Ce Prince connoît peu les amoureux projets, SCENE V. IDAMANTE, ERIXENE, ISMENE. MADAME, IDAMANTE ADAME, quel bonheur ! Euffé-je cru devoire A la fureur des Dieux le plaifir de vous voir!. ERIXE'N E.. J'efpérois, mais en vain, jouïr de leur colere ; D'un courroux légitime, inutile espérance; Avec trop de lenteur le Ciel fert ma vengeance. En vain pour vous punir il remplit tout d'hor reurs, Puifqu'il peut de mes maux épargner les auteurs. IDAMANTE.. J'ignore auprès des Dieux ce qui nous rend coupables ; J'ignore quel forfait les rend inexorables; Avant qu'un fang fi cher eût arrofé la terre, Si ce n'eft de l'Amour, qui peut tout par vOS yeux. Que le courroux du Ciel, de cent villes fameufes, Faffe de longs déferts, des retraites affreuses: Que les ombres du Styx habitent ce féjour : Tout vous vengera moins qu'un téméraire amour. Seul il a pû remplir vos vœux, & votre attente: Je défis votre pere, il vous livre Idamante. Lorsque vous imploriez les traits-d'un. Dieu vengeur, Tous les traits de l'Amour vous vengeoient dans mon cœur ERIXEN E. Quoi, Seigneur, vous m'aimez! IDAMANTE. Jamais l'Amour, Madame, Dans le cœur des humains n'alluma plus de flamme. Sans efpoir dans vos fers toujours plus engagé... ERIXEN E. Oh, mon pere, ton fang va donc être vengé ! IDAMANTE. Si l'Amour près de vous peut expier un crime, Je rends grace à l'Amour du choix de la vićti me. Heureux même à ce prix que vous daigniez fouf frir Les vœux qu'un tendre cœur brûloit de vous offrir. Je fçai trop que vos pleurs condamnent ma tendreffe: Aufang que vous pleurez, hélas ! tout m'inté reffe. ERIXE NE. Que m'importent, après Merion expiré, Les vains regrets du cœur,quand la main l'a livré. IDAMANTE.. IDAMAN TE. J'ai fuivi mon devoir, Madame ; & fa défaite Sa mort fans mon amour ne feroit pas un crime. ERIXEN E. C'eft-à-dire, Seigneur, qu'il mérita fon fort. Quel espoir a nourri cet amour qui m'outrage? La fource de mes pleurs s'ouvrit par votre main. Eft-ce pour les tarir que vos feux fe déclarent? Songez-vous que ces pleurs pour jamais nous féparent? Sous le poids de vos fers, je n'arrive en ces lieux, Que pour y recevoir les plus triftes adieux. Tome I. C Barbare, en cet état, me parloit-il pour vous ? Qu'il m'eft doux de vous voir brûler pour Eri xene! Confervez votre amour, il fervira ma haine. Adieu, Seigneur, c'est trop vous permettre un difcours, Dont ma feule vengeance a dû souffrir le cours. SCENE V I.. IDAMANTE, POLYCLETE POLYCLETE. AH! Seigneur, falloit-il découvrir ce my ftere? Avez-vous dû parler? IDAMANTE. Ai-je donc pû me taire ? Près de l'objet enfin qui cause mon ardeur, Pouvois-je retenir tant d'amour dans mon cœur ? Que dis-tu ? toujours plein de cette ardeur extrême, Le hazard fans témoins m'offre tout ce que j'ai me; Et tu veux de l'Amour que j'étouffe la voix, |