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rassis; point de tons, point de préten-. "tions. Je céderois, dès que je pourrois "descendre avec décence. Je voilerois "même mes forces; et je serois plus tou"ché d'obtenir les suffrages, que de les contraindre.

» 3. J'aimerois mieux être un homme " estimé qu'un homme aimable; un Officier » de nom, qu'un joli cavalier; et je prendrois, si je pouvois, en talens, la part de mérité que les François cherchent >> trop souvent en agrémens et en ama»bilité.

» 4.o Je fuirois les passions. Je les crois » au moins une trève à nos devoirs. Ce"pendant, comme il seroit peu raison»nable d'aller sur ce point jusqu'au pré"cepte, je ferois ensorte de n'avoir dans mes goûts que des objets respectables: c'est le seul moyen de restituer par un » côté, ce que l'amour fait toujours per>>dre de l'autre à l'exacte vertu.

"J'allois mettre • 5. mon cher frère; mais la crainte de faire un sermon m'ar» rête; et puis, je me persuade qu'il faut » de courtes leçons aux grands courages.. >> C'est ainsi que mon âme se plaît à parler » à la vôtre, et j'entre à merveille, comme » vous voyez, dans l'éducation que vous » avez reçue.

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» Il faut pourtant que j'ajoute à mes >> avis le pouvoir de l'exemple: je suis >> assez heureuse pour le trouver dans »notre sang. De tels exemples sont, comme » vous savez, des commandemens absolus.

» Je ne sai si c'est cette raison seule qui » me détermine à vous les transcrire ici; >> mais quand j'y mêlerois un peu d'orgueil, » c'est peut-être là toute la gloire de notre » sexe; la vôtre consiste à les imiter.

» Barry notre grand oncle étoit Gou» verneur de Leucate (a) en Languedoc, n sous le régne de Henri IV. Les Ligueurs l'ayant fait prisonnier, le con» duisirent dans la ville de Narbonne (b) » qu'ils avoient en leur pouvoir là on » le menaça de la mort la plus rigou» reuse, s'il ne livroit la place; sa réponse » fut qu'il étoit prêt à mourir. Barry avoit » une jeune épouse qui s'étoit renfermée

»

dans Leucate. Les Ligueurs la crurent » plus facile à vaincre : Ils l'avertirent du dessein de son mari, et lui promirent »sa vie, si elle livroit la ville. La réponse de la femme de Barry, fut que l'honneur de son mari lui étoit encore plus » cher que ses jours. La grandeur fut égale de part et d'autre : Barry souffrit la » mort; et sa femme, après avoir défendu la place avec succès, alla ensevelirsa douleur et sa jeunesse dans un Couvent de Beziers (c) où elle mourut.

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» Le fils de ce généreux Barry succéda à son Gouvernement de Leucate en 1637. » Serbelloni (d), après avoir investi cette

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(a) Voyez ce mot, dans les notes, à la fin de ce Volume.

(b) Voyez ce mot, ibid. (c) Voyez ce mot, ibid. (d) Voyez ce mot, ibid

place, tenta de le corrompre, et lui promit » des avantages considérables, s'il em» brassoit le service des Espagnols: l'his→toire de son père fut la seule réponse que le Général Espagnol en reçut.

Voilà, mon cher frère, deux Barry » qui n'ont point eu d'Ecole Militaire pour » berceau, et qui ont été pourtant bien

grands l'un et l'autre. Souvenez-vous » d'eux, je vous conjure, toute votre vie : » souvenez-vous en le jour d'une bataille, » et dans toutes les occasions ou il s'agira » de faire bien, et si ce n'est pas assez, » de faire mieux que les autres (car il faut »porter jusques-là son ambition), dites» vous sans cesse : je suis devant les yeux » de mes ancêtres; ils me voient; et ne soyez pas après cela digne d'eux si vous n le pouvez : ma main tremble en vous »écrivant ceci; mais c'est moins de crainte » que de courage.

Entrez donc, mon cher frère, de l'E»cole dans la carrière militaire. Portez » les armes que vos peres ont portées, et » que ce soit avec honneur comme eux. » Que je vous trouve heureux d'avoir tant » d'obligations à devenir un sujet dis» tingué, et de devoir au Roi votre vie » et vos services, au double titre de votre

maître et de votre père ! Vous porterez n toute votre vie sur votre personne lés » signes glorieux de sa bonté (la Croix de l'Ordre de Saint-Lazare); mais je suis » sûre qu'on les reconnoîtra encore mieux à vos actions. Je suis certaine encore

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Ecrivains épistolaires.

» que vous ne perdrez jamais le souvenir "de ce que vous devez à ceux qui vous " ont dirigé dans l'Ecole que vous quittez,

et principalement à ce Citoyen. vertueux "(a) que ses grandes qualités ont, pour " ainsi dire, associé à l'œuvre immortelle

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de ce règne. Je vous aimerai alors de » tendresse et de fierté; et tandis que con» finée dans un château, je partagerai ma » vie entre les soins de mon sexe et des amusemens littéraires, je vous perdrai » de vue dans le chemin de la gloire. » Vous cueillerez des lauriers, et votre " sœur disputera aux jeux floraux leurs " couronnes. Elle s'élèvera peu-à-peu à >> un style plus noble; et si vous devenez » jamais un grand guerrier, vous lui ap

prendrez à vous chanter, et vous aurez » de sa part un poëme. Je meurs d'envie » d'avoir quelque jour ce talent; et vous » sentez par-là ce que mon ambition vous » demande. Adieu, mon cher frère, par» donnez à ma jeunesse ces réflexions; » mais sachez-en gré à mon amitié. J'ai » voulu vous écrire dans l'époque la plus » importante de votre vie; et mon cœur >> a volé pour cela jusqu'à vous : c'est » lui qui m'a dicté tout ce que cette lettre contient; il vous aime trop pour avoir » pu se tromper. Je suis etc...

La lecture des bons Epistolaires est infiniment utile, et peut aider beaucoup à

(a) Voyez le mot Verney, dans les notes, la fin de ce Volume.

se faire un style agréable. Mais nous en avons peu de cette espèce. On ne parle plus des lettres de Balsac et de Voiture, que pour les citer, les premières comme des modéles de style ampoulé, et les autres comme des modéles d'affectation. Celles de Boursault sont faites sans goût et dépourvues de naturel. Il y a en général trop d'esprit dans les lettres de Bussi-Rabutin; trop d'apprêt dans le style de celles de Madame Lambert; et le travail se fait trop sentir dans celles de Fléchier. Il faut donc se borner aux lettres de Madame de Sévigné, et à celles de Madame de Maintenon. Mais qui parviendra jamais à imiter la vivacité, la délicatesse, ''enjouement, l'aimable négligence, les grâces si naturelles et si piquantes du style enchanteur de la première ? Madame de Maintenon pourroit plutôt servir de modéle pour la noble simplicité, l'élégance et la précision du style.

Voici le cérémonial observé dans les lettres. Ce détail ne paroîtra pas minutieux, puisqu'il est nécessaire d'ailleurs il ne sera pas long.

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On place indifféremment la date au haut ou au bas d'une lettre. Il y a des per sonnes qui prétendent que la seconde manière est plus conforme aux régles de la politesse; et je dois dire qu'aujourd'hui elle est assez généralement suivie, quoiqu'elle soit peut-être moins commode que la première. Mais dans les lettres d'affaires

Cérémonial les lettres

observé dans

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