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nité, Vous verrez bien tôt le Fils de l'Homme affis à la droite de Dieu toutpuissant, venir fur les nuës du ciel. A ces paroles le Grand - Prêtre dechirant fes vêtemens, (c'étoit montrer qu'il venoit d'entendre un blafphême) s'écria: il a blafphemé; qu'avons-nous plus affaire de témoins? vous venez d'entendre vous-mêmes le blafphême: que vous en femble? tous répondirent qu'il meritoit la mort ; & ils l'y condamnerent, Jefus ayant été ainfi condamné à mort par le Grand Prêtre, & par tous ceux qui compofoient le Sanhedrin, ou grand Confeil, il fut livré à l'infolence des foldats, & à la brutalité des va lets, qui pafferent le refte de la nuit à s'en jouer dans la cour du Palais, & à lui faire toutes les infultes imaginables. On lui cracha au vifage, on lui don na des coups de poing, & il y en eut qui le fouffleterent, en difant par derifion : CHRIST, montre - nòus que tu es Prophéte: devine qui eft ce qui t'a frappé. Jamais infame criminel, jamais vil efclave ne fut fi mal traitté, fi outragé ni fi raffafié d'opprobres; mais il falloit que tout ce qui avoit été prédit du Meffie, s'accomplit dans la perfonne adorable de Jefus Chrift; & qu'en

C

Thren.3. lui s'accomplît cette Prophetie: Sat rabitur opprobriis.

Pierre

renie JefusChrist,

& Judas fe

pend par de Lefpoir.

S. LIV.

Cependant quelque timide que fût Pierre, il ne pouvoit fe feparer de fon bon Maître ; & il fe gliffa dans la cour du Palais, où le Sauveur paffa la nuit fous la garde, & à la discretion des foldats, & des valets du Grand - Prêtre. Comme les nuits font froides en ce tems-là dans la Palestine, on avoit allumé, du feu dans la cour. Pierre s'en étant approché, fut accufé par une servante d'être un des Difciples de Jefus. Il s'en défendit, & nia qu'il l'eût jamais connu. Un des foldats ayant réconnu à fon parler qu'il étoit Galiléen lui fit le même reproche; & Pierre jura qu'il ne connoiffoit point le Prifon nier; enfin une heure après, un des domestiques du Grand-Prêtre le voyant auprès du feu, affùra qu'il étoit certai nement un des Difciples de Jefus car il dit qu'il l'avoit vû dans le Jardin, où Jefus avoit été arrêté : alors Pierre effrayé, & craignant qu'on ne l'arrê tât, affùra pour la troifiéme fois avec ferment, qu'il ne l'avoit jamais cons

nu. En même tems le Coq chanta ; & le Sauveur qui n'étoit guere éloigné de là, ayant jetté un regard amoureux fur ce lâche Disciple, le fit reffouvenir de fa prediction. Pierre reconnut alors fa faute ; il en eut le cœur percé de la plus vive douleur. Il fe retira fondant en larmes, & paffa les trois jours, à pleurer amerement son infidelité.

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Le lendemain dès qu'il fut jour, il y eut encore une affemblée generale des Prêtres, des Senateurs & des Docteurs de la Loi dans la falle du Sanhe-, drin. On y fit comparoître le Sauveur. en criminel. On lui demanda de nouveau s'il étoit le Chrift, le Meffie: fi je vous le dis, repondit - il, vous ne m'en croirez pas. Que fi je vous interroge à mon tour, vous ne me répondrez point, ni vous ne me laisserez point aller, car mon heure eft venuë, Sçachez feulement que le Fils de l'Homme fera bien tôt affis à la droire de Dieu fon Pere. Alors ils dirent tous: vous êtes-donc le Fils de Dieu ? il répondit ; Vous dites vrai, que je le fuis. Ils s'écrierent tous alors tumultueufement qu'avons nous befoin d'autre témoig nage, puifque nous-mêmes nous venons de le lui entendre dire de fa propre

Luc. 221

bouche? Ayant deliberé alors des moyens qu'ils avoient à prendre pour le faire mourir ; ils conclurent de le livrer entre les mains de Ponce Pilate Gouver neur de la Judée pour les Romains : parce qu'ils n'avoient plus le droit de faire mourir perfonne.

Cependant le traître Judas apprenant que Jefus avoit été condamné à mort, bourrelé alors horriblement par les remords de fa confcience

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effravé

de l'énormité de fon crime & touché d'un vif repentir purement naturel, il court chez les Prêtres, & les Anciens ; & leur rapportant les trente pieces d'argent: j'ai peché, leur dit-il en livrant le Sang du Jufte. Cet aveu, eût dû les toucher: ces impies fe contenterent de lui dire que nous importe : c'est à vous à voir. Ce malheureux voyant que fa retractation étoit fans fruit: au lieu d'avoir recours à la bonté infinie de fon bon Maître, qui lui eût fait certaine ment mifericorde, s'il fe fût veritable ment repenti, il s'abandonne au defefpoir; & ayant jetté l'argent dans le Temple, où les Prêtres fe trouvoient, il fort, & fe va pendre. L'argent fut ramaffé par les Anciens, qui ne voulu rent point le mettre dans le trefor du

Temple,

Temple, parce que c'étoit, dirent-ils, le prix du fang, & de la vie d'un homme; c'est pourquoi ils en acheterent le champ d'un Potier pour fervir de cimetiere aux étrangers; & ce champ fut en effet dèslors apellé, Haceldama, c'està-dire, le champ du fang. On vit ainsi l'accompliffement de ce qui avoit été predit formellement par le Prophéte Zach Zacharie que le CHRIST feroir mis à prix, qu'il feroit vendu trente pieces d'argent, & que de cet argent on acheteroit le champ d'un Potier.

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IL

Chrift

qui le

cent.

Le Sauveur fut donc mené les mains Jefusliées comme un criminel d'Etat, de la chez maison de Caïphe, au Pretoire, c'est-à- Pilate dire, au Palais du Gouverneur. Le bruit qui s'étoit repandu dans la ville depuis innole jour precedent, que les Docteurs de la Loi & les Chefs de la Synagogue, aussi bien que les Magiftrats, avoient enfin decouvert que ce Jefus qu'on avoit regardé jufqu'alors comme un faint Homme envoyé de Dieu, étoit un impofteur, un faux Prophéte; & que tout ce qu'il avoit operé de frappant & de miraculeux, étoient de purs preftiges, que

N

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