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VI. De la mortification.

On obferve deux efpèces de mortifications; l'une précédée par l'inflammation, & l'autre qui ne l'eft point. Mais comme les cas de mortification, dont nous parlerons dans cet Ouvrage, font tous de la première efpèce, ce fera à celleci feule, que nous bornerons nos observations.

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Nous regardops l'inflammation comme une action augmentée de la puissance vivifiante, qui appartient naturellement à une partie. Dans les inflammations falutaires cet accroiffement d'action eft probablement accompagné d'une auginentation de cette puiffance, qu'on ne retrouve point dans les inflammations, qui fe terminent par la mortification. Dans celles-ci au contraire, on observe une diminution de cette puiffance, qui combinée avec un accroiffement d'action, devient caufe de mortification, en détruifant l'équilibre, qui doit fubfifter entre la puiffance dont nous parlons, & l'action propre de chaque partie.

Si ces données fur la mortification font bien fondées, il fera facile d'établir fur elles une pratique raisonnée ; mais qu'il nous foit permis auparavant, de jetter un coup d'oeil fur le traitement, qui a été recommandé jusques ici en pareil cas, pour faire voir combien peu il s'accorde avec notre théorie. Il est évident, que jufqu'ici dans la pratique ordinaire, on n'a eu égard qu'à la foibleffe, fans faire aucun cas de l'action augmentée; aufli n'a-t-on tenté d'autres remèdes, que ceux qui tendent à relever l'action affaiffée, dans la vue d'écarter la foibleffe. On a donné le kinkina, la confection cardiaque, la ferpentaire, &c., a des dofes auffi fortes, que les circonftances paroiffoient l'exiger, ou que la conftitution pouvoit les fupporter ; & par ce moyen on a produit une apparence de force artificielle, ou momentanée, tandis que ce n'étoit qu'un accroiffement d'action. Le vin, & les cordiaux, ont été adminiftrés d'après de bons principes ; mais il eft des raifons trèsplaufibles, pour ne pas en recommander l'ufage, fondées fur

l'effet général, que produifent tous les cordiaux, qui eft d'aug menter l'action fans donner une force réelle. Auffi les puiffances actives du corps retombent-elles enfuite dans l'affaiffement à proportion qu'elles ont été relevées, & ainfi l'on perd beaucoup fans rien gagner; car il n'eft plus possible dans tous les cas, de rétablir les puiffances du corps, dès qu'une fois on les a laiffé s'affoiblir au-delà d'un certain point.

Le traitement local a été aussi absurde, que l'univerfel. On a fcarifié les parties jufqu'au vif, afin de pouvoir y appliquer des ftimulans, & des antifeptiques, tels que la térébenthine, les baumes les plus chauds, & quelquefois des huiles effentielles: on a auffi fair usage des fomentations chaudes, dans la vue de rappeller la vie ; mais la chaleur augmente toujours l'action, & les ftimulans ne conviennent pas toutes les fois que les actions font déjà trop violentes.

D'après les principes, que nous venons de poser, le kinkina eft le feul médicament, fur lequel on puiffe compter, parce qu'il augmente les puiffances, & qu'en même tems il diminue l'action. Dans plufieurs cas l'opium, quoi qu'il ne donne pas une force réelle, aura une efficacité particulière, par la diminution qu'il opère dans l'action, & réellement nous en avons obfervé les bons effets, foit quand il étoit donné intérieurement à fortes dofes, foit quand on l'appliquoit extérieurement. Il eft bon de tenir les parties fraîches, & de ne leur appliquer que des topiques froids. C'eft une pratique, dont on ne doit pas s'écarter dans les mortifications, qui accompagnent la

maladie vénérienne.

TRAITÉ

DES

MALADIES VÉNÉRIENNES.

PREMIÈRE PARTIE.

CHAPITRE PREMIER.

Du virus vénérien.

LA maladie vénérienne provient d'un délétère, qui étant le

produit d'une maladie, & capable par lui-même d'en produire une femblable, doit être appellé, virus morbifique, pour le diftinguer des autres poifons, que les règnes animal, végétal, & minéral, fourniffent.

Il y a plufieurs efpèces de virus morbifiques, qui ont tous leurs manières particulières d'infecter le corps. Nous appellons virus morbifiques fimples, ceux, qui infectent le corps, en bornant leurs effets à une feule partie, ou en les tranfmettant à toute la machine, fans cependant pouvoir agir des deux manières, & compofés, ceux qui ont en même.tems un effet local & univerfel. Le virus vénérien, une fois communiqué au corps humain, a la propriété de se propager, & de fe multiplier lui-même; & comme il peut auffi agir dans un lieu

déterminé, & univerfellement par tout le corps, il est un virus morbifique compofé. Comme tous les virus de même nature il peut être communiqué à d'autres par toutes les manières différentes dont on peut le recevoir, & toujours il produit la même maladie, qui alors se manifefte fous l'une ou l'autre de les formes.

I. De la première origine du virus vénérien.

Quoique ce foit dans l'Hiftoite moderne, où il foit fait mention de la première apparition de ce virus, cependant le tems précis de fon origine, & la manière dont il s'eft manifefté, ont jufqu'à préfent éludé toutes les recherches; & l'on doute même encore, fi c'eft en Europe, qu'il exifta d'abord, ou s'il y fut apporté de l'Amérique. Nous n'entreprendrons pas de difcuter cette queftion; on peut voir dans l'ouvrage d'Aftruc les faits, les autorités, & les argumens, qui ont été foutenus en faveur de la dernière opinion; quant à la première on peut confulter un petit Traité anonyme, publié en 1751 (1). L'Auteur paroît y avoir bien approfondi la matière, & autant qu'on peut fe fonder en raifonnement fur un fujet de cette efpèce, il prouve, que la maladie n'a point été apportée des Indes Occidentales. Non content de cette opinion, il prétend prouver qu'elle a pris fa première origine en Europe; mais il n'eft pas également heureux fur ce point. Le fujet eft trop épineux, & le défaut d'un nombre fuffifant des faits, laiffe trop de champ aux conjectures.

Nous ne chercherons donc pas à approfondir davantage cette queftion; peu nous importe en effet de favoir à quelle époque, & dans quel pays cette maladie a pris naissance; cependant nous pouvons en général affirmer, que comme les animaux ne font pas naturellement formés dans un état de maladie, ni difpofés à éprouver spontanément les affections de ce genre; quoiqu'ils foient fufceptibles des impreffions capables de les produire, les maladies n'en doivent pas moins être regardées comme provenant des impreffions faites fur le corps: & comme l'homme eft probablement fufceptible d'un plus grand nombre d'impreffions qu'aucun autre animal, qui

(1) Intitulé » Differtation fur l'origine de la Maladie Vénérienne dans laquelle on prouve qu'elle n'a point été apportée d'Amérique, mais qu'elle a commencé en Europe par une maladie épidémique, traduite d'un manuscrit original d'un Médecin distingué, A Londres, chez Robert Griffiths, 1751 ",

deviennent cause immédiate des maladies, & qu'il eft d'ailleurs le feul animal, qui fe fait des impreffions artificielles fur luimême, il eft auffi fujet à une plus grande variété de maladies. C'eft vraisemblablement dans un de ces états formés par luimême, qu'il a reçu l'impreffion première, qui fut la cause originelle de la maladie vénérienne.

II. Le virus a commencé à fe manifefter dans l'espèce humaine, & dans les parties de la génération.

De quelque manière que ce virus ait pris'naiffance, il eft certain qu'il a commencé à paroître dans l'espèce humaine, puisque nous ne connoiflons aucun autre animal qui foit capable d'en être infecté. Il eft auffi probable que les parties de la génération en ont été les premières affectées; car s'il avoit eu lieu dans toute autre partie du corps, il ne fe feroit probablement jamais propagé au-delà de la perfonne, fur laquelle il fe feroit manifefté pour la première fois, & conféquemment il n'auroit jamais été connu; mais ayant fon fiége dans les parties de la génération, feul moyen de connection naturelle entre un être & un autre, excepté entre la mère & l'enfant, il s'eft trouvé dans l'endroit le plus favorable à fa propagation. Or, comme nous verrons ci-après, dans l'hiftoire de la maladie même, qu'aucun effet propre de ce virus lorfqu'il eft paflé dans les humeurs, ne peut être communiqué un autre individu, nous fommes néceffités à conclure, que fon premier effet a été local.

III. De la nature du virus vénérien.

Si nous ne connoiffons pas la nature du virus en lui-même, au moins n'ignorons nous pas les effets, qu'il pro- · duit fur le corps humain. Il eft communément fous forme de pus, ou uni avec le pus, ou avec quelque fécrétion de ce genre; & quand il eft communiqué à d'autres, il produit une matière de même nature, ce qui prouve qu'il eft une fuite générale, mais non pas néceffaire de l'inflammation. C'eft pourquoi il produit, & il excite prefque toujours une inflammation dans les parties infectées. Outre l'inflammation qui.furvient alors, ces parties ont encore un mode particulier d'action différent de qui accompagnent l'inflammation; & c'est ce mode fpécifique d'action, qui produit la qualité fpécifique dans la matière. La présence de l'inflammation n'est pas nécesfaire pour entretenir ce mode particulier d'action, parce que le virus continue à fe former long-tems après que les fignes

tous ceux "

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