Imágenes de páginas
PDF
EPUB

à toute espece de fléaux deftructeurs. Tel eft l'affreux fpectacle qu'étaloit aux yeux du Philofophe l'Empire Romain, & tant d'autres qui lui firent place, ou qui s'éleverènt fur fes débris. L'ignorance & l'oubli des regles de l'ordre, caufent néceffairement tous ces malheurs.

L'Homme eft né pour chercher fa confervation & fon bien être. Son cœur eft avile & même infatiable des jouiffances qui font fa félicité ; il fuit & détefte le malheur & le déplaifir. L'Auteur de la nature a mis dans toutes nos ames ce reffort univerfel, premier mobile des actions humaines : il étoit nécessaire à la perpétuité, à la multiplication, au bonheur de l'efpece. C'est par lui que l'Homme raisonnable & fibre, peut connoître les principes de l'ordre moral & politique, la Loi naturelle & les Loix fociales, évidemment dérivées de l'ordre phyfique, inftitué par l'Etre fuprême,

pour la prospérité générale & continuelle du genre humain.

Les Hommes éclairés du flambeau de ces vérités, y trouvent la réunion de tous les intérêts, le bonheur général & le bien-être privé. Chaque mortel peut en fuivant les régles effentielles de l'ordre, fe faire le fort le meilleur poffible, fans nuire à fon femblable, fans le dépouiller, fans le vexer, fans l'opprimer; heureux de contribuer nécessairement & manifestement à la prospérité publique, en faifant fon propre avantage, & d'ajouter ainfi aux biens qu'il fe procure, le plaifir & la gloire de fervir d'inftrument à la Bienfaisance fuprême, qui veut évidemment le bonheur de tous.

Mais fi l'Homme s'égare hors des limites de cet ordre effentiel, unique & invariable, il rompt néceffairement les

ens facrés qui réuniffent avec l'intétêt général fes intérêts privés; l'attrait

invincible qui le porte à fatisfaire fes defirs devient infailliblement aveugle, deftructif, oppreffeur & tyrannique; il ne multiplie fes jouiffances qu'en multipliant fes injustices, fes dangers, fes craintes, fes remords: il ne peut atteindre au vrai bonheur, mais il trouble la paix, la félicité publique : les vains efforts qu'il fait pour adoucir fes peines, ou pour fe procurer de fauffes joies, ne fervent qu'à augmenter le nombre des crimes & des malheurs.

C'est ainsi que l'homme a reçu de la nature un efprit intelligent & un cœur fenfible, qui caufent fur la terre, ou tous fes maux, ou tous fes biens; tous les maux ou tous les biens poffibles de l'efpece entiere: tous les biens, quand l'efprit connoît les Loix de l'ordre, quand le cœur les chérit & les obferve tous les maux, quand ces Loix faintes font ignorées.

Malheur aux fiécles, malheur aux

Peuples qui languiffent dans cette ignorance également honteufe & funefte: il fut un tems où toutes les Nations de l'Europe étoient plongées dans les plus épaiffes ténébres, & peut-être cette époque n'eft-elle pas trop éloignée, la plupart même confervent encore des reftes affez fenfibles de l'antique Barbarie de leurs Inftituteurs.

La Philofophie morale & politique a cependant commencé depuis le dernier fiécle, à répandre fon crépuscule fur nos Contrées; d'illuftres modernes ont effayé de développer les grands principes du Droit Naturel, du Droit focial, du Droit des Gens on a remis en honneur les Ecrits des Sages de l'antiquité, qui ne décoroient du nom de Philofophie que les Sciences des Moeurs & du Gouvernement; mais la rouille des erreurs étoit trop invétérée pour qu'elles fiffent des progrès rapides. Les fuccès brillants, mais paffagers, n'appartien

nent parmi nous qu'aux frivolités. Il a fallu des travaux, de la patience & du tems, pour que la voix du patriotisme & de l'humanité pût obtenir même la liberté de fe faire entendre: heureusement elle femble enfin avoir pénétré, non-feulement dans les afyles de Citoyens ftudieux, mais encore dans les cabinets de prefque tous les ordres de Lecteurs, dans les affemblées importantes, jufque dans les cercles, & même jufque dans les Cours des Princes. La Philofophie s'eft affife fur quelques Trônes, & prefque partout elle ofe s'en approcher comme autrefois.

Les Sciences Economiques reprennent dans l'Empire Littéraire le premier rang, qu'elles y occuperent en Grece & en Italie, au tems des Pithagores, des Socrates & des Platons: notre Europe s'approche à cet égard, par degrés, de la fageffe Egyptienne, & peut-être même de la fageffe Chinoise. Les spécula

« AnteriorContinuar »