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Le plaifir eft un libertin,

La jeuneffe extravague, & la raifon radotte ;

La retenue eft une sotte,

L'enjoûement un vrai calotin;

L'Hymen chaffe l'Amour, & l'Amour le balotte;
L'audace, à l'œil vif & mutin,

Dans Paris fe promene en robe de fatin,
Et peut-être qu'un beau matin
On verra le beau fexe arborer la culotte.
Ainfi tout eft boulleverfé,

Ainfi du monde renversé,

Se tourne la tète falotte.

Ne verrons-nous jamais renaître l'heureux tems
De cette céleste harmonie

Qui fçavoit contenir le cœur & le génie
Par de fages décrets dont ils étoient contens?
Oui, nous les allons voir renaître ces inftans.
C'eft en vous, aimable Silvie,

Que le Ciel prétend rassembler

Ces illuftres Rivaux que l'infernale envie
Dans leur douce union avoit ofé troubler.
Je vois revivre en vous cette belle nature
Qui,fans trop s'éloigner de la fimplicité,
De l'art emprunte la culture

Pour relever l'éclat d'une jeune Beauté.
Vous aimez les plaisirs fans ceffer d'être fage,
Et jamais la raifon ne fonna le tocfin

Sur les amusemens dont vous faites ufage;

Votre

Votre efprit, au bon fens, ne fait aucun larcin, La jeuneffe pour vous n'eft qu'un lieu de paffage Qui d'un âge plus mûr vous montre le chemin Dans les enchantemens qu'enfante le bel âge, Pour fçavoir comme vous en prévoir le déclin Que d'ennemis, jeune Silvie,

Vous avez réconciliés :

Puiffent-ils vous être liés

Pendant le plus long cours de la plus belle vie! Pour vous, je vois encore en faveur des Humains Un raccommodement à faire,

L'ouvrage eft digne de vos mains,

Mais vous ne pouvez feule arranger cette affaire. L'Amour avec l'Hymen vous font recommandés, Depuis long-tems ces Dieux ne fe font accordés, Enfemble il faut les faire boire:

Quand remporterez-vous cette illuftre victoire? Trop heureux le Mortel à qui vous prétendez Faire partager la gloire

De les avoir raccommodés ?

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On croit quelquefois rire de la Mort, quand elle eft fort proche. C'eft ce qui eft arrivé à une jeune Perfonne, qui n'ayant qu'un peu de fiévre, dit en badinant à un galant Homme qui lui rendoit des foins affidus, que quand elle feroit morte, elle Tome I. Partie I

vouloit qu'il donnât fon cœur à une de fes Amies, qu'elle lui nomma. Sa fiévre ayant augmentée, elle mourut peu de jours après. Un jeune Gentilhomme que les affaires n'empêchent point de fonger de tems en tems à faire fa Cour aux Muses, a fait làdeffus les Vers fuivans.

A DAMON, Sur ce qu'Iris lui avoit ordonné en mourant d'aimer Célimene.

IL

STANCE S.

Left donc vrai, Damon, vous aimez Céli-
mene!

Votre Iris, en mourant, fit naître cette ardeur,
Lorfque par Teftament, pour ferrer cette chaîne,
Elle lui laissa votre cœur.

*

Je fçais qu'il étoit de fa gloire
De placer en bon lieu vos vœux
Mais honorez-vous fa mémoire ?
Vous fentez-vous bien amoureux ?

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Plus vous ferez fenfible à cette Amour nouvelle

Dont pour vous Iris a fait choix,

Et plus vous montrerez de zele
A remplir fes dernieres loix.

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Non, non, ne craignez rien, on n'en sçauroit médire,

Aimez en toute fureté ;

Iris avant fa mort voulut bien y souscrire.

Si vous tournez vos vœux vers un autre côté,
C'eft la marque de fon Empire,

Non de votre légereté.

Malgré ce changement d'hommage
Votre cœur ne s'est point mépris ;

Mais croyez-moi, Damon, pour n'être point vo

lage,

Dans Célimene il faut que vous aimiez Iris.

*

Lorfqu'à votre jeune Maîtreffe

Vous rendrez des foins à l'écart,

Plein d'Iris, conduifez fi bien votre tendreffe,
Qu'elle en ait la meilleure part.

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L'affaire eft affez délicate,

Gardez de vous tromper, gardez de la trahir. Pour un nouvel Objet quand votre amour éclate, Ne faites-vous rien qu'obéir?

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On fçait qu'à prendre feu votre ame est assez prompte,

Qu'un bel œil peut beaucoup fur vous. Célimene fait voir cent charmes des plus doux, Ne l'aimeriez-vous point tout à fait pour fon compte?

*

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Les vivans, ce dit-on, font oublier les morts. Ces derniers n'ont rien que de fombre. Me trompai-je, Damon? je crois qu'un joli corps Vous accommode mieux qu'une ombre ?

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Voulez-vous y penfer fouvent?

Dans Célimene, Iris doit être regardée.

Ce rapport eft aifé; mais ce n'est qu'une idée,
Et l'amour veut plus que du vent.

*

Comme d'une viande légere

Le vôtre affez mal fe nourrit,

Pour le mieux foutenir, il faut que la matiere
Accoure au fecours de l'efprit.

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