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me un Payen & un Publicain celui qui n'é. coute pas l'Eglife. Arius, Socin & tous les adverfaires de la Divinité de Jesus-Chrift & de la Trinité, feront Orthodoxes à l'égard de Dieu, parce qu'aux paffages qu'ils liront dans l'Ecriture, ils pourront donner un fens & fentir que ce fens eft véritable, & voilà leur vérité à eux toute trouvée. Quelques foibles reftes de Religion ne fuffiroient-ils pas pour faire frémir d'horreur à la vue du précipice, où conduisent naturellement de pareils principes?

Le Biblioth. Je fuis accoutumé depuis long-tems à ne rendre les armes qu'en Philofophe, quand il s'agit du raifonnement: Souffrez que je vous propofe un petit doute fur ces conféquences, que vous venez de tirer. Vous appuyez uniquement fur ces paroles: Et voilà fa vérité à lui toute trouvée. S'il n'avoit rien ajouté, ce que vous concluez fauteroit aux yeux. Mais il y a une modification, & Bayle dit de fuite: Il fuffit à un chacun qu'il confulte fincérement & de bonne foi les lumieres que Dieu lui donne, & que fuivant cela il s'attache à l'idée qui lui femble la plus raisonnable & la plus conforme à la volonté de Dieu. Avec cette modification fes principes conduifent-ils fi loin? Il s'agit ici de gens qui font dans la bonne

foi.

Le Docteur. Tout Philofophe que vous

êtes, vous vous laiffez aisément éblouir à de vaines apparences. Il s'agit, dites-vous, de gens qui font dans la bonne foi. Mais la queftion eft de fçavoir, fi chaque Particulier peut y être, en quelques circonftances qu'il fe trouve; fi chaque Particulier eft raifonnablement affuré que c'eft Dieu, qui lui donne ces lumieres qu'il confulte; & que c'eft à sa volonté infiniment juste qu'il se conforme, en s'attachant à cette idée qu'il fe forme lui-même, avec le fecours de l'efprit particulier. Vous verrez bien-tôt Bayle luimême détruire cette fuppofition. Mais, encore un coup, y a-t'il beaucoup d'Hérétiques qui foient dans la bonne-foi? Si Bayle n'accorde cette bonne-foi qu'à certains Particuliers; s'il prétend précisément qu'il fe peut faire, & qu'il arrive même, qu'il y ait des Hérétiques de bonne-foi dans un Pays où l'Héréfie régne feule depuis longtems, où l'on ne voit aucun Orthodoxe; où des Miniftres, regardés comme de vrais Apôtres, ne représentent l'Eglife Romaine que comme une Babylone & une proftituée, les Papes que comme des Antechrift, &c. S'il ne veut que cela, dis-je, il a déployé bien inutilement fa Rhétorique, pour prouver une chofe que des Docteurs Catholiques pourront peut-être ne lui contefter pas. Mais, je vous le demande, fon texte fe renferme t'il dans des bornes fi étroites? Au contrai

me un Payen & un Publicain celui qui n'é. coute pas l'Eglife. Arius, Socin & tous les adverfaires de la Divinité de Jesus-Chrift & de la Trinité, feront Orthodoxes à l'égard ́ de Dieu, parce qu'aux paffages qu'ils liront dans l'Ecriture, ils pourront donner un fens &fentir que ce fens eft véritable, & voilà leur vérité à eux toute trouvée. Quelques foibles reftes de Religion ne fuffiroient-ils pas, pour faire frémir d'horreur à la vue du précipice, où conduisent naturellement de pareils principes?

Le Biblioth. Je fuis accoutumé depuis long-tems à ne rendre les armes qu'en Philofophe, quand il s'agit du raisonnement: Souffrez que je vous propose un petit doute fur ces conféquences, que vous venez de tirer. Vous appuyez uniquement fur ces paroles: Et voilà fa vérité à lui toute trouvée. S'il n'avoit rien ajouté, ce que vous concluez fauteroit aux yeux. Mais il y a une modification, & Bayle dit de fuite: Il fuffit à un chacun qu'il confulte fincérement & de bonne foi les lumieres que Dieu lui donne, & que fuivant cela il s'attache à l'idée qui lui femble la plus raisonnable & la plus conforme à la volonté de Dieu. Avec cette modification fes principes conduifent-ils fi loin? Il s'agit ici de gens qui font dans la bonne

foi.

Le Docteur. Tout Philofophe que vous

êtes, vous vous laiffez aisément éblouir à
de vaines apparences. Il s'agit, dites-vous,
de gens qui font dans la bonne foi. Mais la
queftion eft de fçavoir, fi chaque Particulier
peut y être, en quelques circonftances qu'il
fe trouve; fi chaque Particulier eft raisonna-
blement affuré que c'eft Dieu, qui lui don-
ne ces lumieres qu'il confulte; & que c'eft
à fa volonté infiniment jufte qu'il fe con-
forme, en s'attachant à cette idée qu'il fe
forme lui-même, avec le fecours de l'efprit
particulier. Vous verrez bien-tôt Bayle lui-
même détruire cette fuppofition. Mais, en-
core un coup, y a-t'il beaucoup d'Héréti-
ques qui foient dans la bonne-foi? Si Bayle
n'accorde cette bonne-foi qu'à certains Par-
ticuliers; s'il prétend précisément qu'il fe
peut faire, & qu'il arrive même, qu'il y
ait des Hérétiques de bonne-foi dans un
Pays où l'Héréfie régne feule depuis long-
tems, où l'on ne voit aucun Orthodoxe;
où des Miniftres, regardés comme de vrais
Apôtres, ne représentent l'Eglife Romaine
que comme une Babylone & une proftituée,
les Papes que comme des Antechrift, &c.
S'il ne veut que cela, dis-je, il a déployé
bien inutilement fa Rhétorique, pour prou-
ver une chofe que des Docteurs Catholiques
pourront peut-être ne lui contefter pas. Mais,
je vous le demande, fon texte fe renferme
t'il dans des bornes fi étroites? Au contrai-

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re ne s'étend-il pas à tous les Particuliers, fans exception & fans restriction? Il eft de la portée de chaque Particulier. Il fuffit à un chacun, &c. Ces Particuliers font-ils Manichéens, Ariens, Sociniens, Anabaptiftes? Il n'en excepte aucun. Il n'excepte même aucune circonftance de lieux, de tems, de fociétés. Ainfi voilà tous les Hérétiques devenus Catholiques. Voilà leurs Patriarches mêmes Orthodoxes à l'égard de Dieu, dès-là que confultant fincèrement & de bonne-foi les lumieres qu'ils prétendront que Dieu leur aura données, ils auront donné un fens aux paffages de l'Ecriture, & fenti que ce fens eft véritable. N'eft-ce pas là donner tête baiffée dans le Quakérisme, & dans l'Enthoufiafme fanatique de l'efprit particulier ?

Le Biblioth. Encore un mot, de grace. Je viens de voir dans l'endroit que nous examinons, qu'il (a) n'exclut point la grace de l'acte qui nous fait adhérer aux vérités révélées. Et par conféquent Dieu fait que ce qui paroît vrai à ces ames finceres & de bonne-foi, foit en effet la vérité.

Le Docteur. Bayle, qui ménage infiniment les Réformateurs modernes, n'ofe condamner ni Luther, ni Calvin. Que disje? Il est fi indulgent & fi benin, que peu s'en faut qu'il ne préfére les () Sociniens

(a) Ibid. pag. 439

(b) Supplément du Comm. Philof.pag.sss.

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