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pays étrangers; qualité précieufe dans un Miniftre, qui doit aller au devant des recommandations, quand il s'agit de doter les talens.

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Si Madame de Maintenon n'admit pas tous les placets, du moins ne fut-elle défavorable à perfonne. On ne peut citer un trait de fa vie qui ait été nuifible au moindre citoyen. Les fatires même les plus ameres (car, pour gloire, elle n'en manqua pas) ne purent l'exciter à la vengeance: elle penfoit fagement, avec Madame de Sévigné, qu'une haine eft une terrible chofe à foutenir.

Madame de Montefpan s'efforçoit d'oublier la Cour, mais toujours avec ces fouvenirs qui reviennent involontairement. Son chagrin eût été bien plus. vif, fi le mariage de Madame de Maintenon eût éclaté; mais comme on n'en parloit que vaguement, l'incertitude fervoit à la tranquillifer; d'ailleurs la devotion dut remettre fous fes yeux

les opérations de la Providence, & lui faire connoître que la veuve Scarron, fi fouvent repouffée, n'avoit pu arriver au faîte des grandeurs, que par l'effet d'une protection invisible. Ce qu'il y a de fûr, c'eft que l'établissement de Saint-Cyr lui deffilla les yeux, & qu'elle vit alors combien les intentions de Madame de Maintenon avoient été pures, & combien l'on devoit refpecter fa piété.

On l'accufa d'avoir caufé l'éloignement de Madame de Montefpan, c'eftà-dire, que fa piété l'eût emporté fur fa reconnoiffance; autrement il faudroit lui prêter des motifs que fes vertus ne nous permettent pas de foupçonner. Eile n'eut d'autre objet que celui d'écarter les vices qui affiégeoient le trône du Monarque.

CHAPITRE XXIII.

Elle jette les premiers fondemens d'une Inftitution Chrétienne.

PERSONNE ERSONNE ne pouvoit mieux que Madame de Maintenon réuffir à former un pareil plan. Elle avoit cette raifon tranquille qui prévoit les inconvéniens, cette piété folide qui ne fe rebute point des difficultés, ce crédit qui trouve les moyens propres à réaliser les projets; mais comme les plus grands établiffe mens ne s'annoncent prefque jamais que par de légeres circonftances, celui-ci parut d'abord l'effet du hasard.

Il fallut que Madame de Maintenon rencontrât à Montchevreuil Madame de Brinon, Religieufe Urfuline, qui, furvivant à la ruine de fa Communauté, fe faifoit un devoir d'inftruire quelques enfans. Cet exemple réveilla dans fon âme le zele qu'elle eut toujours pour

l'éducation de la jeunesse; & dès lors elle réfolut de s'en occuper utilement. Mais comment ébauchera-t-elle cet ouvrage ? Elle ne peut s'éloigner de la Cour; & quand on ne veille pas foimême fur de nouveaux établissemens, on risque de les voir dépérir.

La charité, toujours ingénieufe à faire le bien, lui prépara-les plans, & fon zele les faifit. On commença par raffembler dans les environs des domestiques & des enfans que Madame de Brinon catéchifoit avec beaucoup d'exactitude, en attendant qu'on pût trouver un afile propre à cette entreprise, ainsi que des fonds.

Ce fut à Saint-Germain-en-Laye, où la Cour réfidoit alors, qu'il y eut à ce fujet des entretiens fecrets avec Madame de Maintenon & Madame de Brinon. Ruelle devint le lieu du nouvel établiffement on y meubla une maifon commode; & foixante éleves se trouverent prefque en même temps fous

la direction de quelques dames refpectables.

Rien n'approcha de la difcrétion & du zele de Madame de Maintenon dans l'accompliffement de cette bonne œuvre la nouvelle Communauté alloit jufqu'à cent perfonnes, & la Court l'ignoroit.

Sa préfence étoit fouvent néceffaire; elle imagina qu'à raifon du voifinage, Noify pourroit la mettre à portée de remplir fes vues. On fait qu'il eft renfermé dans le Parc de Versailles, & qu'il étoit facile de quitter la Cour pour quelques momens,' fans avoir l'air de s'abfenter.

Le Roi, bientôt inftruit de cette nouvelle fondation, voulut la perfectionner. Il donna des ordres pour qu'on formât une habitation commode; & dans quatre mois cela fut exécuté.

La tranflation de la Communauté naiffante eut lieu le lendemain de la Chandeleur. Les Bourgeoifes étoient alors

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