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Que l'on faifit, Madame, avec avidité

L'efpoir flatteur d'un bien qu'on a tant souhaitté ! l'ai fait, j'ai parlé, vous m'en faites un crime Et fi pour l'expier, il faut une victime,

Je

L'hymen mettra bien-tôt Leandre entre vos bras
Je le verrai, Madame, & n'y furvivrai pas.
NERINE.

Il me fait grand pitié, je fuis tendre, Madame.
JULIE.

à Damon.

Tais-toy. Quand vous m'ofez découvrir votre fla

me,

Et que je vous en marque auffi peu de couroux
Damon, e'eft vôtre ami que je refpecte en vous:
Mais dûffai-je alterer l'amitié qui vous lie,
Je veux qu'il foit inftruit de cette perfidie.

Ce trait va, comme moy, fans doute l'étonner,
Je crois qu'il aura peine à vous le pardonner :
Trouvez bon qu'à vous voir déformais je renonce.
Adieu, vous n'aurez point de moy d'autre ré-
ponse.

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JULIE.

Damon; ne fuivez point mes pas.
DAMON.

Dans de tels fentimens je ne vous quitte pas.

Je vous le défens,

JULIE

DAMON.
Ciel !

NERINE le pouffant.

Eh malgré la défense

Suivez, & l'obligez à garder le filence.

MAGINE NAVINAKINA:

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Vec grand plaifir moy je vois cet amour-ci,

Il faut tirer profit d'une telle avanture.
Mais vois-je pas Crifpin? quel excés de parure!

SCENE X.

CRISPIN, NERINE.

CRISPIN

Et tu mon de retour

H tu vois, mon enfant, à peine de retour,
Je donne tous mes foins, tout mon temps

l'amour,

J'avois chez mon Tailleur cet habit de referve; Car mon maître des fiens n'entend pas qu'on fer ferve;

Et d'abord qu'à Paris fur l'arriere-faifon,

Nous venons de campagne, ou de la garnison,
Pour bien paffer l'hyver, il faut de quelque belle
Faire, comme tu fçais, provifion nouvelle.
J'ai foin d'être fi propre & fi fort ajusté,
Qu'auffi-tôt qu'on me voit an en eft enchanté
Et c'eft, je l'avourai, dans le deffein de plaire,
Que je me fuis paré plus qu'à mon ordinaire.
Nerine, que dis-tu de mon ajustement?

NERINE.

Voila ce qui s'appelle un homme tout charmant. CRISPIN.

Te paroiffai-je ainfi ? me dis-tu vrai, coquine ? Je n'ai point de défauts; voi, regarde, examine. NERINE.

Fort bien.

Non dà,

CRISPIN.

Cette encolure ? elle n'eft pas d'un fot.
NERINE.

CRISPIN.

Veux-tu me voir aller l'amble ou le trot
NERINE.

Il ne te manque plus qu'avoir bride ou boffètte,
CRISPIN.

Tu railles, mais je fuis bon cheval de trompet

te.

L'allure eft peu de chose, il faut me débrailler:
Male pefte aujourd'hui cela fait bien briller ;
La main dans la ceinture, un ou deux pas de dan-

le,

Et puis da curedent l'aimable contenance,

NERINE.

Que de rafinement!

CRISPIN

Quand on veut plaire aux gens Il n'eft rien de firbeau, que de curer les dents, Parmi certaines gens c'eft la belle maniere. Eh vraiment j'oubliois...

NERINE

Quoy done?

CRISPINA

La Tabatiere:

C'est elle qui foûtient la conversation.

Prenez-en. Dieu me damne, il vaut un million,

NERINE,

Je le trouve fort ben,

GRISPIN

Mais bon par excellence,

Et j'en fuis mieux pourvû qu'homme qui foit en France.

Dés qu'il en vient d'exquis, j'en ai tout le premier Par un de mes laquais Commis d'un Sous-Fermier. Qu'en dis-tu, mon enfant car tu sçais t'y con noître.

NERINE;

Je te trouve tout l'air d'un jeune petit maître.

CRISPIN.

Tout le monde m'en flatte, & je m'en flatte auffi.
NERINE,

Mais à qui veux-tu plaire en te parant ainfi è
CRISPIN.

Un garçon comme moy d'efprit & de merite,
Souvent pour s'expliquer veut qu'on le follicite :
Quand on a des talens, & qu'on les a fait voir,
Je crois fans vanité, qu'on peut s'en prévaloir :
Mais loin de me targuer de tous mes avantages,
C'est à tes beaux yeux feuls que j'en fais mes hom
mages,

Je me borne au plaifir de captiverton cœur,
Et j'ai pris le deffein de faire ton bonheur.
Turistu te rendras fans trop de réfiftance.
NERINE à part.

Ee fat! Rions un peu de fon impertinence,
Et traitons-le fi bien, qu'il n'y revienne pas
CRISPIN.

Tu ne me répons rien, & raisonnes tout bas,
NERINE d'un ton d'innocente.
Vous voudriez aimer une fimple suivante 2-
GRISPIN

Eft-ce la qualité c'est la beauté qui tente,
Des cœurs d'un certain rang je me fuis corrigé,
Pour une bagatelle, ils vous donnent congé.
NERINE.

Lolive eft mon amant, vous le fçavez.

CRISPIN.

C'est un plaifant maraut.

NERINE fur le même ton.

Lolivet

Je fuis fimple & craintive.

Ileft foupçonneux luy, jaloux, hargneux, brutal,
Et fi j'ofois en vous lui donner un rival,
Cette infidelité peut-être auroit des fuites.

CRISPIN.

Non, Lolive, crois-moi, refpecte mes merites,
Et fçait bien qu'avec moy, quand je prends certain

.

ton,

Il ne faut pas qu'il fonge à tirer au bâton : ̈ ̈ Autrement... là-deffus que tes craintes finiffent; Que Lolive aille au diable, & que nos cœurs s'uniffent.

NERINE.

Mais que va-t-on penser d'un changement fi : prompt?

CRISPIN.

Parbleu s'il l'étoit moins, il me feroit affront
Je veux qu'un cœur fe rende, & cede fans remise,
Comme Célar, venir, voir, vaincre, eft ma devise.
NERINE.

Quelle aimable fierté ! je cede à mon vainqueur.
CRISPIN.

Non, c'eft moy qui me rends, & te donne mon [cœur,

Friponne

NERINE

Il est pour moy d'un prix ineftimable.
CRISPIN.

Et pour Crifpin, Nerine un objet tour aimable.

NERINE.

Vous m'aimez donc ›

CRISPIN.

Tres-fort. Pour confirmer nos feux,

Faifons un peu chorus de foûpirs amoureux.

Ils foupurent ensemble,

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