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Grecs à leur Religion produifoit à chaque pas une furprife agréable à l'Etranger que je fuppofe. Car, indépendamment des fêtes publiques & facrées, le culte particulier préfentoit des facrifices variés dans leurs détails, toujours mêlés de fpectacles, puifqu'en effet la Mufique vocale & inftrumentale en faifoit toujours partie. Nous n'avons malheureufement qu'une idée très-imparfaite d'une Musique fi profonde, qu'elle redoubloit la force & l'expreffion d'une Langue fonore, établie elle-même fur la Mufique. Leur Poëfie nous en a laiffé une preuve évidente. Le Voyageur, frappé par des fons fi juftes, qu'ils fuffifoient, en un fens, pour faire entendre les paroles, étoit en même tems arrêté par la beauté des temples & des chapelles, & par la régularité de leurs proportions parties toujours fenfibles aux yeux d'un homme d'efprit, quelque peu initié qu'il puiffe être dans les Arts. Je porterai la même idée fur la Peinture & fur la Sculpture; mais toujours en fuppofant fimplement un homme, dont l'efprit eft orné par la culture des Lettres.

Dans le cours des voyages néceffaires pour connoître la Grèce, les chemins feuls pouvoient inftruire le Voyageur de l'hiftoire du pays qu'il parcouroit; car prefque dans toute leur longueur ils étoient ornés de trophées. ou de monumens, fouvent élevés par la Nation, à l'honneur des particuliers, dont la mort ou les actions pouvoient préfenter un exemple à fuivre.

Si j'avois fuppofé cet heureux Etranger, amateur des Arts, & capable de fentir le fublime de ceux de la Grèce, c'eft-à-dire, un homme plus éclairé à leur égard que Paufanias, j'aurois été fort embarraffé; car devant toujours le repréfenter comme un homme de lettres & un homme d'efprit, il auroit eu peine à quitter le Cabinet dans lequel il pouvoit lire les Auteurs qui nous reftent, & ceux que nous avons perdus ; & quand par laffitude il auroit été déterminé à fortir de cette délicieuse retraite, il n'auroit pû fe réfoudre à y rentrer. Retenu par la vûe de

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tout ce que la Peinture, la Sculpture & l'Architecture préfentoient de magnifique & de complet à tous égards, il eût été dans l'impoffibilité du choix. Toute hyperbole il auroit été fort embarrassé. Mais quelle heureuse

à

part, perplexité!

PLANCHE XLIX.

No. I. & II.

Ce petit Bufte de bronze n'eft pas exécuté abfolument de face. Il est traité un peu ce qu'on appelle des trois quarts. L'exécution de ce Monument eft merveilleufe: il a tous les caractères de la Nature & du fçavoir. On ne peut le regarder comme le fragment d'une Figure. On voit avec certitude qu'il a été traité de tous les tems en bas-relief. D'ailleurs, les Figures médiocres & fort réduites, ne paroiffent point avoir été souvent répétées par les Grecs. Ils ont plus ordinairement exécuté, dans les proportions naturelles, les portraits des hommes qu'ils ont regardés comme célèbres. Cette raifon me perfuade que ce petit Bronze nous conferve le portrait d'un Philofophe, qu'on auroit même pû monter dans une espèce d'amulette ou de parure; car fa hauteur n'eft que de dix lignes.

No. III. & IV.

LES mêmes raifons de travail, d'élégance, de jufteffe & de vérité, m'engagent à rapporter cet autre Bufte de bronze, dont la fonte eft de la plus grande légèreté. Je le regarde également comme le portrait d'un Philofophe, mais plus recommandable que le précédent, par la raifon de fon plus grand volume, & de la ronde-boffe qu'on a employée pour l'exécuter. Au refte, on fçait que les Grecs n'ont pas laiffé croître leur barbe dans tous les tems.

Je me fuis attaché à rendre ces deux portraits auffi reffemblans à leurs originaux qu'il eft poffible; mais quelle

Phocide.

affûrance peut-on
on donner au Lecteur après trois opéra-
tions indifpenfables, & fi prodigieufement féparées, le
deffein, la gravûre, & la retouche: fans efpérer de fça-
voir jamais les noms de ces hommes, que l'on peut fup-
pofer célèbres ? Je jouis de la beauté & de la vérité de ces
têtes. Je ne puis donner au Lecteur qu'une idée très-
imparfaite de leur mérite. Je me confole en imaginant
qu'on n'eft point fâché de fçavoir que des Monumens de
ce genre ont réfifté aux injures des tems, & qu'ils sub-
fiftent encore dans le plus grand dégré de conservation.
Hauteur deux pouces deux lignes.

N. V.

LE fujet de cette Pierre gravée eft très-bien difpofé. If repréfente Hercule qui immole avec fa maffue un taureau qu'il facrifie à Apollon : ce Dieu paroît avec fa lyre à côté de fon trépied. Je ne connois point dans la vie d'Hercule d'autre facrifice à Apollon, que celui qui fit naître la dispute pour laquelle le Dieu & le Héros en vinrent aux mains. Paufanias nous dit que la tradition de Delphes apprenoit qu'Hercule, piqué du filence obstiné de Xénoclie, Prêtreffe du Dieu, avoit emporté le trépied, &c.

Tous les Anciens n'étoient pas du même sentiment fur ce point de Mythologie. Apollodore en donne une preuve. İl fe contente de dire que l'Oracle de Delphes ne lui répondant rien fur fa maladie, il pilla le temple, emporta le trépied, & se bâtit un temple à lui-même, &c.

Je croirois donc que, fans entrer dans ces différentes opinions, le Graveur a représenté l'Oracle de Delphes, par Apollon lui-même, & qu'il a traité le premier inftant de l'arrivée d'Hercule dans ce temple. La préfence d'ApolIon rendoit le combat, qui fuivit l'hommage d'Hercule, plus clair & plus facile à concevoir. Le même Graveur pouvoit avoir exécuté le fecond fujet, c'est-à-dire, Hercule emportant le trépied: du moins plufieurs Artistes

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