tes. Car fi, l'efprit toujours prévenu en faveur, par exemple, de l'ame des bêtes, vous jugez que chaque preuve ou réfutation particuliere ne prouve rien, parce qu'elle ne décide pas pleinement la queftion: fi, avant d'avoir vu la totalité des preuves en faveur des automates, vous en revenez toujours à votre opinion vue en gros; comme à un point de ralliement, où le préjugé prend de nouvelles forces: fi vous abandonnez votre lecture, par ce jugement provifionnel, que la fuite ne vous convaincra pas plus que ce que vous auriez lu jusques-là : il n'eft pas douteux que je ne perde mon procès à votre tribunal; mais vous conviendrez auffi que vous m'aurez laiffé le droit d'appeler de votre partialité & de votre négligence, à vousmême mieux inftruit; puifqu'a

yant

yant en main toutes les pièces de Paffaire, vous ne vous êtes donné la peine, ni de les apprécier, ni même de les lire.

Je ne vous reproduis cependant pas tout ce qui a été dit pour & contre l'ame des bêtes & les automates. J'ai cru que ma tâche & la vôtre feroient fuffifamment remplies, fi je vous préfentois la réponse à l'ouvrage, fur cette mariere, le plus connu, le plus récent, le mieux raifonné & le plus méthodique; qui doit même avoir le plus d'autorité, puifqu'on en a adopté & configné les principes dans ce Dictionnaire fameux, que bien des gens regardent comme le grand-œuvre de la Nation, destiné à perpétuer fes lumières & à diffiper fes ténèbres, dans la fucceffion des âges.

Je fuis donc fondé à vous affurer que vous trouverez ici tout ce

s'accorde mutuellement un fonds d'efprit & de connoiffances, dont le plus fouvent on fe croit feul propriétaire.

Si l'interlocuteur qui joue ici le rôle du Cartéfien a un ton décidé, vous ne devez pas en être furpris. La forme de l'ouvrage l'exigeoit. Il falloit bien d'aillcurs l'oppofer au ton tranchant du partifan des ames. Quoiqu'il en foit, ne vous y laiffez point prendre. Le ton peut faire quelque impreffion fur les organes; mais il ne doit point ébranler la raifon.

Vous remarquerez fans doute quelques endroits, où j'emploie l'autorité de la révélation. Elle ne doit vous paroître ici déplacée, ni contre M. Bouillet, qui a toujours refpecté & défendu la Religion dans fes écrits; ni contre fon Rédacteur qui lui rend éga

per

lement hommage. C'eft de plus un arfenal, où il a dû n'être mis de prendre des armes, puifqu'ils y cherchent auffi des reffources au befoin.

Quelque tems que vous donniez à la lecture de ces Entretiens, ne le croyez pas entiérement perdu pour votre utilité. Toutes les vérités font liées: elles forment entre elles une chaîne, de même que les êtres matériels; & vous fcavez qu'à l'égard de ceux-ci les combinaisons les moins fenfibles conduifent, d'une maniere imperceptible, de la matière la plus brute à la matière la plus induftrieufement organisée. Vous remarquerez aisément le grand nombre d'anneaux de la chaîne des vérités, auxquels l'objet de ces Entretiens a rapport. Vous y en trouverez qui font du reffort de la mécanique, de l'œconomie

animale, de l'Hiftoire Naturelle, de la Phyfique, de la Métaphyfique, de la Morale & de la Religion. Ainfi, quand même la découverte du principe qui produit les mouvemens des brutes feroit peu effentielle à l'homme, (peu lui importe en effet, la connoiffance ifolée du pourquoi & du comment elles agiffent) vous comprenezcependant quecette difcuffion peut devenir très intéreffante par fes acceffoires; & vous conviendrez fûrement, après la lecture de ces Entretiens, qu'il n'eft ni indifférent, ni fans conféquence, de s'attacher, par principes, à l'hypothèse de l'ame des bêtes.

N. B. Je vous prie de ne pas négliger l'Errata qui eft à la fin de chaque Tome. Vous y trouverez des corrections effentielles & des additions utiles,