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Traité de Galeran entre le

fiance de plufieurs d'entr'eux, & il fut réfolu de fixer un jour auquel on s'aboucheroit de part & d'autre.

Ce fut le 8. de Septembre qu'Odet de Lautrec & René Bâtard de Savoye, joignirent dans la Ville de Galeran les Deputez des Troupes Suiffes, pour traiter d'un accommodement:comme les griefs des deux parties avoient été mis en avant plus d'une fois, & que le Roi fe trouvoit difpofé de donner toutes les fatisfactions en faveur de la conquête du Milanez, qui faifoit fon unique objet, il fut aisé de dreffer les inftructions fur lesquelles on convint des Articles fuivans,

Que l'on donneroit à Maximilian Sforce le Duché de Ne Roi & les Trou- mours en dédommagement des Etats de Milan; que le Roi y pes des Cantons ajouteroit une penfion annuelle de douze mille livres, l'entretien

en 1515.

d'une Compagnie de cinquante hommes pour fa garde, & lui
feroit épouser une Princeffe de fa Maifon. Que préalablement à
l'execution de cet Article, les Cantons feroient tenus derapporter
les originaux des Lettres d'Alliance, qu'ils avoient faites
ci-devant au fujet du Duché de Milan. Que le Roipour dédom-
mager les Cantons des frais de cette guerre, payeroit la fomme
de trois cens mille écus, dont moitié feroit délivrée dès-à-prefent,
&le reste à la fin de l'année. Qu'en échange des Châteaux de
Lugano, de Locarno, de Thum, d'Efchenthal, & de ce que les
Grifons poffedoient dans le Milanez, il feroit pareillement ac-
quitté la fomme de trois cens mille écus au premier jour de Juin
de l'année fuivante. Que les quatre cens mille promis par le
Traité de Dijon, feroient payez dans l'espace de quatre années,
à commencer aux Fêtes de Noël prochain. Qu'outre la figna-
ture du Roi, qui devoit garantir l'acquittement de ces fommes,
il leur donneroit encore pour caution le Duc de Lorraine,
la poffeffion des Villes & Seigneuries ci-dessus marquées, avec
tout le Domaine utile, à l'exception toutefois de la ville & ter-

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ritoire de Bellinzone. Que l'on oublieroit tout ce qui avoit été fait par Galeas Viscomti, & les autres Seigneurs du Milanez, qui avoient pris le parti de la Ligue dans le cours de cette guerre. Qu'au cas qu'il fe trouvát des prifonniers de part & d'autre, ils feroient rendus fans frais ni rançon. Que lorfque le Roiferoit attaqué dans fon Royaume,dans le Duché de Milan, Comté d'Aft & Seigneurie de Gênes, les Cantons lui accorderoient des levées, pourvu qu'ils ne fuffent pas eux-mêmes occupez alors à défendre leur propre Païs,& que le Roi réciproquement envoyeroit aux Cantons une bonne artillerie, lorsqu'ils feroient en guerre avec d'autres Puissances, lui-même n'étant pas occupé à défendre fes Etats. Que tout le tems de cette Alliance, qui dureroit pendant la vie du Roi,& dix ans après fa mort, chaque Canton recevroit une penfion annuelle de deux mille livres, & qu'au furplus les articles ftipulez par Loüis XII.au fujet du MiLanez, feroient maintenus dans leur force. Que les deux Parties se réservoient respectivement dans ce Traité le Siege de Rome,l'Empire,la Maifon d'Autriche, le Duc & la Maifon de Savoye, le Duc de Wirtemberg, le Marquis de Montferrat, la. Maifon de Medicis, & tous leurs anciens Alliez, à l'exception du Roi d'Espagne feul, que l'on ne prétendoit point y comprendre. On avoit lieu de fe flatter qu'un accord fait à la vûë de deux Partis prêts à fe combattre, & qui fentoient un interêt égal à fe reconcilier, ne trouveroit plus d'obftacle dans fon execution. Chaque Deputé, de retour à l'Armée, le communiqua aux Chefs des Troupes de fon Canton, &. au premier abord tous parurent difpofez à accepter une Pacification, fur laquelle ils fe perfuaderent que leurs Superieurs ne pourroient jamais leur faire des reproches. Les Troupes de Bern, au nombre de plus de fept mille hommes, voulurent donner l'exemple aux autres, & fe féparerent de l'Armée dès le lendemain de la signature du

Sion engage une

Traité; celles de Fribourg, de Soleur, de Biel & les Va lefiens les fuivirent de près, malgré tout ce que ceux d'U

ry, de Schwitz & de Glaris s'efforcerent en vain de leur Le Cardinal de faire envisager au fujet de l'honneur & de l'interêt de la partie des Trou- Nation, qu'ils prétendoient y être compromis. La démarpes Suiffes à ref- che des premiers ébranla beaucoup ceux de Zurich & de gré le Traité. Zug, & ils alloient entraîner le refte de l'Armée, fans les mouvemens extraordinaires que fe donna le Cardinal de Sion pour les retenir dans le Camp.

ter armées mal

Ce Prélat rappella dans cette occafion toute la vivacité & tous les refforts de l'intrigue, qu'il avoit mis fi fouvent en ufage, pour exhorter à la fermeté ces Troupes par des motifs, dont elles ne furent que trop susceptibles pour leur malheur. Les lettres preffantes qu'il envoya d'un autre côté en diligence aux principaux Officiers qui étoient déja en pleine marche avec les Troupes de Bern, pour regagner les frontieres du Milanez, y trouverent affez d'accès pour faire revenir fur leurs pas Gabriël de Diesbach & Jean Schindler, deux Chefs dont la valeur & l'experience au fait de la guerre, pouvoit être d'un grand fecours à une armée affoiblie de plus d'un tiers depuis la féparation qui venoit de fe faire.

François I. ne put ignorer la divifion de l'Armée des Suiffes, qui lui prefentoit tout l'avantage; il fe hâta d'en profiter avant qu'il furvînt quelqu'autre événement, & ayant marché à grandes journées au travers de l'Alexandrin, il arriva à la hauteur de Marignan, qui fervit bientôt de champ de bataille. L'ardeur d'engager un combat fut égale du côté des Suiffes, à la temerité qu'ils eurent d'en courir les risques contre une Armée aussi superieure, ne pouvant compter dans la leur qu'environ treize à quatorze mille combattans. La crainte où fe trouva le Cardinal

de Sion, que des Troupes fi inférieures en nombre, ne se laiffaffent entraîner à quelque propofition de Paix, au moment qu'il en faudroit venir aux mains, lui fit concerter avec Árnou de Winckelried d'Underwald, Capitaine de la garde du Duc de Milan & d'autres Officiers de fes amis, un ftratagême, dont il ne pourroit point avoir le démenti; ce fut de détacher des Corps d'Ury, de Schwitz & de Glaris, une bande de déterminez pour faire irruption dans camp des François, & d'engager ainfi, à l'infçu des Chefs, une affaire generale, dont ils ne feroient plus en état de fe dédire.

le

La rufe eut l'effet, que le Cardinal impatient de voir la décifion, s'étoit propofé ; les premiers poftes harcelez par cette troupe d'affaillans, ayant donné l'allarme au refte de l'Armée, on en vint bientôt à la mêlée; l'effort que firent les Suiffes pour s'emparer de l'artillerie, rendit long-tems le combat douteux; mais le plus gros de l'armée de France étant venu au fecours, ils fe virent contraints de plier avec une perte considerable, & de ceder le champ de bataille à l'entrée de la nuit, qui ne leur permit plus de continuer le combat.

L'affaire recommença le lendemain, qui fut le 14. de Septembre, avec la même fureur de part & d'autre; ceux qui commandoient l'Artillerie Françoise, ayant observé que l'on avoit pointé trop haut le jour précedent, n'oublie rent pas d'y remedier, & la plus grande perte que les Suiffes fouffrirent cette fois-là fut caufée par les décharges redou→ blées du Canon. La déroute ne manqua pas de fuivre un feu continuel, malgré les violentes attaques, que les Troupes de la République porterent à differentes fois fur le centre de l'Armée Françoife, & dont elles furent toûjours repoussées avec perte. La bataille ayant duré depuis la

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pointe du jour jufqu'à l'heure de midi, les Suiffes accablez, furent enfin forcez de battre la retraite, & fans fe donner le tems de refpirer, on leur vit prendre la route des confins du Milanez. Le Cardinal de Sion, qui avoit paru affez long-tems dans les rangs pour animer le combat par fa prefence, ne put foûtenir les reproches qu'il entendoit, à mesure que la victoire fe déclaroit pour le Parti contraire, la crainte le faifit fi fort, avant que l'affaire fût finie, qu'il crut devoir chercher sa fûreté par une fuite précipitée, & qu'il n'osa de long-tems depuis se montrer dans le

Païs.

Le nombre des morts dans cette fanglante Journée fut à peu près égal de part & d'autre, & il s'en trouva, aurapport de Schwinckhart, au de-là de dix mille fur la place; ceux d'entre les principaux Capitaines, que les Suiffes regreterent le plus, furent Jacques Meiff, Jacques Efcher, Jacques Schwend, Antoine Claufer, Jean & Nicolas Keller de Zurich, Hugo de Halweil & Louis Frisching de Bern, Imhoff & Puntiner d'Ury, Nicolas Wirtz d'Underwald & Jean Bar de Bâle. Le témoignage que les Genèraux François rendirent, après l'action, à la valeur de ces Chefs & de leurs Troupes, fit connoître à quel prix il leur fallut acheter la victoire; Jacques de Trivulce, dont le fils fut fait prifonnier dans le premier combat, avoua en fon particulier, qu'à voir l'impétuofité & la force redoublée de cette Nation, dans les attaques où il commandoit, il avoit crû avoir affaire à une armée de Geans.

La perte ne fut pas moins fenfible du côté de la France par le nombre des Perfonnes de diftinction qui y périrent. Le jeune Duc François de Bourbon, le Duc de Chatellerau, les Comtes de Sancere & d'Imbercourt, avec plufieurs autres, furent tuez dans la premiere journée, & l'on

trouva

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