Imágenes de páginas
PDF
EPUB

La feinte fâchoit plus qu'un veritable amour.
Crifpin, en cas pareil comme elle je fuis vive.
CRISPIN.

L'hiftoire de Leandre eft celle de Lolive.

Tour de bon?

NERINE.

CRISPIN,

Tout de bon j'en jure par ma foy.
NERINE.

Le fot veut donc auffi me faire éprouver moy?
Ah! fi je l'avois fçû, bien loin de me défendre...
J'ai regret au fouffler,

CRISPIN.

Si tu veux le reprendre.
JULIE.

Tant de fois affuré qu'il poffedoit mon cœur,
Leandre a pû douter de ma fincere ardeur !
Que n'effuirois-je point de fon humeur jaloufe
Quand un noeud folemnel m'auroit fait fon épou-

[ocr errors]

Le moindre objet, un rien, troubleroit fa raifon,
On ne fe défait pas d'un femblable foupçon,
Et lorfque par malheur une ame en eft fajfie,
Rien ne peut raffurer contre la jaloufie:
Non, Leandre jamais ne fera mon époux.
DAMON

Ah! j'ole me livrer à l'efpoir le plus doux,
Souffrez donc qu'un amant respectueux & tendre
Sur l'heure à votre pere aille s'offrir pour gendre,
JULIE,

Damon, c'eft trop manquer aux droits de l'amitié,

DAMON.

Et c'eft, le croiriez-vous? luy qui m'en a prić.

JULIE.

Il vous en a prié, Leandre?

DAMON.

Avec inftancë,

NERINE,

Autre incident nouveau.

JULIE.

Je me perds plus j'y pense.

Ah! ç'en eft trop, je fens de moment en moment
Augmenter ma colere, & mon étonnement.
NERINE.

Qui ne feroit furpris d'une telle fottife?
Il a perdu l'esprit, ou bien il vous méprise.
JULIE.

Ou folie ou mépris, tout eft égal pour moy,
L'un ou l'autre m'oblige à dégager ma foy;
Et s'il eft vrai, Damon, qu'un amant temeraire,
Soigneux de m'offenfer, & fûr de me déplaire,
A cet excés d'outrage ait ofé fe porter...

DAMON.

Mon cœur de quelque efpoir pourra-t-il se flat

ter ?

JULIE.

Le mien qu'en ce moment agite un trouble extrê

me,

De ce qu'il doit fentir n'est pas bien für lui-mê

me:

Mais il faut que mon pere inftruit de tout ceci... DAMON.

Madame, permettez que je lui parle auffi.

Dans l'inftant que par vous il apprendra l'offense, Souffrez que je me puiffe offrir pour la vengean

ce;

Il me faut votre aveu pour obtenir le fien.

JULIE.

Souffrez que là-deffus je ne vous dise rien,

Nerine.

DAMON.

NERINE.

Elle fort

J'entends bien, Monfieur, laiffez moi faire, J'aigrirai comme il faut & la fille & le pere.

[blocks in formation]

'A, Nerine, entre nous faifons notre partie;

[ocr errors]

Ne me diras tu rien auffi par modeftie?

Je fuis comme mon maître amoureux en 'effet; Mais je ne puis long-temps filer l'amour par

fait.

NERINE.

Tu m'aimes tout de bon ?

CRISPIN.

Oui, je me donne au diable, Et de feindre pour toy je ne fuis plus capable. Tes yeux vifs & mourans ont de certains ap

pas

Qui caufent là dedans de terribles combats :
Et comme un Papillon brûle fouvent fon aîle
A force d'approcher trop prés de la chandelle,
Du feu de tes beaux yeux m'étant trop appro-
ché...

Je n'en fuis pas ma foy quitte à meilleur marché.
L'aîte de mon amour prefque à demi brûlée...
Fair qu'il ne peut ailleurs... reprendre sa volée :
Ainfi
par confequent... tu comprens bien cela
Ne pouvant plus voler... il faut qu'il refte là,
Et le pauvre Crifpin retenu de la forte...

Enfin je t'aime trop, ou le diable m'emporte.
NERIN E.

Vous vous en expliquez fi pathétiquemént,
Que j'aurois fort grand tort d'en douter un mo

[blocks in formation]

Je ne puis faire encor de promeffe, Et je veux fuivre en tout le fort de ma maîtreffe. Entre fes deux amans le choix qu'elle fera Pour Lolive ou pour toy me déterminera i Et fi tu m'aimes bien tu prendras patience. CRISPIN.

Tu veux m'accoûtumer à la prendre d'avance : Mais de notre union quel que foit le succés, J'aime encor mieux la prendre auparavant, qu'a prés.

7

Fin du quatrieme Atte.

,

'FX FX XXXC SERC

ACTE V.

SCENE PREMIERE.

JULIE, NERINE.

NERINE,

N jaloux eft, Madame, un animal bien" traître,

Fort à propos Leandre à vous s'eft fait

connoître ;

A cacher ce qu'il penfe, il eft bien confommé ;
Vous devez le haïr autant qu'il fut aimé :
Mais une bonne fois faires-moi bien compren-'

dre

Si vous aimez toûjours le Curieur Leandre."
Ne vous fentez-vous point encor pour lui ?...
JULIE.

Moy? non.
Il m'a trop offenfée, & j'eftime Damon.
Déja depuis long-temps par fa froideur extrê

me

Leandre dans mon cœur fe deffèrvoit lui-mê

me:

Je cachois mon dépit, & fentois chaque jour
Que j'aimois par devoir autant que pár amour,
Ses feintes, fes foupçons ont achevé l'ouvrage ;
Je ne fçaurois tenir contre un pareil outrage:
J'ofe te l'affarer, l'affaire d'aujourd'hui
Ne permet pas que j'aye aucun retour pour luy.
D viTM

« AnteriorContinuar »