à l'Ange qu'elle ne comprenoit pas comment ce grand Myftere pourroit s'accomplir en elle, qui ayant confacré dés fes premieres années fa virginité à fon Dieu, fembloit ne pouvoir pas devenir Mere. L'Ange qui s'attendoit bien qu'elle lui propoferoit cette difficulté, lui déclara alors tout le Mystere ; ce Fils adorable, lui dit-il, dont vous serez la Mere dans le tems, n'aura point d'autre Pere que celui dont il est né avant tous les ficcles. Vous n'aurez point d'autre Epoux que le Saint-Efprit, qui étant la vertu toute puiffante du TrèsHaut, formera dans vous le fruit que vous devez porter, & à qui vous donnerez le nom de Jesus, c'est-à-dire, Sauveur, après que vous l'aurez mis au monde. Ne craignez donc rien, Vierge très-Sainte, loin que l'éclat de vôtre virginité foit obfcurci en devenant Mere du Fils de Dieu, elle en devien dra plus brillante & plus pure, Et pour vous faire voir que rien n'eft impoffi ble, ni même difficile à l'égard de Dieu voilà que vôtre coufine Elizabeth , qui naturellement à l'âge où elle eft, ne devoit point avoir d'enfant, eft cependant devenue groffe d'un fils, après avoir été fterile jufqu'à fa vieilleffe; & celle qu'on croyoit devoir mourir dans fa trifte fterilité, eft à prefent au fixiéme mois de fa groffeffe. Après cet éclairciffement, Marię comprenant qu'elle pouvoit être mere fans ceffer d'être Vierge, penetrée du plus vif fentiment de reconnoiffance, de foumiffion, & d'humilité, dit à P'Ange: Voici la fervante du Seigneur, que vôtre parole s'accompliffe en moi quelque indigne que je fois d'une fi grande grace, au L'Ange ayant reçû cette réponse qui rempliffoit le Ciel & la terre de la plus douce joïe, prit congé d'elle & difparut. Au même moment le Saint-Esprit venant d'en-haut dans fon fein, & la vertu du Tout-puiffant fe répandant fur elle comme une ombre opera en elle le grand Myftere, quel il l'avoit preparée dès le premier inftant de fon immaculée Conception & forma de fon plus pur fang, le Corps du plus beau des hommes, & créa l'ame la plus parfaite qui fut jamais, Au même temps la feconde perfonne de l'adorable Trinité le Verbe Divin s'unit fubftantiellement à P'un & à l'autre, & par cette union hypoftatique de la nature humaine avec la nature Divine dans la Perfonne Cependant la Sainte Vierge ayant La Sain te Vier appris de l'Ange même, la grace fingu- ge fait te Eliza liere que le Seigneur avoit faite à fa une vificoufine fainte Elizabeth, refolut de l'al- te à fainler voir, pour le conjouït avec elle, & bech pour obéir à l'inspiration divine qui la portoit à faire cette vifite, moins par une pure bienséance, que par un motif de charité,vifite qui devoit être fi avan B Lus I. tageufe au Precurfeur, felon les deffein de la Divine Providence. Elle partit fu l'heure, & fe rendit par les montagne de Judée à la ville d'Hebron, où demeu roit Elizabeth, Sa prefence opera de merveilles en faveur de la Mere & d Fils. L'enfant de fix mois qu'Elizabet portoit dans fon fein, fut éclairé d'un lumiere furnaturelle, qui lui fit conno tre celui & celle qui le vifitoient, & fut fanctifié fur l'heure, Le treffaille ment furnaturel qu'il eut, fut la mar que de fa joïe & de fon refpect, La mer s'en apperçût; & en même-tems rem plie elle-même de l'Esprit Saint, ell connut le Myftere inéfable de l'Incarna tion, & toutes les merveilles que Die avoit operées dans celle qui lui faifoi l'honneur de lui rendre vifite. Auf tranfportée d'admiration, & de joïe, peine eut-elle ouï la voix de Marie qu'elle s'écria par un faint tranfport Vous êtes benie entre toutes les fem mes, & le fruit de vos entrailles eft be ni.Et d'où me peut venir ce bonheur qu la Mere de mon Seigneur me vifite: ca au moment que j'ai entendu vôtre voix lorfque vous m'avez faluée, l'enfan que je porte, a treffailli de joïe dans me Alancs. O que vous êtes heureufe d'a voir crû au Seigneur ! car tout ce qui vous a été dit de fa part, ne manquerą pas de s'accomplir en vous. Ces loüanges fi bien fondés n'enflerent point le cœur de la plus humble des Vierges; elle ne pût pas diffimuler les graces extraordinaires que Dieu lui avoit faites, mais elle fût lui en rapporter toute la gloire, en reconnoiffant fon indignité: Mon ame, s'écria-t-el- “ Luc. 1. le par un faint enthousiasme mon gran c ame celebre les grandeurs du Sei- " gneur, qui a operé en moi de fi des chofes, qu'à lui feul en foit toute la gloire. Je ne puis y penfer que mon cœur ne treffailliffe de joie au fouve- " nir d'un fi infigne bienfait. Dieu a “ daigné arrêter les yeux fur la baffelle “ de la plus petite fervante ; & c'eft ce qui va donner fujet à tous les peuples d'admirer, & d'exalter mon bonheur " dans tous les fiecles à venir. C'eft ainfi " que Dieu prend plaifir, pour ainfi di- “ te, d'humilier les Grands du monde, " & de les reduire à la derniere mifere, " tandis qu'il comble de biens & de " gloire ce qu'il y a de plus pauvre &“ de plus abjet. Je ferai un exemple il- " luftre de cette verité dans tous les fie-, cles, auffi-bien que de la verité des "s |