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"maisons, ou dans celles des religieux, "dont les tréfors font perdus pour » l'Etat. La feule circulation fe fait chez » l'étranger; les cours de France, de "Parme, de Naples, & les dettes "nationales, enlevent le plus pur » de fon or. L'Efpagne n'ayant en » elle-même ni les reffources de la » nourriture, ni celles du vêtement, » l'induftrie de fes voifins abforbe tout » le profit; ils lui fourniffent à grands » frais les genres primitifs, tels que le » bled, les toiles, les draps, qui épui"font toutes les richeffes. Ceux qui » font monter les revenus de la cou"ronne à cent trente millions, » déduisent près d'un tiers pour arré» rages des dettes de l'Etat : auffi a-t-on » fouvent recours à de nouvelles im

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pofitions, qui tombent principale» ment fur l'induftrie; tant le fyftême » des finances lui eft contraire.

"C'eft en y établiffant un nouvel » ordre, que le fucceffeur de Philippe » V a voulu, comme je vous l'ai dit, fignaler les commencemens de fon » regne; mais avant que de parler de » cette opération, il faut dire un mot » des impôts établis dans ce royaume.

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» On divife leur produit annuel en »rentes générales, & en rentes parti» culieres. Les premieres font les doua»nes, les poftes, les indults fur les vaiffeaux qui font le commerce de » l'Amérique, la vente du tabac, du fel, du plomb, du vif-argent, le pa"pier timbré, &c. Les rentes provin»ciales, ainfi nommées parce qu'elles » ne regardent que les vingt-deux pro»vinces de la couronne de Caftille "comprennent plufieurs branches, & » entre autres le droit de dix pour cent » de chaque chofe vendue ou échan»gée. Il feroit poffible qu'un effet qui "pafferoit par beaucoup de mains, rap"portât au roi plufieurs fois fa valeur, » fans être exempt de payer encore à » l'avenir. Le clergé n'eft point foumis "à cette loi; les bénéficiers au con» traire jouiffent de divers privileges pour les chofes de confommation; "mais ceux qui n'ont point de biens " fonds, paient la taxe comme les au» tres fujets du roi, parce qu'alors ils > rentrent dans la claffe commune des » citoyens ordinaires.

» La feconde branche des rentes "provinciales eft le droit de millions.

» Ce n'étoit d'abord qu'une efpece de » don gratuit, qui ne devoit avoir lieu » que pendant quelques années; que » les befoins de l'Etat ont fait conti"nuer, & qui eft enfin devenu une » taxe perpétuelle. Le droit de jauge, » la dixme fur les productions de la » terre, & l'impôt de vingt-quatre »fols par feu, font d'autres charges » qui ont fouvent excité le cri géné»ral de la nation.

» Une partie de ces revenus eft employée, comme je l'ai dit, à payer » les intérêts des fommes empruntées » il y a plus d'un fiecle. La fubftance » deftinée à nourrir le corps politique, »fe trouvant par là détournée à d'au» tres ufages, il n'est pas étonnant qu'il » foit devenu foible, & incapable de » réfifter aux moindres accidens. On ne » s'est point appliqué à remédier à ce » mal, parce que ces dettes font fi con

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fidérables, qu'elles ont toujours dé» couragé les miniftres, & ont même » fouvent dégoûté des premieres pla» ccs, ceux qui auroient été les plus capables de les remplir. H a donc "fallu les confier à des hommes plus appliqués à leur intérêt propre, qu'à

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"celui de l'Etat ; & le peuple a fenti "feul tout le poids de cette mauvaife » adminiftration. On a créé de nou"veaux impôts; on a augmenté les an»ciennes taxes qui portoient prefque "toutes fur l'agriculture & le com» merce. Auffi voit-on les terres & les "manufactures abandonnées; les ou"vriers & les laboureurs fe lafiant de fupporter fans fruit un fardeau, que "perfonne ne partage avec eux. Le ma"riage même, loin d'être une des dou"ceurs de la vie, devient une charge » importune ; &, ce qui eft affreux à pen» fer, on tâche d'en diminuer le poids en » le rendant moins fécond; on évite de » donner des fujets à un Etat qui doit » les accabler de rigueur; & jufqu'au » milieu de leurs tranfports les plus vifs,

les maris veillent à écarter un enfant » de leur maifon, comme on éloigne » de chez foi un animal vorace.

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,, Le projet qui occupe aujourd'hui le gouvernement, eft celui d'un impôt,unique, d'une taxe tariffée & conditionnelle fous le nom de Cadafire. Le roi doit fonder une commiffion fpéciale, pour l'établiffement de cette nouvelle forme d'impofition. Les re

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,, cherches, les déclarations, les vérifi cations fur la valeur des biens & l'in,, duftrie de chaque particulier, fe fe,, ront aux dépens de Sa Majesté qui y ,, emploiera plus de vingt mille perfon,, nes, & un million de piaftres par an, Mais malgré les plus fages précautions ,, pour l'exacte observation de la juftice diftributive, je penfe qu'il s'y gliffera ,, encore bien des abus. Les intendans ,, ne pourront rien ftatuer, que fur les ,, rapports faits aux juges des divers diftricts, par les habitans chargés de ,, la collecte de leur paroiffe; & les haines, les amitiés, toutes les paffions joueront régulièrement leur rôle. On fuppofera un commerce à tel qui n'en a point, un gain à celui qui a perdu ; & les follicitations & le crédit ne perdront rien de leur vieille influence.

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Tous les jours on préfente des mémoires au roi, où l'on propofe quelque ,, projet nouveau à Sa Majefté. Plufieurs ,, ont été acceptés, & font déja entamés; mais on les fuit avec tant de lenteur ils font fi fouvent interrompus, qu'il n'y a pas d'apparence d'en voir jamais l'exécution. Dans un de ces mémoires,

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