foins, & les délices de fa fainte Famille. Comme la grace avoit prevenu de neuf mois sa naissance, l'ufage de fa raison prevint auffi de beaucoup l'âge où cette raifon fe développe dans les autres enfans. MARIE avoit à peine deux ans, que la pieté, la fageffe même, la douceur, & la docilité fembloient déja faire fon caractere. Comme les Altres, quoique tous lumineux dès le premier moment qu'ils paroiffent fur l'horizon femblent déveloper à nos yeux un nouvel éclat, à mesure qu'ils s'éloignent du point où ils se levent; de même la très-fainte Vierge femblable à l'Etoile dont elle portoit le Nom, quoique dès le premier inftant de fon immaculée Conception, elle eût reçû le don de fageffe, elle n'en manifeftoit les trefors qu'à mesure qu'elle croiffoit. On admiroit tous les jours dans cette jeune Enfant, des traits brillans d'une raifon prématurée; tout étoit en elle extraordinaire, parce que tout y étoit merveilleux. La raifon ayant prévenu. l'âge fainte Anne & faint Joachim crurent qu'ils devoient auffi prevenic. le tems d'accomplir leur vocu. Ils. avoient promis au Seigneur, que s'il leur donnoit un enfant malgré leur lon gue fterilité, ils le confacreroient à fon fervice dans le Temple. Trouvant dans leur fainte Fille à l'âge de trois ans, un efprit, une fageffe, une pieté prématurée qu'on ne trouvoit pas même dans les autres filles beaucoup plus âgées ; ils refolurent d'aller rendre au Seigneur ce trefor, qu'ils n'avoient qu'en dépôt. Il eft aifé de s'imaginer combien ce facrifice dût leur couter. La jeune Fille faifoit toute leur confolation, c'étoit tout leur trefor, & elle faifoit toutes leurs plus douces délices; mais quand on eft animé de l'efprit de Dieu, quand on eft autant religieux que l'étoient faint Joachim & fainte Anne, on prefere volontiers ce qu'on doit au Seigneur à fa propre fatisfaction. Ce fut le 21. du mois de Novembre que ce fit ce double facrifice. Sainte Anne, & faint Joachim vinrent offrir au Seigneur dans le Temple, tout ce qu'ils avoient de plus precieux, & de plus cher dans le monde ; & MARIE vint animer cette offrande, & réaliser ce facrifice en fe confacrant elle-même de tour fon cœur, & de la maniere la plus parfaite à fon Dieu, par une oblation publique & folemnelle qu'elle fit au Seigneur de fon cœur, de fon ef prit, de fon corps, & de toutes les puiffances de fon ame, & tout cela de la maniere la plus fainte, & la plus agréable aux yeux de Dieu ; & l'on peut dire que ce fut le facrifice le plus faint, & le plus parfait qui eût été fait à Dieu depuis la naissance du monde; & c'est ce qu'on appelle la Prefentation de la fainte Vierge au Temple de Jerufalem. §. X I. fenta la fain te Vier ge. Il y avoit deux fortes de Prefentation La Pre au Temple parmi les Juifs; la premie- tion de re étoit d'obligation, puifqu'elle étoit commandée par la loi, & c'étoit celle que faifoient les femmes certains jours déterminez après leurs couches, c'est-àdire, quatre-vingt jours pour les filles ; & quarante pour les garçons. L'autre Prefentation fe faifoit par ceux qui avoient vouez leurs enfans au fervice de Dieu dans le Temple; telle qu'elle fut faite par Anne mere de Samuel, & par fainte Anne mere de la trés-fainte Vierge. Il y avoit pour cela autour du Temple de Jerufalem des appartemens destinez les uns pour les hommes, les autres pour les femmes, quelques-uns les garçons, & un autre pour les pour filles ou que qui devoient accomplir la pro meffe qu'ils avoient faite eux-mêmes leurs parens avoient faite pour eux. Les jeunes enfans y étoient élevez avec foin dans la pieté par des maîtres habiles, & par des maîtreffes d'une probité univerfellement reconnue ; & leur emploi étoit de fervir aux minifteres facrez, chacun felon fon âge, fon état, fon fexe, & fa capacité. Saint Joachim, & fainte Anne fçachant ce que dit le Sage: fi vous avez fait vou à Dieu, ne differez point de vous en acquitter: dès qu'ils virent que leur fainte Fille avoit plus de fageffe & de vertu à l'âge de trois ans, que les autres à l'age de quinze, réfolurent d'accomplir leur vçu, dont la fainte Fille follicitoit l'accompliffement, avec une ardeur extraordi naire. Cette pieufe ceremonie fe faifoit toûjours avec folemnité. Les parens conduifoient leurs enfans au Temple, accompagnez de toute la parenté. Le pere & la mere ayant prefenté l'enfant au Prêtre fur le pied de l'Autel, ils lui déclaroient le vœu qu'ils avoient fait, de confacrer leur enfant au Temple, & après quelques prieres, le Prêtre l'ad mettoit folemnellement au nombre des Miniftres ou ferviteurs, & fervantes de la maifon de Dieu, jufqu'à un certain tems déterminé; & c'est ce qu'on appelloit prêter un enfant au Seigneur felon le langage de l'Ecriture: Idcirco, & ego commodavi eum Domino: c'est pourquoi je l'ai prêté au Seigneur, dit Anne mere de Samuel, lorfqu'elle l'alla prefenter au Temple. Ifidore de Theffalonique dir que la ceremonie de la Prefentation de la fainte Vierge dans le Temple de Jerufalem, fe fit avec une celebrité extraordinaire; que non-feulement toute la parenté voulut l'y accompagner, mais que par une infpiration fccrete de la divine Providence, dont on ignoroit ie myftere, toutes les perfonnes les plus qualifiées de Jerufalem, voulurent af fifter à cette augufte ceremonie, tandis que les Anges l'accompagnoient invifiblement, & celebroient par leurs chants melodieux cette fête : Primarios quoque Hierofolymitas viros & mulieres interfuiffe huic deductioni, fuccinentibus univerfis Angelis, On ne fçait pas qui fut le Prêtre qui reçût cette incomparable Vierge. Saint Germain Patriarche de Conftantinople, & George de Nicomedie ont crû que vrai-femblablement |