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TITUS, feul.

IL fort; en quel état, en quel trouble il me laiffe!

Tarquin me l'eût donnée! ah douleur qui me preffe ! mais non; Miniftre dangereux,

Moi j'aurois pû! ... mais

Tu venois découvrir le fecret de mes feux,

Hélas! en me voyant, fe peut-il qu'on l'ignore!
Il a lû dans mes yeux l'ardeur qui me dévore.
Certain de ma foibleffe, il retourne à fa Cour,
Infulter aux projets d'un témeraire amour;
J'aurois pû l'époufer! lui confacrer ma vie !
Le Ciel à mes défirs eût deftiné Tullie !

Grands Dieux ! s'il étoit vrai... Quels vains égaremens
De leur erreur flatteuse empoisonnent mes sens?
Cependant que j'embraffe un image frivole,
Rome entiere m'appelle aux murs du Capitole,
Le Peuple raffemblé fous ces Arcs triomphaux,

Tout chargés de ma gloire, & pleins de mes travaux, M'attend pour commencer les fermens redoutables, De notre liberté garans inviolables.

Allons... mais j'y verrai ces Sénateurs jaloux,

Cette foule de Rois, l'objet de mon courroux..
Malheureux ! ce Sénat, dont l'orgueil t'humilie,
Le haïrois-tu tant, fi tu n'aimois Tullie?

Tout révolte en ces lieux tes fens défefperez;
Tout paroît injustice à tes yeux égarez.
Va, c'est trop à la fois, éprouver de foibleffe.
Etouffe ton dépit, commande à ta tendreffe?
Que tant de paffions qui déchirent ton cœur,
Soient au rang des Tirans, dont Titus eft vainqueur.

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ACTE TROISIEME

JE

SCENE I.

ARONS, ALBIN, MESSALA.

ARONS, une Lettre à la main.

E commence à goûter une jufte efpérance, Vous m'avez bien fervi par tant de diligence;

Tout fuccéde à mes voeux. Ouï, cette Lettre, Albin,
Contient le fort de Rome, & celui de Tarquin.

Avez-vous dans le Camp reglé l'heure fatale?
A-t-on bien obfervé la Porte Quirinale?
L'affaut fera-t-il prêt, fi par nos Conjurés
Les Remparts cette nuit ne nous font point livrés?
Tarquin eft-il content? croit-on qu'on l'introduise
Ou dans Rome fanglante, ou dans Rome foumife.

ALBIN.

Tout fera prêt, Seigneur, au milieude la nuit.
Tarquin de vos projets goûte déja le fruit;
Il penfe de vos mains tenir fon Diadême;
Il vous doit, a-t-il dit, plus qu'à Porfenna même.
ARONS.

Ou les Dieux, Ennemis d'un Prince malheureux,
Confondront des deffeins fi grands, fi dignes d'eux;
Ou demain fous fes Loix Rome fera rangée;
Rome en cendre peut-être, & dans fon fang plongée;
Mais il vaut mieux qu'un Roy fur le Trône remis,
Commande à des Sujets malheureux & soumis,
Que d'avoir à dompter au fein de l'abondance,
D'un Peuple trop heureux, l'indocile arrogance.

A Albin.

Allez, j'attens ici la Princeffe en fecret.

A Messala.

Meffala, demeurez.

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ARONS.

EH bien

H bien? qu'avez-vous fait ?

Avez-vous de Titus fléchi le fier courage?

Dans le parti des Rois penfez-vous qu'il s'engage?

MESSALA.

J'avois trop préfumé; l'infléxible Titus

Aime trop fa Patrie, & tient trop de Brutus.
Il fe plaint du Sénat, il brûle pour Tullie.
L'orgueil, l'ambition, l'amour, la jalousie,
Le feu de fon jeune âge, & de fes paffions,
Sembloient ouvrir fon ame à mes féductions;
Cependant qui l'eût cru? la liberté l'emporte.
Son amour est au comble, & Rome eft la plus forte,
J'ai tenté par degré d'éfacer cette horreur,

Que pour le nom de Roy Rome imprime en fon coeur.

En

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