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leur réputation engagea Licurgue, grand Législateur lui-même, à étudier particulierement la conftitution politique établie par elles, & le fit même

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paffer en Créte, pour y faire ses ob» fervations fur le Gouvernement, & » pour conférer avec les plus habiles » Gens de l'Ifle, fur leurs Loix....

» La renommée des Loix de Créte, » fe feroit-elle foutenue fi long-tems? " & ces Loix auroient elles obtenu

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l'approbation de leur fiécle, & l'ad» miration de la postérité? auroient» elles arraché des louanges à Lycurgue,

à Socrate & à plufieurs autres grands "Moralistes, fi elles n'avoient pas été » fondées fur une bafe folide, & appuyées fur 1équité naturelle? Je penfe que non.

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M. Hubner pouvoit confirmer fon fentiment par une preuve indubitable; c'eft que la Créte fut très long-tems l'Etat le plus peuplé & le mieux culti

vé de la Grece. Elle eft restée fameufe par la grandeur & l'opulence de fes cent Villes, autant que par la majesté de ses Loix regle générale de la Science morale & politique. C'est par l'état floriffant de l'agriculture, & de la riche population, qui en eft la fuite, qu'on doit juger des Gouvernements.

L'Historien du Droit naturel, n'a pu fe défendre des préjugés communs, en faveur des Spartiates & de leur Législateur. Les vertus privées de Lycurgue, & la fainteté qu'on admire en quelques unes de fes Inftitutions, ont fans doute féduit notre vertueux & fage Ecrivain; c'est une erreur de plufieurs grands Philofophes anciens & modernes. Nous l'excufons d'autant plus volontiers qu'elle nous avoit entraîné nous-même, d'après le grand nombre. Cependant nous fommes aujourd'hui très convaincu que c'est une erreur, & nous ofons croire que M. Hubner en conviendroit lui-même.

Nous fommes perfuadés que la de bauche & l'oifiveté font deux peftes publiques; & nous applaudiffons très volontiers au deffein que forma Lycurgue, de les bannir de fa patrie. Nous penfons comme lui, qu'il est très défirable » que les prééminences & les » honneurs ne foient données qu'à la » vertu feule, & qu'on ne mette d'autre » différence entre les Citoyens, que " celle qui vient du blâme dû aux mau» vaifes actions, & de la louange que » méritent les actions honnêtes & ver» tuenfes ".

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Nous croyons encore, » que ce qu'il » y a de plus fort & de plus efficace » pour rendre les Villes heureuses, & » les Peuples vertueux, c'est ce qui » eft empreint dans les mœurs, & dans les efprits des Citoyens..... qu'ils

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» doivent être élevés & formés de ma

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כן

» niere qu'ils deviennent eux-mêmes leurs » Législateurs

Enfin nous foufcrivons de bon cœur à cette maxime empruntée de Lycurgue, & fortement inculquée par Ariftote » que les enfans font à l'Etat

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دو

qu'ils doivent être élevés par l'Etat, » & felon les vues de l'Etat ".

Mais il n'en eft pas moins vrai que les réglemens de Lycurgue violerent ouverment les principes fondamentaux de la Loi naturelle; qu'il méconnut tous les droits des propriétés, qui font la bafe des Inftitutions fociales.

Le premier devoir de l'homme étant de pourvoir à fa fubfiftance, fon premier travail, même avant toute aggrégation ou convention fociale, feroit la recherche des fruits propres à fa jouiffance; fon premier droit eft donc de faire ufage pour lui-même de fes facultés corporelles. Son fecond droit eft d'ufer des biens qu'il s'eft procurés par fon travail. Ainfi la propriété personnelle & la propriété mobiliaire, font évidemment &

nécessairement fondées fur la premiere Loi de nature. La propriété fonciere, lien de toute Société, ne fait que les affurer & en multiplier les jouiffances.

Lycurgue laiffa dans Sparte la tyrannie la plus abominable aux Spartiates, & la fervitude la plus cruelle aux malheureux Ilotes. Tache honteufe & inéfacable aux yeux de la raison & de l'humanité. Il détruifit presque entierement la propriété mobiliaire par des réglements bizares, très contraires aux vues de la nature, qui donne aux hommes l'intelligence & l'induftrie, pour varier & multiplier les jouiffances qui les rendent heureux.

L'égalité parfaite des propriétés foncieres est une chimere abfurde; premierement elle n'eft fondée fur aucun motif légitime, & marque plus de petiteffe de génie, que d'amour de l'humanité. D'ailleurs, comment Lycurgue se flatoit-il de pouvoir l'établir? Toutes les

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