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MOYSE CHARA S.

OYSE CHARAS, Docteur en Médecine à Lon dres, & Profeffeur de Chimie au Jardin Royal des Plantes à Paris, né à Uzès en 1618, fut un des plus célebres & des plus habiles Pharmaciens de fon fiècle. Après avoir exercé pendant plufieurs années fa profeffion à Orange avec les plus glorieux fuccès, le défir de signaler fon habileté fur un plus grand Théatre l'amena à Paris où il ne fut pas long-tems fans s'y faire connoitre par fçavant Traité qu'il publia fur la Thériaque, après en avoir compofé trois cens livres en préfence des Magiftrats, du Premier Medecin du Roi, & de plufieurs Députés de la Faculté de Paris.

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S'étant depuis appliqué avec beaucoup d'ardeur à acquérir une parfaite connoiffance de la Vipere, & de la maniere d'en guérir les morfures, il en compofa un Traité qu'il accompagna d'un Poëme Latin : deux ouvrages qui répandirent la réputation de leur Auteur dans toute l'Eu

rope.

Une Chaire de Profeffeur en Chimie, au College Royal des Plantes, fut la récompenfe de fon habileté. Pendant neuf ans qu'il remplit cette Charge, il confacra tous les momens qu'elle lui laiffoit de libre, à écrire fur les differentes matieres qui faifoient le fujet des leçons qu'il dictoit à fes Ecoliers. Le fruit d'une fi longue étude, fut une Pharmacopée Royale, Galenique & Chimique, qu'il publia en 1676.

Jufqu'alors il avoit joui du fort le plus heureux. Généralement eftimé pour fon habileté, il voyoit fa fortune augmenter chaque jour, lorfque les Ordonnances rendues en 1680. contre les Calviniftes, vinrent troubler fon repos. Trop honnête homme pour facrifier fa Religion à Tome II.

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des vûes d'intérêt ou d'ambition, il fe détermina à fe retira en Angleterre, où Charles II le reçut avec diftinction, après lui avoir fait l'honneur de lui envoyer un de fes Yachs pour le paffer dans ce Royaume. M. Charas y demeura cinq ans, & s'y fit recevoir Docteur.

D'Angleterre il paffa en Hollande, & pratiqua la Médecine à Amfterdam avec tant de réputation, que l'Ambaffadeur d'Espagne lui fit les offres les plus avantageufes pour l'engager d'aller prendre foin de la fanté du Roi fon Maître, qui depuis quelque tems étoit fort affoiblie. Mais il fallut auparavant que l'Ambaffadeur le raffurât fur les frayeurs, que lui caufoit la feule penfée du redoutable Tribunal de l'Inquifition.

Arrivé à Madrid, il s'y fit bientôt connoître pour un homme confommé dans fa Profeffion. Par differentes expériences qu'il fit fur la Vipere, il vint à bout de défabufer plufieurs Grands de l'opinion populaire, que ces animaux à douze lieues à la ronde de Toléde, n'avoient aucun venin après avoir mordu, parce que long-tems auparavant un Archevêque de cette Ville leur avoit ôté le pouvoir d'envenimer ce qu'ils mordoient. Malheureufement fa fcience étoit trop éclairée, pour ne pas donner de la jaloufie aux Médecins du Palais où il étoit fouvent appellé ; c'en étoit trop pour qu'on le laiffât tranquille. Sa Religion fut le prétexte dont on fe fervit pour le perfécuter; ayant été déféré à l'Inquifition, il fut inhumainement traîné en prifon par ordre de ce Tribunal, quoiqu'il fûr alors âgé de près de foixante & douze ans. Pendant quatre mois qu'il fut détenu prifonnier, il ne ceffa de demander à Dieu par les plus ferventes prieres, de lui faire connoître s'il étoit dans l'erreur: fes vœux furent exaucés. Après quelques conférences qu'il eut avec d'habiles Théologiens, il fit fon abjuration, & reçut les Sacremens de Confirmation, de Pénitence & d'Euchariftie, avec toutes les marques d'une véritable & fincere converfion.

De retour en France, il eut l'honneur de faluer le Roi,

qui le reçut avec bonté, & l'honora de fes bienfaits. La même année 1672*, il fut nommé à une place d'Affocié à +1692. l'Académie des Arts & des Sciences, honneur dont fon grand âge ne lui permettoit pas de jouir long-tems. Il mourut le 17 Janvier 1698, dans fa quatre-vingtiéme an

née.

CHARLES BARBEYR AC.

C

HARLES BARBE YRA C, l'un des plus fçavans & des plus illuftres Médecins du dernier fiécle, iffu d'une noble & ancienne famille de Provence, naquit à Cerefte en 1629. Après avoir fait avec beaucoup de fuccès fes Humanités & fa Philofophie, dans l'Académie de Die en Dauphiné, il fe dévoua à la Médecine, qui fut dès lors le feul objet de fon application. Les Univerfités d'Aix & de Montpellier, furent fucceffivement téinoins des progrès qu'il fit dans cette fcience, & peut-être n'y en eutil jamais de fi rapides & de fi furprenans. Il étoit encore fur les bancs, que fes condifciples le confultoient déja comme leur Maître ; & ils convenoient que les inftructions particulieres qu'ils en recevoient, ne leur étoient gueres moins utiles que les leçons publiques, qu'on leur faifoit dans les Ecoles.

M. Barbeyrac n'étoit encore âgé que de vingt ans, lorsqu'il fut reçu Docteur de la Faculté de Montpellier. Bientôt il joignit la pratique à la théorie de fon Art,& fa grande jeuneffe n'empêcha pas qu'il ne devînt en peu de tems un des Médecins des plus employés de la Province; & ce fut en partie la haute réputation qu'il s'y étoit faite, qui lui fit perdre la penfée d'aller s'établir à Paris, ainfi qu'il en avoit d'abord formé le deffein. Une autre raifon qui le retint à Montpellier, fut un mariage avantageux qu'on lui propofa dans cette Ville, & qui s'accordoit autant avec fon

inclination, qu'avec l'intérêt de fa fortune.

L'année 1658. lui fournit une éclatante occafion de fignaler fon habileté. Deux Chaires de Profeffeur étant venues à vacquer par la mort de Jacques Durane, & du célebre Lazare Riviere, M. Barbeyrac fe préfenta au concours, & ne brilla pas moins par la fubtilité de son esprit que par l'étendue de fes lumieres. S'il n'obtint pas une de ces Chaires vacantes, ce n'eft pas qu'il ne fût jugé plus. digne qu'un autre de la remplir; mais c'étoit-là un emploi auquel la Religion prétendue réformée qu'il profes foit, ne lui permit pas d'afpirer. Le fruit qu'il recueillic de cette action d'éclat, fut qu'elle fervit merveilleusement à l'accroiffement de fa réputation ; & on la vit fe répandre rapidement, non feulement dans tout le Royaume, mais même dans les Pays Etrangers. Une Princeffe illuftre, Mademoiselle d'Orléans, voulut l'attirer auprès d'elle, & l'honorer du titre de fon premier Médecin; mais jaloux de fa liberté, il n'héfita pas à lui facrifier les avantages. que ce pofte lui promettoit. Environ le même tems, le Cardinal de Bouillon, dont M. Barbeyrac avoit pris foin dans une maladie, dont fon Eminence avoit été attaquée pendant le féjour qu'elle fit en Languedoc, le nomma fon Médecin ordinaire, & le gratifia d'une penfion de mille. livres, fans cependant exiger qu'il s'attachât à sa perfonne.

Mais ce qui prouve encore mieux le mérite de ce grand. homme, c'eft la confiance générale que l'on avoit en fon habileté. Confulté de toutes parts pour les cas les plus difficiles, fouvent appellé dans les Villes les plus confidérables du Royaume, par les perfonnes du plus haut. rang, il falloit qu'il fe multipliât en quelque façon, pour fuffire aux occupations dont il étoit furcharge. S'il fortoit pour faire des vifites, ce n'étoit jamais qu'accompagné d'une foule de jeunes étudians, à qui il expliquoit la nature des maladies qu'il venoit de traiter, les remedes qu'il avoit ordonnés, & les effets qu'il s'en promettoit. C'eft ainsi

qu'il les inftruifoit fur les matieres les plus importantes de la Médecine, où il avoit introduit une réforme prefque générale, par la fuppreffion de quantité de remédes fuperAus, qu'un long ufage avoit comme confacrés, & qui cependant étoient plus propres à fatiguer les malades, qu'à les foulager ou à les guérir. Changement, qui feul fuffiroit pour immortalifer la gloire de ce grand homme, que fes vertus, & fur tout fon défintéreffement & fa charité envers les pauvres, n'ont moins rendu recomman

dable que fes talens.

pas

Une fiévre continue qui dura dix-huit jours, l'enleva de ce monde, le 6 Novembre 1699. dans fa foixantedixième année.

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DENIS DODAR T.

ENIS DODART, fils de Jean Dodart, Bourgeois de Paris, & de Marie Dubois, fille d'un Avocat, fut Confeiller-Medecin du Roi, & de S. A. S. Madame la Princeffe de Conti, & de S. A. S. Monseigneur le Prince de Conti, & Docteur Régent de la Faculté de Médecine de Paris. Il naquit en cette Ville en 163 4.

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Ses parens qui avoient des fentimens bien élevés au deffus de leur fortune, s'attacherent à lui donner l'éducation la plus brillante, & toute à la fois la plus folide. Ce n'en fut pas affez pour eux de lui donner des Maîtres, qui lui appriffent les Belles Lettres & les Langues fçavantes, ils voulurent encore qu'il prît des leçons de deffein, de peinture, de mufique, & qu'il apprêt à jouer de divers inftrumens. Aucun de ces exercices pour lequel le jeune Dodart n'eût les plus heureuses difpofitions; mais il réusfit encore mieux dans fes études. Le Grec & le Latin luï devinrent auffi familiers que fa Langue naturelle

Après avoir fait avec fuccès fon cours de Philofophie,

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