A MADAME MADAME D* S** D* S* R* MADAME, UN Ouvrage qui fans ceffe contredit les infpirations les plus victorieufes des fens, a quelque droit de paroître fous vos aufpices. Il peint vos mœurs, qui ont toujours fi bien exprimé jufqu'où il eft permis de fe préter à leur voix, & le terme où la Philofophie & la Religion doivent leur impofer filence. Cette force de l'ame qui fait triompher de leur plus feduifant langage, toujours héroïque, eft d'autant plus admirable en vous, Madame, qu'elle s'y trouve réunie à la plus vive & à la plus délicate fenfibilité. Le Ciel vous devoit l'affortiment précieux de deux qualités, en apparence, fi oppofées, pour vous rendre, par l'une, fupérieure aux épreuves où l'autre vous mettroit parmi les orages fréquens dont votre vie devoit être agitée. C'eft, MADAME, cette fermeté inébranlable qui vous a laiffé toute la liberté de l'efprit au milieu des revers fi effrayans pour les amès fenfiblement délicates. C'eft elle qui vous a fait voler généreusement au-devant des facrifices dont vous deviez étre la victime. C'est elle qui vous a permis d'envifager d'un ail prefque ftoïque, & de foutenir fans foibleffe, les privations cruelles qui déchiroient votre cœur. C'eft elle qui dans le fein des peines,auxquelles le Ciel femble vouloir déformais proportionner vos plaifirs, a toujours entretenu une fi noble férénité fur votre front, une douceur fi charmante dans votre caractère, une activité fi attentive dans votre bienfaifance, une fi jufte égalité dans lecommerce de la vie. Digne d'être l'époufe la plus chérie, amie conf tante & folide, mais, par deffus tout, mere tendre, je fçais que je bleffe votre modeftie par ce tableau fidèle, dont mon attachement de tant d'années a eu le loifir de vérifier tous les traits. Mais ne pouvant ignorer l'ufage qu'en fera pas? votre Religion, aurois-jepu craindre de vous l'offrir? Il ne fera pour vous que l'occafion d'un nouvel hommage à l'Auteur de tout bien. Et que ne lui devez-vous pas Coup d'œil jufte, tað fin, goût délicat, langage épuré, expreffion facile... Je ne vous rappelle, Madame, ces brillantes qualités de votre efprit, que pour vous prier de n'en faire aucun usage en lifant ces Entretiens. Je ne les offre qu'à votre indulgente amitié, comme un foible tribut de la vive reconnoiffance & du refpect inviolable. avec lefquels je fuis, MADAME, Votre très-humble & trèsobeiffant Serviteur, L'ABBÍ J*** P** D* L* P**. |