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augmenté fon domaine. La matiere de la converfation ne fut pas long-tems indécife.

SECOND ENTRETIEN.

Sur la nature de l'ame qu'on fuppofe
aux Bétes, & fur les principes, en
général, dont on appuie cette hypo-
thèse.

LA COMTESSE, LE COMMANDEUR
L'ABBÉ.

LA COMTESSE. Vous êtes venu
bien à propos, mon cher Abbé, pour
prendre la défenfe de mes fens, &
pour étayer ma raifon. Les uns m'as-
furent que les bêtes font des êtres ca-
pables de fentir & de penfer : tandis
que l'autre ne fçait que répondre aux
obfervations de Monfieur, qui l'ont
prefque convaincue qu'elles ne font
des machines.

que

L'ABBÉ. Quoi, Monfieur le Commandeur est encore Cartéfien ! Cela

I.

n'eft plus permis aujourd'hui. C'eft de la philofophie furannée.

LA COMTESSE. Il eft vrai que dans notre fiècle, l'ancienneté, fur-tout dans les opinions, s'eft pas un titre de faveur. Je ne fçais fi les fciences y ont beaucoup gagné; mais il me femble que les premiers principes des mœurs y ont étrangement perdu. Cela ne fonde pas pour moi un préjugé favorable à la nouveauté.

LE-COMMANDEUR. Votre réflexion, Madame, est très-jufte. Cependant le vrai philofophe ne doit pas plus rejeter une opinion parce qu'elle eft nouvelle, qu'il ne doit l'admettre à raison de fon ancienneté. L'efprit humain a vu le vrai, a cru le faux dans tous les tems. Le poids des raifons doit feul le décider. Un fyftême pofe-t-il fur des preuves directes qu'on ne puiffe révoquer en doute? En offre-t-il d'indi

rectes, par la facilité de le concilier avec des vérités inconteftables, que toute autre opinion combat? La raifon doit conclure à le préférer. Le fyftême des automates me paroît avoir ces avantages. L'expérience nous montre dans le mouvement de la mariere, dans le jeu de notre propre corps, des effets de pur mécanifme, auxquels peu

vent s'affimiler les actions des Bêtes. Les deux grandes difficultés qui résultent de leur ame prétendue, contre l'immortalité de l'ame humaine & contre la bonté de Dieu, difparoiffent dans le fyflême des automates : je ne confidere plus, fi Goméfius Pèréira l'a foupçonné; fi Defcartes l'a inventé, ou feulement rédigé; s'il date d'un fiécle ou de dix ; s'il eft d'aujourd'hui ou d'hier: je m'en tiens aux preuves qu'adopte ma raifon; & je les croirai folides, jufqu'à ce que ces preuves détruites fallent place à d'autres qui m'offrent un fyftême mieux fondé, & à l'abri

des difficultés qui pourroient empêcher

ma conviction.

L'ABBÉ. Si le fyftême qui range les Bêtes dans la claffe des pures machi nes éloigne des objections importantes qui effrayent la Religion; vous conviendrez, M.que du fond même de cette hypothèfe, il en naît bien d'autres qui pas moins graves. » Il eft cerle Cartefianifme a toujours que triomphé, tant qu'il n'a eu en tête que les ames matérielles d'Ariftote; que ces fubftances incomplettes tirées » de la puiffance de la matiere, pour

Ency- ne font

clopédie, P. 197,

» tain

در

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faire avec elles un tout fubftantiel » qui penfe & qui connoît dans les » Bêtes. On a fi bien mis en déroute » ces belles entités de l'école, que je » ne pense pas qu'on s'avife de les reproduire jamais ces phantômes » n'oferoient foutenir la lumiere d'un » fiécle comme le nôtre. S'il n'y avoit » pas de milieu entre eux & les auto

دو

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