divine Providence, qui quoique étonnant, ne daiffe pas d'être jufte, puifqu'il eft fondé fur l'endurciffement volontaire des mechans. Je fuis venu, afin que ceux qui font aveugles, voyent; & que ceux qui voyent deviennent aveugles. Les Gentils qui font dans les tenebres ouvriront un jour les yeux à la lumiere, & les Juifs qui font dans la lumiere, fermeront les yeux, & vivront dans une fombre nuit, Les Prêtres, les Pharifiens, & les Docteurs de la Loi qui font fi éclairez, feront aveuglez au milieu mê-me de leurs lumieres; & les plus fimples de parmi le peuple, qui ont le cœur droit, & l'efprit plus docile feront éclairez de la lumiere de la foi & de la verité,

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Le Jugement que Jefus dit qu'il vient faire, & la juftice qu'il vient rendre fe prennent ici pour la condamnation que fait Jefus Chrift des Juifs prefomptueux & endurcis : & pour la grace qu'il accorde aux Gentils qui doivent entrer dans l'Eglife, tandis que

les Juifs en feront exclus par leur orgüeil, & leur prefomptueufe incredulité. Ainfi Jeremie, ainfi Ifaïe, ainfi le faint vieillard Simeon l'avoient prédit en parlant du Meffie. Les Pharifiens comprirent bien que cette terrible menace les regardoit: fommes-nous donc auffi des aveugles nous autres, direntils? fi vous êtiez aveugles, leur repond Jefus, vous feriez fans peché; mais maintenant que vous dites: nous voyons clair, vôtre peché fubfifte, Les lumieres mêmes, & la fcience que vous vous vantez d'avoir font vôtre condamnation, & rendent vôtre infidelité inexcufable. Comme s'il eût voulu dire dit faint Auguftin: fi vous fentiez vôtre aveuglement, vous auriez recours au Medecin; mais vous demeurez pecheurs, parce qu'étant fages, & faints à vos propres yeux, vous ne croyez point avoir befoin de perfonne qui vous éclaire, & vous fanctifie.

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§. XXXVIII.

rabole

du bon

Le Sauveur ayant ainfi confondu la La Pa forte vanité de ces fuperbes qui fe mêloient de conduire les autres,lorfqu'ils Pasteur vivoient eux-mêmes dans un fi pitoya

eft un

nouveau

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Joan. 10.

le

témoi- ble aveuglement; Il leur propofa fous la parabole du Pasteur, & des brebis, Divini les trois caracteres differens de trois fortes de perfonnes qui s'engagent dans gouvernement des ames. Il leur dit donc, qu'il y en a qui au lieu d'entrer dans la bergerie par la porte, comme le vrai Pasteur, y entrent par quelque bréche, ou par d'autres endroits comme des voleurs, pour voler, pour égorger, & pour perdre; & il leur expliqua cet Enigme, en leur difant qu'il étoit lui-même cette porte, par laquelle il faut entrer dans la conduite du troupeau. Il nous réprefente en même tems l'Eglife comme une bergerie, dans laquelle on ne peut entrer que par lui; & les Fidéles comme des brebis dont il -eft le Pasteur & le Pere.

Il y en a d'autres, ajoûta - t-il, qui étant entrez par. la porte, conduifent les brebis avec un esprit de mercenaires, en forte que s'aimant uuiquement eux-mêmes, ils les abandonnent, dès qu'ils voyent venir le loup. Enfin il y a de bons & legitimes Pafteurs, qui entrent à la verité par la porte, en fe faifant ouvrir par le portier. Ils connoiffènt les brebis, & les brebis les connoiffent à la voix. Ceux-ci en prenant grand

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