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ix

AVIS

AU LECTEUR.

REVEIL VEILLER une ancienne queftion prefqu'oubliée; la traiter après de grands génies qui n'ont pas plus réuffi à perfuader la multitude, qu'à convaincre les Savans qui ont combattu leur opinion; être infiniment loin des connoiffances des uns & des autres; prendre cependant un parti & entrer en lice pour le foutenir: c'est une entreprise qui, au premier afpect, doit paroître auffi téméraire que déplacée. Quelqu'ancienne, quelqu'ou

bliée qu'on la fuppose, cette queftion n'eft cependant encore, ni décidée, ni bannie des converfations. On écrit encore pour & contre le principe d'où partent les actions des bêtes; & il est bien peu de jours, à la Campagne furtout, où l'on ne céde à l'occafion qu'elles fourniffent d'en par

ler.

Cette matiere tient même à tant d'autres, qu'on eft forcé quelquefois de l'effleurer, au moins en paffant : c'eft ce qui m'eft arrivé dans un Ouvrage, fur l'homme, lequel m'occupe depuis quelques années. Sans prendre un parti décidé, j'y laiffe cependant entrevoir un penchant très marqué à ne croire les bêtes que des automates, ce qui, j'en fais l'avcu, a paru étrange à la feule perfonne à qui j'ai communiqué quelques cahiers de mon

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manufcrit. On s'imagine bien que ce penchant a fouvent percé dans la converfation; & j'avoue encore qu'on ne m'en a tenu compte que pour le trouver extravagant & ridicule. Les femmes furtout le font le plus vivement & le plus univerfellement récriées contre le paradoxe des bêtes-machines; & m'ont le moins furpris. Le fentiment les fubjugue c'est leur gloire. Leur montre & leur chien ne peuvent différer à leurs yeux par le feul mécanisme plus parfait dans l'un que dans l'autre. Que n'en coûteroit - il pas l'amour propre de croire, que tant de foins, de careffes, de facrifices, de fentimens, ne font prodigués qu'à de la matiere & à du mouvement combinés? Ce qui m'a plus étonné, c'eft que des hommes, d'ailleurs très-inftruits & dont je refpecte les lumieres,

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me regardoient quelquefois avec ce fourire de pitié & de dédain, qui plaint orgueilleufement les fottifes humaines. Si j'euffe imaginé le fyftême des Automates, il n'eft pas douteux que je ne l'euffe abandonné, comme la rêverie d'une imagination égarée. L'amour propre va rarement jufqu'à nous perfuader que, fur une matiere qui a exercé prefque tous les efprits, le nôtre foit le feul qui penfe jufte. Mais tant de beaux génies du fiécle précédent, & des Métaphyficiens fi profonds (je ne nommerai que M.de Keranflech,) l'ont adopté dans notre fiécle, que je n'ai pu me regarder comme un vifionnaire fur cet article. J'ai fouhaité cependant qu'on m'éclairât. Il est naturel d'aimer à penfer comme le grand nombre, furtout quand l'erreur de la multitude n'eft pas démontrée. L'unifor

mité dans la maniere de penfer eit un des plus grands liens de la fociété. J'ai donc demandé des raifons: j'ai cherché des lumieres; mais on en trouve rarement dans les conversations ordinaires. On y difpute beaucoup : on n'y éclaircit rien. Quelques principes décififs, mais qu'on n'a pas le loifir de développer; quelques conféquences fortes, mais ifolées & qu'on ne vous permet pas, ou qu'il feroit trop long de rapprocher de leur principe, ne convainquent & ne ramènent aucun des contendans. Dans une de ces difputes fur la matiere préfente, une Dame de beaucoup d'efprit, conjecturant bien que quelques raifons vagues ne me convertiroient pas, me renvoya au Dictionnaire Encyclopédique. Je dévorai, plutôt que je ne lus J'Article, Ame des Bétes; entraîné par l'espoir d'y découvrir le

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