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Troupes Suiffes

La marche des mesure qu'ils avanceroient dans le païs, ou qu'ils craiau fecours du gniffent d'être défavoüez de leurs fuperieurs en contiPape, prépare nuant ainfi à occafionner une rupture entiere avec- la avec la France. France, ou qu'enfin la vivacité outrée de l'Evêque de

une rupture

Sion leur fût devenuë fufpecte, les Chefs de ces Troupes, après avoir eu une entrevûë avec les Géneraux François, changerent tout à coup, & ramenerent leur monde dans les Cantons dès la mie Septembre.

Il eft aifé de juger combien Jules II. fe fentit offenfé du procedé des Troupes de la Nation, dont le fecours, qu'il étoit à la veille de voir arriver, l'eût mit en état de donner la loi à l'Italie : il en voulut rendre garante toute la République ; & le Bref que l'Evêque de Sion remit de fa part aux Députez, quelque temps après, peu femblable au précedent, ne les menaçoit de rien moins que de fon indignation, s'ils ne travailloient inceffamment à réparer les torts que la legereté de leurs Troupes avoient fait aux interêts de l'Eglife. Le temps avoit fait faire aux Cantons des réflexions plus férieufes fur l'engagement où ils étoient entrés avec le Pape; on ne crut pas devoir répondre à cet écrit, & on fe referva le foin de lui envoyer dès le commencement de l'année d'enfuite une Ambaffade à Bologne, pour justifier la conduite de l'Etat, & ménager des difpofitions plus conformes à la fituation des affaires. Les Ambaffadeurs ne trouverent point que le reffentiment de Jules II. fût ralenti, depuis qu'il eut envoyé fon Bref. L'Audience qu'il leur accorda, se paffa en reproches de l'avoir ainsi amusé par un secours imaginaire, & de permettre qu'au mépris de fon Alliance, les Etats Eccléfiaftiques, & l'honneur du faint Siege fuffent devenus la proye des ennemis de l'Eglife. Le récit qui fut fait dans l'Affemblée des Cantons d'une reception auffi peu

favorable,

que

favorable, ne produifit que des regrets fur la facilité l'on avoit eu à traiter; on en rejetta toute la haine fur l'Evêque de Sion; & ce Prélat qui perdit dans un jour la confiance génerale dans toute fa Patrie, dont il avoit fçû trop se prévaloir, fut saisi d'une si grande peur de devenir la victime, que s'étant déguisé & défiguré même le visage, pour n'être point reconnu fur fa route, il traversa le païs des Grifons le plus vite qu'il put, & fe rendit à Rome, ou fon Protecteur, pour récompenfer fes fervices, l'éleva bien-tôt après à la dignité de Cardinal fous le titre de fainte Potentienne.

Cependant les entreprises du Pape Jules s'étant fortifiées, en fe reconciliant avec la République de Venife dans le cours de l'année 15 II. une grande partie des Etats d'Italie étoient à la veille de fuccomber, fi l'Empereur Maximilian & Louis XII. qu'une cause, qui leur devenoit commune, avoit réunis pour quelque tems, ne se fufsent joints pour en arrêter le progrès. Sans rappeller les excès où l'on le porta de part & d'autre dans cette occafion, & qui fervirent peu à édifier l'Eglife, on fe renfermera dans les faits, qui regardent uniquement le fujet que l'on fe propofe de traiter ici.

Il paroiffoit que les Cantons, après la fausse démarche qu'ils avoient faite par leur dernier Traité, qui eut fi peu de fuites, s'étoient déterminez à devenir fpectateurs des troubles de l'Italie, & à n'y prendre d'autre part que celle qu'y pourroient avoir leurs Troupes auxiliaires qui étoient au fervice du Roi, en vertu de leur précedente Alliance. Ils continuoient à foûtenir fon projet, par le refus qu'ils firent d'un côté, de renouveller l'union hereditaire avec la Maifon d'Autriche; & de l'autre, de retourner au fecours du Pape, lorfque la certitude d'un accident arrivé

H

dans la derniere marche de leurs Troupes en Italie, & dont ils ne pûrent être éclaircis que long-tems après, fit naître de nouveaux mouvemens. Un Parti de l'Armée du Les Généraux Roi avoit enlevé fur la route de Lugano les Courriers lie donnent oc- des Cantons de Bern, de Schwitz & de Fribourg, cqłui cafion à la rup- de Bern,après avoir été traité indignement,avoit trouvé le tons avec le Roi moïen d'échapper des fers, & les deux autres furent exe

François en Ita

ture des Can

Louis XII.

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cutez avec infamie. Les trois Cantons offensez regarderent cette action comme un attentat fait contre le droit des gens; ils prétendirent en avoir raison, & dans la fituation des affaires, on fe fût contenté d'un desaveu, qui eût calmé les efprits; mais au lieu de quelque satisfaction,n'aïant reçu de la part du General des Troupes de Louis XII. que des réponses pleines de hauteur & de mépris, rien ne put les contenir dans le parti que la République fembloit avoir pris de fe tenir dorênavant en repos. Les deux Cantons de Schwitz & de Fribourg, qui fe regardoient comme les plus outragez dans cette affaire, furent les premiers à fe mettre en campagne malgré la rigueur de la faifon, leurs Troupes fous la conduite de Jean Heyd de Fribourg, eurent bien-tôt atteint la contrée de Bellentz, & de-là s'étant avancées en ordre de bataille, elles arriverent à la riviere de Treiff, dont le Pont venoit d'être rompu par les François, qui s'étoient postez à l'autre bord, & fe préparoient à leur difputer le terrain; il fallut fe déterminer à paffer l'eau à la nage, & les principaux Officiers ayant donné l'exemple, le paffage fut forcé, ceux qui devoient le défendre mis en fuite, & l'on conftruifit fur le champ un Pont pour fervir aux autres, qui alloient fuivre fans faute, dès qu'ils apprendroient premier fuccès.

En effet ceux de Bern, qui fe tenoient prêts à mar

cher, n'en furent pas fi-tôt avertis, qu'ils fortirent fous leurs Drapeaux jufqu'au nombre de quatre mille hommes dès le 27. Novembre; ils avoient pour principaux Chefs Gafpar Wyller, Jean de Weingarten & Leonard Hupsche, la diligence qu'ils firent pour traverser presque toute la Suiffe, dans le tems le plus fâcheux de l'année, les rendit bien-tôt dans le Camp de Varefa, où les premiers les attendoient: Les fecours fournis par les autres Cantons les joignirent dans peu, & fe trouvant forts de plus de dix mille hommes, ils poufferent jufqu'à la hauteur de Galeran vers les confins du Milanois, où Gaston de Foix qui commandoit en Chef les Troupes de France s'étoit avancé, pour couvrir les Poftes qui alloient être les plus expofez. Ce General, avant que d'engager de plus grandes hoftilitez, voulut tenter des voyes d'accommodement; il offrit aux Troupes Suiffes la paye d'un mois de folde avec quelque autre fatisfaction, fi elles vouloient fe retirer des frontieres du Duché de Milan. Cette propofition fit naître d'abord quelque diverfité d'opinions parmi leurs Chefs, mais les motifs de reffentiment les eurent bien-tôt réunis, & ayant trouvé une iffuë pour pénetrer plus avant dans le Païs, ils fe joignirent l'année d'après aux Troupes de la Ligue, qui avoit entrepris de rétablir dans le Milanois la Maifon de Sforce dans la perfonne de Maximilian fils, & plus proche fucceffeur de Louis, qui étoit prifonnier en France. La jonction des Suiffes avec les Princes confederez fut fuivie dans le cours de l'année 1512. de tous les malheurs, que la France ne put éviter dans la Lombardie l'avantage qu'elle eut dans la Bataille de Ravenne, que Jacques de la Paliffe gagna après que Gafton de Foix lut tué, ne fervit qu'à augmenter les ombrages dans cette

partie de l'Italie, & à détacher de fes intérêts ceux qui avoient parû lui être les plus dévouez: Robert Urfin, Pompée Colonne, André Savelli & Pierre Margano, dont le crédit avoit jufqu'alors foûtenu la poffeffion de Louis XII. fe déclarerent ouvertement contre lui; le renouvellement de l'union hereditaire que les Cantons conclurent dans le même tems avec l'Empereur Maximilian, donna d'un autre côté un fi grand appui à la Ligue, que la plupart des Villes du Milanois, oubliant la fidelité qu'ils avoient jurée à leur nouveau Maître, ouvrirent les portes à fes Ennemis.

Le plus fort de la guerre s'étoit jetté du côté de la Ville de Novarre, dont le Duc Maximilian venoit de s'emparer avec un nouveau fecours de huit mille hommes, qui étoit arrivé depuis peu de la Suiffe fous les ordres de Sebastien & Louis de Diesbach, de Benoît de Weingarten, de Jean Frisching & de plufieurs autres. La confervation de cette Ville parut importante à la France, parce que fans elle il n'étoit plus poffible de fe maintenir dans le Païs d'Aft & d'Alexandrie, qui faifoient le reste de fes Conquêtes en Italie; elle s'avança avec toute la diligence pour livrer Bataille, avant que cette Armée détachée entre la France pût être renforcée. Le fiege de Novarre commandé par & les Cantons. Jacques de Trivulce en perfonne, où les Suiffes foûtin

Guerre ouverte

rent plufieurs affauts, en repouffant toûjours les Affail-
lans, donna le tems à leurs autres Troupes de venir à leur
fecours, & d'engager une affaire générale. Ils fortirent
par les bréches que le Canon avoit faites à la Ville, les
Affiegeans s'étant retirez de leur côté, pour se ranger en
fe
Bataille; ce fut le 6. Juin 1513. que fe paffa cette Action,
qui décida du fort du Milanois, à la perte de la France,
& qui eût été aisé d'empêcher, fi fes Généraux, sans se

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