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Quand HENRI de fes longs malheurs

Vit la France enfin délivrée,

Mon Apollon fous fa livrée

Produifit fes premieres fleurs:
Ton pere, qui toujours augufte,
Eut dans la paix le nom de Jufte,
Et dans la guerre de Vainqueur,
A vû dans l'été de mon âge
Eclater toute la vigueur

De ma force & de mon courage.

Je l'ai fuivi dans les combats;
J'ai vu foudroyer les rebelles;
J'ai vu tomber leurs citadelles
Sous la pefanteur de fon bras:
J'ai vû forcer les avenues
Des Alpes qui percent les nuës,
Et leurs fommets impérieux
C'humilier devant la foudre,
De qui l'éclat victorieux

Avoit mis la Rochelle en poudre.

Mais dans ces fiécles malheureux, Où la Difcorde déchaînée,

Vit fon audace réfrénée

Par ces deux Princes généreux;

Sous quelque fuperbe trophée

Que fa rage fût étouffée,

RACAN.

RÁCAN.

I

En vit-on jamais de pareils
A ceux de ton fage Miniftre,
Qui triompha par fes confeils
De notre fortune finiftre ?

Arras que l'on croyoit perdu,
Et par l'attaque vigoureuse
De mainte phalange nombreuse
Glorieufement défendu.

La Sambre fous tes lois captive,
Voit planter par de-là fa rive
Nos frontieres & nos lauriers ;
Et voit fous les forêts de piques
De nos formidables Guerriers
Gémir les campagnes Belgiques.

Ce Mont affreux de toutes parts,
Ce Mont où l'Art & la Nature
Avoient dans une roche dure
Creufé d'invincibles remparts;
Ce Mont qui bravoit les orages
Depuis la naiffance des âges
Ce Mont d'abîmes revêtu
Cet orgueilleux fils de la Terre
N'avoit jamais été battu
D'un fi redoutable tonnerre.

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Le Cardinal Mazarin.

Sur le retour du Printems.

DE'A les fleurs qui bourgeonnent,
Rajeuniffent les vergers;
Tous les échos ne raisonnent
Que de chanfons de Bergers;
Les jeux, les ris & la danse,
Sont partout en abondance;
Les délices ont leur tour,
La trifteffe le retire,
Ét perfonne ne foupire,
S'il ne foupire d'amour.

Les moiffons dorent les plaines,
Le ciel est tout de saphirs,
Le murmure des fontaines
S'accorde au bruit des zéphirs :
Les foudres & les tempêtes
Ne grondent plus fur nos têtes;
Ni des vents féditieux

Les infolentes coleres,
Ne pouffent plus les galeres
Des abîmes dans les cieux.

RAČAN

RACAN.

ENDROITS CHOISIS

DES BERGERIES DE M. DE RACAN.

L'infidélité prétendue d'Alcidor, Amant d'Artenice,
determine cette Bergere à fe confacrer
à la retraite.

ARTENICE.

QUE cette vie eft douce, & que je fuis contente
De me voir en ce lieu conforme à mon attente!
Que j'y trouve d'appas qui charment ma douleur!
Que le fort m'a renduë heureuse en mon malheur !
Doux poifon des efprits, amoureuse pensée,
Qui me représentez ma fortune paffée,
Eloignez-vous de moi, fortez de ces faints lieux; !
Les cœurs n'y font épris que de l'amour des cieux.
La gloire des mortels n'eft qu'ombre & que fumée:
C'est une flâme éteinte auffi-tôt qu'allumée.
Deffillez-vous les yeux, vous dont la vanité
Préfere cette vie à l'immortalité.

Maintenant que je goûte une paix fi profonde,
Que j'ai pitié, ma Seeur, de ceux qui font au monde,
Et qui fur cette arêne, émûe à tout propos,
Fondent fans jugement l'efpoir de leur repos!
PHILOTE'E.

Ma Sœur, ne plaignez point ceux que le fort convie
A paffer loin de nous la courfe de leur vie.
Parmi les vanitez qui ne font point ici,
Où le combat eft grand, la gloire l'eft auffi.

Nous vivons fur la terre en éternelle peine;
Et de plufieurs chemins par où le Ciel nous mene
Au repos glorieux qui nous eft préparé,

Celui

que nous tenons eft le plus affeuré..

Les Dieux diverfement nous retirent du monde:
L'efprit ne peut fonder leur fageffe profonde:
C'eft d'eux que le Soleil emprunte fa fplendeur;
Il faut, dans le filence, adorer leur grandeur.
Oubliez donc le feu de ce Berger parjure,
Qui fait à votre amour une fi grande injure;
Et donnez à ces Dieux vos pensers, vos appas :
Ces Amans tout parfaits ne vous tromperont pas,

C'est un Enchanteur qui parle.

1

1 Au creux de ces rochers d'où l'éternelle nuit
A chaffé pour jamais la lumiere & le bruit,
J'ai choisi mon féjour loin de la multitude,
Pour jour en repos du plaifir de l'étude.
Par elle tous les jours, comme maître abfolu,
Je fais faire aux Démons ce que j'ai résolu;
Ermon pouvoir connu dans tous les coins du monde,
Met fens deffus deffous le Ciel, la Terre & l'Onde.
Des jours je fais des nuits, des nuits je fais des jours;
J'arrête le Soleil au milieu de fon cours,

1 Le ftile de certe Scene n'eft rien moins que paftoral; mais pour justifier l'Auteur, il fuffit d'envifager le perfounage qu'il fait parler: perfonnage dont le caractere ne reffemblé pas mal à celui d'an Capitan,

RACAN

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