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Chez

NOEL PISSOT, à la defcente du Pont.
Neuf, à la Croix d'Or,

ET

FRANÇOIS FLAHAULT,
côté du Pont. S. Michel, au Roy de

Portugal.

M. DCC. XXV.

AVEC PRIVILEGE DU ROT.

du

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L'INDISCRET,

COMEDIE.

SCENE PREMIERE.

3.

EUPHEMIE, DAMIS.

EUPHEMIE.

'Attendez pas mon Fils, qu'avec un ton fevere Je déploïe à vos yeux l'autorité de Mere.

Toûjours prête à me rendre à vos juftes raisons, Je vous donne un confeil, & non pas des leçons. C'est mon cœur qui vous parle ; & mon experience que ce cœur pour vous se trouble par avance.

Fait

A

Depuis deux mois au plus vous êtes à la Cour.
Vous ne connoiffez pas ce dangereux féjour.
Sur un nouveau venu le Courtisan perfide
Avec malignité jette un regard avide;
Penetre fes défauts, & dès le premier jour,
Sans pitié le condamne, & même fans retour.
Craignez de ces Meffieurs la malice profonde.
Le premier pas, mon Fils, que l'on fait dans le monde,
Eft celui dont dépend le refte de nos jours.
Ridicule une fois, on vous le croit toûjours.
L'impreffion demeure. En vain croiffant en âge,
On change de conduite, on prend un air plus fage.
On fouffre encor long-temps de ce vieux préjugé.
On eft fufpect encor, lorfqu'on eft corrigé;
Et j'ai vû quelquefois païer dans la vieilleffe
Le tribut des défauts, qu'on cût dans la jeuneffe.
Connoissez donc le monde, & fongez qu'aujourd'hui
Il faut que vous viviez pour vous, moins que pour lui.

DAMIS.

Je ne fçais où peut tendre un fi long préambule.

EUPHEMIE.

Je vois qu'il vous paroît injufte & ridicule.

Vous méprisez des foins pour vous bien importans,
Vous m'en croirez un jour : il n'en fera plus temps.
Vous êtes indifcret. Ma trop longue indulgence
Pardonna ce défaut au feu de vôtre enfance :
Dans un âge plus mûr, il cause ma fraïeur ;
Vous avez des talens, de l'efprit, & du cœur ;
Mais croïez qu'en ce lieu tout rempli d'injuftices,
Il n'eft point de vertu, qui rachette les vices,
Qu'on cite nos défauts en toute occasion,
Que le pire de tous eft l'indiscretion,

Et qu'à la Cour, mon Fils, l'Art le plus neceffaire
de bien parler, mais de fçavoir fe taire

N'eft pas

Ce n'eft pas en ce lieu, que la focieté
Permet ces entretiens remplis de liberté;

Le plus fouvent ici l'on parle fans rien dire,
Et les plus ennuïeux fçavent s'y mieux conduire.
Je connois cette Cour. On peut fort la blâmer
Mais lors qu'on y demeure il faut s'y conformer.
Pour les Femmes fur tout, plein d'un égard extrême,
Parlez-en rarement, encor moins de vous-même.
Paroiffez ignorer ce qu'on fait, ce qu'on dit,

Cachez vos fentimens, & même vôtre esprit.

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