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Ere Chr.1258.

Cette idée fe réveilla bien autrement MOSTAR. l'année fuivante, lorsqu'il vit les Tar- Hégire 656. tares fe difpofer à attaquer Bagdet; le bouleversement que faifoient ces peuples dans les provinces dont ils l'emparoient, lui fit naître l'efpérance de voir changer fa condition. Comme au refle, quelque révolution qui arrivât, il ne pouvoit pas être plus mal qu'il l'étoit actuellement, il ne crut pas rifquer beaucoup de s'échapper de chez fon maître, & d'aller fe renfermer dans Bagdet. Il vit avec une grande fatisfaction les avantages que les Tartares remporterent d'abord fur les troupes du Calife, & il fut au contraire mortellement affligé, lorfque le bruit fe répandit dans Bagdet que la difette de vivres & de fourages alloit bientôt débarraffer la ville des troupes qui l'affiégeoient. Ce fut ce qui lui fit prendre le parti de fe fervir du moyen que je viens de rapporter, pour annoncer à Holagu une nouvelle qui le mettroit en état de continuer le fiége.

Auffitôt que ce Général eut reçu la lettre d'Amram, il ne manqua pas de l'envoyer demander dans la pla

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MOSTAZEM. ce. Comme on ne fe défioit point Hegite 66 de cet efclave, & que d'ailleurs on comptoit de jour en jour fur le départ prochain des Tartares, on ne fit pas difficulté de fatisfaire à la demande d'Holagu

Amram ayant été conduit en préfence de ce Général, le tira en effet d'inquiétude par la découverte qu'il lui fit des provifions confidérables, qui étoient cachées à Acoubah dans des espéces de cîternes. Holagu char gea à l'inftant quelques Officiers de confiance d'aller avec cet efclave, pour examiner fi ce qu'il venoit de dire étoit vrai. On trouva que le rapport étoit fidéle. Amram leur montra des cîternes profondes, dans lefquelles on avoit ferré une quantité prodigieufe de grains, qui fournit abondamment aux Tartares de quoi les dédommager deda difette affreufe dans laquelle ils étoient depuis quelque tems. Holagu charmé de cette découverte, garda Amram auprès de lui, & l'affura qu'il ne tarderoit pas à lui donner des preuves fignalées de fa reconnoiffance.

L'abondance rétablie dans le camp

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Ere Chr. 1258.

des Tartares, fit renaître leur coura- MOSTAZEM. ge. On reprit les attaques, & on les Hégire 656. pouffa avec une vigueur qui réduifit bientôt la place aux extrémités. Les affiégés fe défendirent toujours avec beaucoup de valeur. Aboubecre fils du Calife, fe fignala entre autres à la tête des troupes, & repouffa plufieurs fois les Tartares; mais ce Prince ayant été tué à la défense d'une des portes de la ville, fa mort jetta la confternation parmi les habitans, & dès-lors on ne fit plus que de foibles efforts.

Al-Cami voyant fa trahison fur le point d'avoir fon entier fuccès, ne voulut point rifquer de refter dans une place qui ne devoit pas tarder à être prise d'affaut. Il fortit donc de Bagdet avec fes deux enfans & plufeurs de fes amis, & alla droit au camp des Tartares trouver Holagu, qui le reçut avec amitié, & lui mit fa protection pour la fuite.

pro

A l'égard de Mostazem, on n'entendit nullement parler de lui dans ces extrémités. Ce Prince abruti par les plaifirs & les débauches, paffoit tranquillement fes jours dans l'inté

Le Vifir fe

rend auprès d'Holagu

MOSTAZEM. rieur de fon palais, fans s'inquiéter Hégire 656. du malheur affreux qui menaçoit fa perfonne & fon Empire.

Ere Chr. 1258.

Bagdet eft

Ce malheureux Prince fut cruelleprise d'affaut, ment puni de fa lâcheté & de fon indolence. Holagu ayant fait donner un affaut général, la place fut emportée. On fe faifit du Calife que l'on amena à Holagu ; & ce Général le fit garder à vue, jufqu'à ce qu'il eût exercé fur Bagdet les horreurs dont il l'avoit menacée. Il abandonna la ville au pillage pendant fept jours entiers, durant lefquels les Tartares furent étonnés eux-mêmes des prodigieufes richeffes qu'ils trouvoient de toutes parts. Le pillage ceffé, Holagu nomma Amram pour commander dans Bagdet,& dans toutes les dépendances de cette place. Ainfi fe vérifia le fonge que cet efclave avoit fait l'année précédente.

Molagu fait

& fon fils.

On tint enfuite confeil fur la conpérir le Calife duite que l'on tiendroit à l'égard de Moftazem, & il fut décidé qu'on le feroit mourir avec le fils qui lui reftoit. On commença donc par égorger le jeune Prince; mais le Calife fut traité avec plus de cruauté &

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d'ignominie. On l'empaqueta dans MOSTAZEM.
un feutre, où il fut lié très-étroite-Hégire 656.
Ere Chr.125&
ment; & dans cet état on le traîna
impitoyablement par toutes les rues
de la ville, jufqu'à ce qu'il fût expiré.
D'autres difent que le fils de Mofta-
zem effuya le même traitement. II
y en a qui rapportent qu'Holagu
imagina un autre genre de mort
pour ces Princes: ce fut de faire.
paffer fur eux fon armée entière, &
de les écrafer fous les pieds des che-
vaux. D'autres enfin difent que Mo-
fazem voyant Bagdet en proie à la
fureur des Tartares, crut pouvoir
fléchir Holagu en allant au-devant
de lui vêtu d'un manteau qui avoit
appartenu à Mahomet, & portant
dans la main le bâton du Prophéte;
mais cet appareil ne fervit de rien.
Le Général Tartare lui fit ôter le
manteau & le bâton, & ordonna
qu'ils feroient brulés dans un baffin,
& que les cendres feroient jettées
dans le Tigre ce n'étoit point par
mépris, dit-il alors, mais par refpect,
& pour empêcher que ces précieufes

*

*Voyez l'hiftoire de ce manteau Tom. 1. de sette Hiftoire, pag. 37.

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