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rhée & le chancre font les effets du même virus; il eft inté reflant de connoître à quelles circonftancès on doit rapporter deux manières d'être fi diffemblables de la maladie.

Pour rendre raifon de ces deux différents effets du inême virus, il fuffit d'obferver la différence dans l'action des parties. affectées, lorfqu'elles font irritées, quel que foit le dégré d'irritation. La gonorrhée provient toujours d'une furface fécré-* toire (1), & le chancre fe forme fur une furface non-fécrétoire ; & dans ce dernier la partie fur laquelle le virus agit, doit devenir une furface fécrétoire, avant que la matière puiffe fe former. Toutes les furfaces fécrétoires du corps étant probablement femblables, un feul mode d'application fuffit pour produire la gonorrhée dans toutes, ce qui fe fait par le fimple contact du virus. Mais pour produire le chancre, le pus vénérien peut être appliqué de trois manières différentes; la première & la plus certaine, eft une plaie dans laquelle il peut être introduit ; la feconde, en appliquant le pus à une furface couverte de fon épiderme, qui le laiffe parvenir à la peau d'autant plus aifément qu'il eft plus mince; la troifième manière a lieu toutes les fois que la matière eft appliquée à un ulcère ordinaire déja formé.

Le virus étant alors le même dans les deux cas, pourquoi ces deux effets ne se rencontrent-ils pas toujours enfemble chez la même perfonne? car on devroit naturellement fuppofer, que la gonorrhée une fois déclarée ne peut pas manquer de devenir la caufe d'un chancre, & qu'à fon tour celui-ci, s'il paroit le premier, peut produire une gonorrhée. Quoique.'cela ne foit pas toujours ainfi, on l'obferve cependant quelques fois : au-moins nous avons de grandes raifons de le croire. Nous avons vu des cas, dans lefquels une gonorrhée s'eft manifestée, & peu de jours après chez quelques uns, il s'est ouvert un chancre; le chancre n'a paru dans d'autres qu'après quelques femaines. Nous en avons vu d'autres, où le

(1) Nous entendons par furface fécrétoire, toute partie qui donne paffage aux matières étrangères. Nous comprenons auffi fous cette dénomination les conduits excrétoires des glandes. Ainfi la bouche, le nez 2 les yeux, l'anus, & l'urèthre, font des furfaces fécrétoires. Nous ap pellons furfaces non fécrétoires, l'extérieur de la peau en général. Nous pourrions ajouter ici une troifième efpèce de furface, qui tient le milieu entre les deux premières, telle que le gland, le prolabium de la bouche, l'intérieur des lèvres, la vulve. Ces furfaces participant des propriétés de chacune, mais dans un moindre dégré, font fufceptibles d'être affectées de deux manières, tantôt d'être excitées à la fécrétion, tantôt à l'ulcération,

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chancre s'eft manifefté le premier, & dans le cours du trai tement, il s'eft déclaré un écoulement & une douleur en urinant. Il eft à fuppofer que les deux maladies provenoient, de l'infection originaire, & qu'elles n'ont paru qu'a des tems différents; & comme elles ne fe rencontrent pas plus fouvent enfemble il eft probable, que cela eft ainfi, puifque la matière eft la même dans toutes les deux & capable conféquemment de produire alternativement l'une ou l'autre.

Nous foupçonnons que la préfence d'une irritation dans ces parties devient en général un préfervatif de l'autre. Nous, avons déja obfervé que les deux parties fympathifent dans leur maladie; & il eft poffible que cette même fympathie empêche l'apparition de la maladie réelle; car fi une action, qui n'eft pas vénérienne eft déjà établie, il eft impoffible qu'une autre ait lieu jufqu'à ce que la première ait ceffé, & il eft probable que cette même fympathie ne ceffera pas, tant que la caufe qui l'excite, exifte. C'eft pourquoi lorfque toutes les deux arrivent chez la même perfonne en même temps, nous foupçonnons que l'urèthre n'avoit jamais fympathifé avec le chancre, ou que fi cela avoit été d'abord, la sympathie avoit ceffé, & qu'alors le virus vénérien pouvoit faire entrer par. fon irritation, les parties en action.

VI. De la caufe de la qualité vénéneufe du virus, fi elle provient de la fermentation, ou de l'action des folides.

Comme la confidération de ce point, & les lumières que nous acquerrerons à fon fujer, peuvent en jetter beaucoup fur la maladie, & fur fon traitement, qu'il nous foit permis. d'y infifter un peu. On a fuppofé que la qualité véné. neufe du virus dont il s'agit, naiffoit d'une fermentation qui s'établiffoit auffi-tôt après l'infection. Mais confidérons maintenant fi la qualité vénéneufe provient de cette caute, ou fi le corps a la propriété de produire, felon l'irritation donnée, une matière, par laquelle les facultés vivantes, toutes les fois qu'elles font irritées d'une manière particulière, produifent dans les parties une action capable d'engendrer une matière abfolument femblable à celle qui a excité cette action.

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Nous nous bornerons dans l'examen de ce fujet, à la gonorrhée. Pour foutenir l'une ou l'autre de ces deux opinions, on doit fuppofer que le pus vénérien a, d'après fes qualités fpécifiques, une proprieté irritante fupérieure à celle de toute autre matière purulente commune. Nous avons déja

obfervé, qu'elle a le pouvoir d'exciter l'inflammation, même fur les tégumens communs, & de former un chancre, pou voir, que le pus ordinaire ne pofsède point. D'après la première opinion on doit fuppofer qu'il n'y a point d'inflammation fpécifique, ou de fuppuration, produite par l'application de la matière vénérienne, mais feulement une -inflammation & une fuppuration ordinaire, & que ce qui eft capable de produire ces effets, agit comme ferment fur la matière nouvellement formée, la rendant vénérienne auffitôt, ou presque auffi-tôt, qu'elle eft produite; or, comme il y a une fucceffion dans la fécrétion, il y a également une fucceffion immédiate dans la fermentation.

Voyons maintenant comment cette idée s'accorde avec les divers phénomènes qui accompagnent la maladie. °. On peut demander ce que devient ce ferment dans plufieurs cas, où la fuppuration tarde quelques femaines à le manifefter après que l'irritation & l'infammation ont eu lieu ? en påreil cas, il eft bien difficile de fuppofer que le pus vénérien primitif fe fixe & agiffe comme ferment. 2°. Lorfque l'écoulement eft cefé & qu'il n'y a point de matière formée, ce qui a lieu quelquefois pendant un tems confidérable, & que néanmoins tous les fymptômes reviennent, quelle caufe peut produire cette fermentation une feconde fois? aucune fubftance, qu'une nouvelle application du pus vénérien. Lorfque, par exemple, l'irritation fe porte aux tefticules, & que l'écou lement s'arrête tout-à-fait, comme il arrive fouvent. que devient le virus; & comment s'en forme t-il de nouveau, lorf que l'irritation fe reporte enfuite fur l'urethre? 3°. Si la qua. lité vénéneuse étoit produite par la fermentation qui s'ẻtablit dans la matière déja formée, il ne feroit pas aifé de rendre compte pourquoi les fymptômes ceffent pour toujours; car felon nos propres idées fur les fermens, ils ne devroient jamais ceffer d'agir, fi une nouvelle matière y étoit continuellement ajoutée; rien non plus ne pourroit en arrêter l'activité, fi ce n'eft une fubftance qui, étant appliquée à la partie, peut arrêter le mouvement inteftin, ou l'empêcher de s'établis dans une nouvelle matière. Or, comme l'inflammation vénérienne dans ce fymptôme de la maladie, ne fe foutient pas au-delà d'un certain tems, la production du virus ne peut :donc pas dépendre de la fermentation. 40. Si elle dé pendoit d'une fermentation opérée dans la matière féparée par fécrétion, tous les fymptômes vénériens feroient femblables, & l'un ne feroit ni plus ni moins dangezeux que l'autre, que d'après le plus on le moins grand nom

bre d'endroits où la fermentation fe manifefteroit. Pareillement dans cette fuppofition, tous les cas feroient également faciles à guérir, car la fermentation feroit également forte dans un cas léger, comme dans un grave; or, comme il ne peut y avoir de fermentation dans le pus, qu'après qu'il eft forti des vaiffeaux, la matière de chaque ulcère ou furface fécrétoire, devroit devenir vénérienne, par la feule appli-cation d'un pus de même nature, ce qui n'a nullement lieu.

Lorfqu'on applique du pus vénérien fur un ulcère, au point de l'affecter fenfiblement, ce pus produit une irritation, & une inflammation vénérienne. Cet effet n'a cependant pas toujours lieu, par la raifon que le pus ordinaire d'un ulcère peut entraîner le pus vénérien qu'on lui a appliqué, avant qu'il foit en état d'affecter l'ulcère, au point d'y produire l'inflammation, & la fuppuration vénérienne.

J'ai fouvent réitéré cette expérience, & je n'ai jamais pu produire l'inflammation vénérienne qu'une feule fois. Mais fi le pus vénérien étoit capable d'agir comme ferment, alors il devroit dans tous les cas convertir les autres humeurs en la propre nature, fans altérer celle de l'ulcère.

Les effets produits par le virus vénérien, nous paroiffent provenir de fa qualité irritante, particulière, ou spécifique, jointe à la fufceptibilité, qu'a le principe de la vie d'être irrité par une telle caufe, les parties ainfi irritées, agiflant en conféquence. Nous le confidérerons donc comme un venin, qui en irritant les parties vivantes d'une manière qui lui eft propre, - produit une inflammation particulière à cette irritation, d'ou il résulte une matière particulière à cette efpèce d'inflammation. Confidérons jufqu'où cette opinion s'accorde avec les différents phénomènes qui accompagnent la maladie.

D'abord, le pus vénérien étant beaucoup plus irritant que le pus ordinaire, il eft vraisemblable, qu'il agit plutôt par irritation, que par fermentation. 2. La propriété, qu'il a, de produire une maladie fpécifique avec des fymptômes, & des fignes fpécifiques auffi, prouve, qu'il a un pouvoir fpécifique d'irritation, les facultés vivantes agiffant néceffairement en -proportion de cette irritation. 3°. L'inflammation ayant pour fe manifefter, & pour fe terminer, un tems déterminé, préfente une circonftance, qui s'accorde parfaitement avec les loix de l'économie animale, dans prefque tous les cas. On obferve en effet ce phénomène dans les autres maladies, qui fe terminent par : une crife ; & lorfque la maladie eft de plus longue durée chez les uns, que chez les autres, cela vient, de ce que les premiers font beaucoup plus fufceptibles de ce genre d'irritation; peut

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être même y a-t-il d'autres caufes, qui concourent à l'entretenir. 4°. L'inflammation vénérienne, fe bornant a un espace qui lui eft propre, s'accorde davantage avec l'idée d'une irritation fpécifique, qu'avec celle de la fermentation, 5. Nous avons une dernière preuve de cette opinion dans le paffage des fymptômes de la maladie, d'une partie du corps à une autre, comme dans le cas où le gonflement du tefticule, eft la fuite de la fuppreffion ou de la diminution de l'écoulement de la gonorrhée. 6°. Souvent l'écoulement s'arrête à la première apparition d'une fièvre, & reparoît de nouveau quelques jours, ou quelques femaines après, ou bien ne reparoît plus du tout, felon la durée de la fièvre. Maintenant nous voyons clairement, pourquoi la fièvre peut arrêter l'écoulement, puifque la difpofition qu'elle produit dans une partie, eft trèsdifférente de la difpofition, qui a formé la matière purulente; & pourquoi la même difpofition à former la matière revient fouvent; mais nous ne pouvons pas expliquer d'après les principes de la fermentation, comment il peut fe faire, qu'en reparoiffant, l'écoulement foit encore vénérien. 7°. Si l'on produit une irritation artificielle d'une autre efpèce, quine foit pas fpécifique, on éloigne celle-ci ; or une irritation d'une autre espèce ne peut pas empêcher l'irritation de continuer, mais peut détruire l'irritation vénérienne. 8°. La difpofition, qu'ont certaines parties de notre corps, d'être irritées de préférence à d'autres, par le virus vénérien, lorfqu'il eft dans la maffe des humeurs, démontre évidemment, une irritation d'une espèce particulière. 9°. Quelques animaux ne font pas fufceptibles de l'irritation vénérienne; car des expériences répétées ont prouvé, qu'il eft impoffible de la donner à un chien, à une chienne, ou à un âne (1). Il est beaucoup plus aifé de fuppofer, qu'un chien, ou un âne, n'eft pas fufceptible de plufieurs irritations, auxquelles le corps humain eft fujet, dans toutes les autres maladies fpécifiques, & lors de l'infection de la plupart des venins, que de croire, que l'organisation du corps humain foir fufcep

(1) Il m'est arrivé d'imbiber des morceaux de linge de la matière d'une gonorhée, d'un chancre, & d'un bubon, & de les introduire dans le vagin de quelques chiennes, fans produire aucun effet. J'ai répété la même opération fur les âneffes, avec auffi peu de fuccès. Je n'en ai pas obtenu davantage, lorfque j'ai introduit de cette matière fous le prépuce des chiens. J'ai fait auffi des incifions, & j'ai introduit la même matière fous la peau; mais fes effets fe font bornés à produire un ulcère ordinaire. J'ai eu le même résultat, lorsque j'ai fait cette expérience fur les ânelles.

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