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Il paroît que dans ces Plantes qui d'horizontales qu'elles étoient en fortant du mur deviennent verticales, l'action du Soleil eft affés marquée. C'est luy qui accourcit les fibres tournées de fon côté, & rappelle la Plante en enhaut, & fi quelquefois il ne fait pas cette impreffion fur elle, dés qu'elle paroît à l'air, c'eft qu'alors les fibres font encore trop aqueufes, trop molles, peu capables d'une contraction fuffifante.

La même chose arrive à toutes les branches, & appa remment par le même principe. Car naiffant du tronc comme tranfverfalement, elles fe redreffent au moins vers l'extrémité, & prefentent ainfi leurs fleurs & leurs fruits à la feve de l'air dans une fituation plus propre à la bien re

cevoir.

Rien ne prouve mieux combien les Plantes s'obstinent, pour ainsi dire, à la perpendiculaire, que ce que M. Dodart obferva un jour fur la defcente de Meudon à Chavil. le. Une tempête ayant abatu plufieurs jeunes Pins fur une pente, qui en differens endroits étoit differemment incli. née à l'Horifon, toutes les fommités de ces Arbres s'étoient relevées, de forte qu'elles étoient toutes perpendiculaires à l'Horifon, & elles faifoient par confequent differens angles avec la ligne de leurs tiges, felon que ces tiges étant couchées fur des plans plus ou moins inclinez, les fommi. tés devoient faire avec elles des angles plus ou moins grands pour être dans une fituation verticale.

Cette jufteffe fi Geometrique paroît étonnante, cependant il est affés naturel que le redreffement finiffe tout court à la perpendiculaire, parce qu'alors le Soleil, & peutêtre auffi d'autres caufes externes agiffent également de tous côtés fur la Plante.

Il femble par les principes de M. Dodart que les Arbres devroient être panchez du côté du Midy, puifque le Soleil agit plus fur eux de ce côté là que de celuy du Nord, mais cette inégalité d'action peut être effacée, & l'Arbre redreffé par le cours de la féve, qui tend toûjours à enfiler la perpendiculaire.

SUR

SUR LA FECONDITE

E

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Ncore une merveille affés expofée aux yeux de tout le monde, & peu obfervée, c'est la fecondité des Plan. tes, non pas feulement la fecondité naturelle des Plantes abandonnees à elles mêmes, mais encore plus leur fecondité artificielle procurée par la taille, & par le retranchement de quelques unes de leurs parties. Cette fecondité artificielle n'est au fond que naturelle, car enfin l'art du Jardinier ne donne pas aux Plantes ce qu'elles n'avoient point, il ne fait que leur aider à développer, & à mettre au jour ce qu'elles avoient. M. Dodart qui examine cette matiere, n'en donne encore aucun Systême Phyfique, il n'établit que les faits, mais il faut pour les établir du raisonnement & du calcul, parce qu'il n'eft pas tant question de ce qu'une Plante donne, que de ce qu'elle donneroit, fi on en tiroir tout ce qu'elle contient. Voici un exemple de la fecondité dont peut être un arbre en fait de graines feulement, qui font le dernier terme, & l'objet de toutes les productions de l'Arbre.

On fçait que tous les rameaux de l'Orme ne font que des glanes de bouquets de graine extrêmement preflees l'une contre l'autre. M. Dodart ayant pris au hazard un Orme de 6 poulces de diametre, de 20 piés de haut jufqu'à la naiffance des branches, & qui pouvoit avoir 12 ans en fit abatre avec un Croiffant une branche de 8 pieds de long, & negligeant les graines qui avoient été abatuës par les coups redoublez du Croiffant, & par la chute de la branche, fit conter ce qui en reftoit.

Il fe trouva fur cette branche

16450 graines. Il y a fur un Orme de 6 pouces de diametre plus de 10 branches de 8 piés, mais fuppofé qu'il n'y en ait que 10 ce font pour ces 10 branches 1700.

164500

I

V. les M. pag. 136.

Toutes les branches qui n'ont pas 8 piés, prifes enfem ble, font une surface qui eft beaucoup plus que double de la furface des 10 branches de 8 pies. Mais en ne la polant que double, parce que peut être ces branches moindres font moins fecondes, ce font pour toutes les branches pri

fes ensemble

329000.

Un Orme peut aisément vivre 100 ans, & l'âge où il a fa fecondité moyenne n'eft affurément pas celuy de 12 ans. On peut donc conter pour une année de fecondité moyenne plus de 329000 graines, & n'en mettre au lieu de ce nombre que 330000, c'est bien peu. Mais il faut multiplier ces 330000 par les 100 années de la vie de l'Orme. Ce font donc 33000000 graines qu'un Orme produit en toute fa vie, en mettant tout au plus bas pié, & ces 33 millions font venus d'une feule graine. Ce n'eft-là que la fecondité naturelle de l'Arbre, qui n'a pas fait paroître tout ce qu'il renfermoit.

Si on l'avoit étêté, il auroit repouffé de fon tronc autant de branches qu'il en avoit auparavant dans fon état naturel, & ces nouveaux jets feroient fortis dans l'espace de 6 lignes de hauteur ou environ, à l'extremnité du tronc

étêté.

A quelque endroit, & à quelque hauteur qu'on l'eût étêté, il auroit toûjours repouffé également, ce qui paroît constant par l'exemple des Arbres nains qui font coupez prefque rés piés rés terre.

Tout le tronc depuis la terre jufqu'à la naiffance des branches, eft donc tout plein de principes ou de petits Embryons de branches, qui à la verité ne peuvent jamais paroître tous à la fois, mais qui étant conçus comme partagez par petits anneaux circulaires de 6 lignes de hauteur, compofent autant d'anneaux dont chacun en particulier est prêt à paroître, & paroîtra réellement dés que le retranchement fe fera précisement au deffus de luy.

Toutes ces branches invisibles & cachées n'existent pas moins que celles qui se manifestent, & fi elles fe manifeftoient, elles auroient un nombre égal de graines, qu'il

faut par confequent qu'elles contiennent déja en petit. Donc en fuivant l'exemple propofé, il y a dans cet Orme autant de fois 33 millions de graines, que 6 lignes font contenuës dans la hauteur de 20 piés, c'est-à dire qu'il 15840000000 graines,

y a

& que cet Arbre contient actuellement en luy-même de quoy fe multiplier & fe reproduire un nombre de fois fi étonnant. L'imagination eft épouvantée de fe voir conduite jufque-là par la raison.

Et que fera-ce fi l'on vient à penfer que chaque graine d'un Arbre contient elle-même un fecond Arbre qui contient le même nombre de graines, que l'on ne peut jamais arriver ny à une graine qui ne contienne plus d'Arbre, ny à un Arbre qui ne contienne plus de graine, ou qui en contienne moins que le précedent, & que par confequent voilà une progreffion Geometrique croiffante dont le premier terme eft, le fecond 15840000000, le troifiéme, le quarré de 15840000000, le quatriéme fon Cube, & ainfi de fuite à l'infini? La raifon & l'imagination font également perduës & abîmées dans ce calcul immense, & en quelque forte plus qu'immenfe..

On trouvera que M. Dodart pour ne pas affecter le merveilleux, ou peut-être en l'affectant plus finement, a fait à l'égard de quelques articles les évaluations de la fecondité fur un plus bas pié, mais cette difference eft peu importante. Un calcul qui à toute rigueur seroit trop fort pour l'Orme, feroit beaucoup trop foible pour la Fougere, imcomparablement plus feconde en graines, & enfin de quelque ménage que l'on ufe, on arrivera toûjours à des nombres prodigieux, & à des miracles de Phyfique..

SUR LES PLANTES DE MER.

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I la Mer a fes Animaux tout differens de ceux de la V. les M., Terre, conftruits en quelque forte fur d'autres prin- P. 27% cipes, & fur d'autres idées de Mechanique, elle a auffi fes Plantes, fi differentes la plûpart de celles que la Terre

produit, qu'il n'y a guere que des yeux de Phyficien qui les puiffent reconnoître pour des Plantes. Le Corail, par exemple, n'a pas toûjours paffé pour en être une, les Eponges n'en ont guere l'air, & beaucoup de Plantes marines ne reflemblent qu'à des Pierres. Enfin la Botanique de la Mer n'a prefque rien de commun avec celle de la Terre.

M. de Tournefort qui a trop étudié la Botanique terreftre, pour ne pas embraffer auffi l'autre dans fes recherches, obferve que les Plantes qui naiffent au fond de la Mer, communément n'ont point de racines, ou qu'au moins les parties qui en font la fonction, n'en ont guere. la figure. Ces Plantes s'attachent à quelque corps folide, & l'embraffent par une espece de plaque trés liffe & tréspolie, qui ne jette aucunes fibres, & d'ailleurs le corps qui foûtient ces Plantes étant affés fouvent un rocher, ou un caillou, ne paroît pas propre à les nourrir. Il faut donc qu'elles fe nourriffent d'une façon qui leur foit toute particuliere, & qu'elles reçoivent par les pores de la furface exterieure de cette plaque, un fuc que peut fournir le limon épais & huileux du fond de la Mer.

Ce qui eft encore plus fingulier, c'est que dans la plûpart des efpeces on ne voit point de femences. On a même affés de peine à imaginer où elles pourroient se cacher, principalement dans les Plantes pierreufes, telles que les Coraux, & les Champignons de Mer,qui paroiffent plûtôt de veritables Pierres, que des Plantes, & dont la fub. stance trés dure & trés-uniforme ne femble pas permettre ny qu'il fe forme des graines au-dedans d'elles,ny qu’elles en fortent pour fe femer. Cependant ce font vifiblement des corps organisez, & organisez d'une maniere toûjours conftante, & par confequent leur generation doit être la même que celle de tous les autres corps femblables.

Cette loi de l'uniformité eft fi neceffaire, & fi inviolablement obfervée par la Nature, qu'il n'y a rien qu'on ne puiffe legitimement fuppofer, pour trouver des graines aux Plantes marines. Si on voit quelquefois fortir de

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