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des perfonnes raifonnables, douces dociles, qui nous rendent amour pour amour. La charité nous oblige de porter les fardeaux de ceux qui n'ont aucune de ces qualitez, & de ceux mêmes en qui nous ne voyons rien qui n'attire notre averfion ou notre mépris. Comme ils font auffi - bien que nous membres de Jefus-Chrift, nous devons aimer Jefus-Chrift en eux mais parce qu'ils font foibles malades & mourans, il eft neceffaire que nous nous appliquions avec un zele particulier à les guérir, & que n'ayant point d'autre remede que la charité, nous en ayons d'autant plus pour eux, qu'ils en ont plus de befoin.

IV.

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Quelque foibles, miferables & imparfaits que nous foyons, nous nous fouffrons avec patience, & nous avons compaffion de nous-mêmes. Quand nous ne verrions rien en nous qui ne méritât d'être condamné, & qu'il ne nous refteroit qu'un peu de cendre de l'homme nouveau que le faint Ef prit a formé en nous le jour de notre batême, Dieu veut que nous aimions

ces cendres dans la vûe qu'elles peuvent être ranimées de fon efprit.

C'eft la difpofition où nous devons être envers nos freres, & la conduite que nous devons tenir à leur égard. Quand ils feroient morts depuis longtemps comme Lazare, & qu'on auroit fujet de les croire déja corrompus comme on le croyoit de ce faint, il ne faut pas laiffer de les aimer ni d'ouvrir leur tombeau, non plus* que de travailler à les faire revivre par nos prieres, nos gémiffemens & nos larmes, qui peuvent tout obtenir de Dieu, lors qu'elles font animées de la charité.

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V.

Nos difcours étant ordinairement conformes à ce qu'il y a dans notre cœur fi nous aimons veritablement nos freres, nous ne parlerons point de leurs défauts avec aigreur, ni avec colere, ni avec quelque forte de rail·lerie ou d'infulte; mais lors que nous nous trouverons obligez de les reprendre, nous ne le ferons qu'avec des marques dé bonté & de douceur, fans y employer d'autre force que celle que nous donnera la charité même. Com

me nous ne devons jamais défefperer de notre falut, ni de la mifericorde de Dieu pour nous quand nous ferions tout couverts de crimes; nous ne devons pas non plus défefperer du falut d'aucun pecheur, quelque méchant & coupable qu'il foit: & comme JefusChrist a obtenu, par fes prieres, la converfion des bourreaux qui le crucifiieont, il n'y a perfonne pour qui nous ne devions efperer fa mifericorde & pour qui nous ne foyons obligez de la demander.

VI.

7.12.

Enfin pour connoître à quoy nous engage la charité envers le prochain, & quelles font nos obligations à fon égard, nous n'avons qu'à confiderer ce que notre divin maître nous ensei- Matths gne & nous prefcrit dans fon Evangi- Luc 6. le. Or il y réduit toutes nos obliga- 31. tion à ne pas traiter le prochain comme nous ne voudrions pas être traitez, & à le traiter comme nous voudrions qu'on nous traitât. Il nous reste. donc d'examiner les fentimens & les mouvemens de notre cœur fur ce qui nous regarde, & de les appliquer tellement à ce qui regarde nos freres,

que nous reconnoiffions ne pouvoir fatisfaire à ce que nous leur devons, qu'en tenant envers eux une conduite conforme aux fentimens & aux mouvemens legitimes que nous avons pour nous-mêmes. Que fi au lieu d'en user ainfi, nous les traitons autrement que: nous ne voulons qu'on nous traite, ou nous nous portons à les traiter comme hous avons fujet de ne vouloir pas être traitez;nous avons d'autant plus lieu de nous reconnoître tres-éloignez de no tre devoir en ce point, que notre fouverain legiflateur y a renfermé toutes fes loix dés le commencement de fa prédication, & qu'il les a toutes réunies dans le commandement fingulier & unique, qu'il nous en a fait le der nier jour de fa vie.

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DES TROUBLES

QUI NAISSENT

DANS L'ESPRIT,

à l'occafion des retours qu'on fait fur fa vie paffée.

Cor meum conturbatum eft, de-. reliquit me virtus mea, & lumen oculorum meorum', & ipfum non eft mecum.Pf.37.11 Mon cœur eft agité de trouble, mes forces me quittent, & méme la lumiere de mes yeux n'est plus avec

moi.

N

Ous voyons par experience, qu'entre les perfonnes qui font profeffion de pieté, il y en a beaucoup qui font fu

jets à une infinité de troubles, d'inquiétudes, d'impatiences & de découragemens à la vue de leurs fautes ; &

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