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An de Rome 636

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Les Helviens, Helvi ou Helvii, s'étendoient dans le pays qui porte aujourd'hui le nom de Vivarais. Les Cévennes, suivant le témoignage de César (de Bello Gallico, 1. 7), séparoient ces peuples des Auvergnats, c'est-à-dire du Velai

mausensis, dont Pline étend de ce côté les limites
jusqu'à l'étang & jusqu'au château de Lattes, dési-
gnés alors sous le nom commun de Latera 5. Il en
était probablement de même de la ville massaliote
d'Agatha, située à quelque distance de la mer, sur
la rive gauche de l'Hérault qui lui servait de port.

La science en était là quand fut découverte,
<< vers l'an 17476» (MENARD), la célèbre inscription
géographique du musée de Nimes, qui n'est, comme
on le sait, qu'un catalogue de noms de lieux gravés
en toutes lettres & au nominatif pour la plupart,
sur un marbre d'apparence assez modeste. Ils étaient
séparés de distance en distance & à intervalles ré-
guliers par d'autres noms de lieu qui devaient
répondre à des localités plus importantes, car ils
étaient écrits en caractères beaucoup plus gros (&
au génitif cette fois), de manière à déborder légè-
rement du côté gauche la colonne des noms de lieux
secondaires, qu'ils divisaient de cinq en cinq lignes
par groupes réguliers de quatre noms. (Voir ci-con-
tre la photographie du monument.) Mais on avait
remarqué, dès les premiers jours, qu'aucun de ces
noms de lieu n'était ici suivi d'une indication de
distance énoncée en chiffres romains, comme elles
le sont presque toujours dans les Itinéraires & même
sur les bornes milliaires qui jalonnaient les routes

5 Est provinciae Narbonensis & in Nemausiensi agro stagnum Latera appellatum (PLIN. 1. 9, c. 9); - Castel:um Latera (MELA, 1. 2, c. 5). Les initiales du nom de Nimes (ol. avg. Nem.) que l'on a retrouvées sur des tuyaux de plomb à Balaruc-les-Bains, près du cap Setius. p ouveraient seulement que ces tuyaux avaient été fabriqués à Nemausus, par un plombier dont le nom est énoncé en toutes lettres après celui de la ville: Tiberinus, T. F..... I. F.

6 Onze ans, par conséquent, après la publication du premier volume des Bénédictins, qui n'avaient guère d'autre guide ici que la savante compilation d'Adrien de Valois (Notitia Galliarum, 1676), d'Anville n'ayant publié que beaucoup plus tard sa Géographie ancienne & sa Noti e de l'ancienne Gaule (Paris, 1760), où il touche très-discrètement à l'inscription de la fontaine (sub voc. Andusia, Sextantin, Ucetia & Ugernum). Une autre inscription, en caractères grecs, que l'on a regardée aussi comme une inscription géographique (E sai sur une inscription ceitique & sur une in cription latine trouvées à la fontaine de Nimes, par MM. GERMERDURAND & COLSON, p. 1-56), ne serait, suivant un celtiste contemporain, qu'une inscription votive dédiée par un Gaulois, du nom singulier de Garta Vidillan viacus, aux Matres Nemausenses, dont le culte & le nom à demi latin (Matrebo Namausikabo = Matribus Namausicabu) nous seraient compiétement inconnus à Nimes sans ce témoignage antérieur au temps d'Auguste. (Voir M. Ad. PICTET, Nouvel essai sur les Inscr. gaul. Revue archeol., année 1867, p. 1 à 12.)

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7 Nous songeons ici au miiliaire d'Alichamp (à quatorze lieues de Bourges), dont la colonne a six pieds de hauteur, & à celui de Tongres (l'antique Aduatuca, 1817), dont tous les noms de lieu sont suivis d'un chiffre de distance énoncé en milles dans la Gaule du sud (MIL; M; M. P), ou en lieues dans celle du nord (LEVG; L); il en est de même dans les trois Itinéraires de Cadès à R me, dont nous venons de parler. M. Walckenaer, qui l'appelle « une so te d'itinéraire gravé sur une borne miliaire » (éogr. ancienne, p. 183), n'avait certainement pas vu le monument, qu'il explique assez mal d'ailleurs.

& du Gévaudan, qui étoient anciennement de la dépendance de l'Auvergne. Les Helviens étoient compris dans l'étendue de la province romaine du temps de ce général; mais, par un privilége particulier, ils étoient soumis à un prince

actuel à onze noms de lieu, inconnus pour la plupart & alignés les uns au-dessous des autres sans un mot d'explication ou de commentaire 8.

Le judicieux Ménard, qui avait étudié ces noms de lieu sur le marbre antique peu de temps après la découverte du monument, ne doutait point, pour sa part, qu'ils n'appartinssent sans exception à l'Ager Nemausensis, comme on l'appelait à l'époque romaine, c'est-à-dire au territoire dépendant politiquement & administrativement de la Cité. Il en trouvait la preuve dans les noms déjà connus, ceux-là, d'VGERNVM (VGERNI) & de SEXTANT(io), que l'on avait remarqués de prime abord à côté de ceux d'VCETIA (VCETIAE) & d'ANDUSIA, qui représentaient, sans en pouvoir douter, les villes actuelles d'Uzès & d'Anduze, dont les origines se trouvaient ainsi reculées de plusieurs siècles". N'était-ce point d'ailleurs au centre & au chef-lieu de ce territoire que le monument avait été découvert, à quelques pas de la fontaine sainte où le culte du dieu Nemausus se trouvait associé, comme nous venons de le voir, à celui du divin Auguste"? Mais il lui semblait impossible, en examinant avec un peu d'attention

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Le monument lui-même, ainsi privé de sa base, n'a que vingt-quatre centimètres de hauteur sur douze ou treize de largeur & d'épaisseur.

9 Ménard, Histoire de Nimes, t. 1, p. 22 & suiv. t. 7, p. 216 & suiv.

10 Les notions qu'il présente pour l'ancienne géographie du pays le rendent important » (MÉNARD, t. 7, p. 226) ; & plus loin: tous ces différens lieux se trouvoient renfermés dans le territoire des Volces A écomiques, & étoient sous la principale dépendance de Nismes.» (l.l. p. 229.)

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Le nom d'Anduze (Andusia, Andu;a), ne reparaît, en effet, dans les monuments écrits qu'a i dixième & au onzième siècle de notre ère, & celui d'Uzès (Ucetia) ne remontait point au delà des Notitiae provinciarum, qui mentionnent pour la première fois le Castrum Ucecien e. (Voir pourtant M. de la Saussaye, qui lui attribue une monnaie celtique sur laquelle il a cru lire VCCETIO. Numism. de la Gaule Narb. sub roce Ucetia.) Il est vrai que ces deux petites villes, oubliées ainsi des itinéraires & des géographes, étaient situées dans les profondeurs des Cévennes, où les routes romaines n'auront été probablement frayées qu'à une époque plus récente. 12 Ménard nous apprend, en effet, qu'il « a été découvert vers l'an 1747, en creusant pour les fondations d'une maison, dans un champ situé sur le chemin de Sauve, près de la fontaine de Nismes » (t. 7, p. 226). Acheté peu de temps après par M. Esprit Fléchier de Saint-Julien, neveu du célèbre orateur, il a passé depuis dans le musée de Nimes, où il a été étudié, reproduit & commenté bien des fois.

criptions antiques". C'est ainsi que le célèbre autel de Rome & d'Auguste, au confluent du Rhône & de la Saône, avait été élevé par soixante cités de la Gaule chevelue (Voir une des notes suivantes), dont on lisait les noms gravés en toutes lettres (& au nominatif, à ce qu'il paraît,) sur la face 14 antérieure d'un second autel élevé en arrière & à quelque distance du premier 15.

Les noms à demi barbares que nous a conservés le cippe que nous venons de décrire auraient été, dans cette hypothèse, ceux des diverses localités qui avaient pris part à la fondation ou à la dédicace du monument situé, suivant toute apparence, sous le portique ou dans l'enceinte de l'Auguste um de la fontaine 16. Il ne serait même nullement impossible, en tenant compte de ses formes sévèrement simples & de la pureté des caractères de l'inscription, qui remonte incontestablement au plus beau temps de l'épigraphie romaine 7, d'en reporter la dédicace à une époque voisine de la fondation de l'Augusteum lui-même, construit, comme nous l'apprend une autre inscription très-mutilée aussi, par la RESPVBLICA NEMAVSESIV[m], c'est-à-dire par la population de la ville & par celle de son territoire 18, divisé toujours en vingt-quatre pagi.

13 Publice; * aere conlato, ex aere conlato, e slipe conlata, pass.

14 C'est au moins l'opinion de M. Auguste Bernard (Descr. du pays des égusiaves, p. 36 & pas›.), qui a cru retrouver un reflet sinon une copie de ce catalogue dans le chapitre VI des Notae Tironianae (GRUTER, t. 2, pars 2, sub fine), où les soixante cités (exactement cinquante-neuf) sont énumérées chacune par leur nom de peuple au nominatif, Aeduus, Ariernus, &c., & dans un désordre calculé peut-être. (Voir sur cette question, qui n'est rien moins que tranchée, un travail judicieux & exact de M. Félix BouRQUELOT, dans l'Ann. de la Soc. des Antiq. de France, p. 265 & suiv.)

15 Nous nous en tenons ici au texte littéral de Strabon, que l'on a essayé plusieurs fois de corriger & de compléter arbitrairement. (STRAB. 1. 4, c. 3. § t.)

16 Ménard, qui la croit dédiée au dieu Nemausus (1.1. p. 229), nous parait oublier que le diea Nemausus, quelque populaire qu'il fut à Nimes, était un dieu essentie lement local & urbain, dont le culte n'intéressait que de t ès loin les petites villes d'Ugernum & d'l cetia, tanais que celui des Augustes s'adressait, comme l'épigraphie nous l'atteste, à la population d'une cité & d'une province tout entière, que l'on voit célébrer, à frais communs, des sacrifices pour la guérison de tel ou tel empereur (Voir au tome I l'inscription du Taurobolium Provinciae Narb nensis, célébré à Narbonne en l'an 199 de notre ère), quelquefois même à celle de plusieurs provinces, comme nous l'apprend le célèbre autel de Rome & des Augustes, élevé près de Lugdunum par les trois provinces des Gaules (Ties Provinciae Galliarum, Tres Galliae).

17 Les caractères en sont très-beaux & bien conservés. » (MÉNARD, II. p. 226.)

18 A la suite des deux mots RESPVBLICA NEMÁVSESIV{m}, par lesquels commençait l'inscription, Ménard avait lu, sur les débris de la frise où elle était gravée en lettres de bronze doré hautes de sept pouces chacune », un certain

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de leur nation. Après la division de la Narbonnoise en deux provinces, ces peuples, quoique situés en deçà du Rhône, furent compris dans la Viennoise,

Ce serait ainsi, au nom de la Respublica Nemausensis déjà nommée sur le fronton du portique qui donnait accès dans l'Augusteum, qu'aurait été dédié notre cippe inscrit, dont on s'expliquerait de cette manière le laconisme exceptionnel & les énumérations sans préambule. Mais il faut supposer alors que les vingt-quatre pagi, réunis ou associés pour cette œuvre commune, se trouvaient ici divisés & répartis en nombre égal sur deux autels distincts dont un seul serait parvenu jusqu'à nous 1. La liste de leurs chefs-lieux, dont nous n'aurions ici que la moitié, & un peu moins de la moitié, puisqu'il manquerait un douzième nom à la pagina de notre piédestal, brisé au-dessus du socle qui lui servait de support, se continuait & s'achevait probablement sur un second autel de la même taille & de la même forme que le premier, surmonté comme lui d'une statuette allégorique, & qui figurait avec lui au-dessous ou à côté de la statue d'Auguste en bronze doré, dont on a retrouvé le soubassement encore en place au centre du terre-plein de la fontaine ".

nombre de mots tronqués, au milieu desquels il avait remarqué le nom très-reconnaissable de l'empereur Auguste: O... N... IMPERATORIS CA.. ARISTA... STI (t. 7, p. 67). Nous ne rappelons que pour mémoire l'essai malheureux de restitution tenté par M. Aug. Pelet, qui croyait l'inscription relative à Plotine & à Hadrien, fondateurs ou restaurateurs des bains de la fontaine, désignés ici sous le nom singulier de labrum. 19 Le capitaine Colson, qui croit l'inscription gravée tout entière sur la pagina d'un monument unique, paraît frappé en même temps du peu de largeur de ce piédestal, qu'il devenait difficile à ce titre d'allonger outre-mesure. Il en est réduit à supposer, comme Ménard, que la liste des localités associées ne dépassait pas quinze noms, en y comprenant celui de Nemausus; explication tout aussi arbitraire & beaucoup plus embarrassante que la nôtre, car on a quelque peine à s'expliquer dans quel but ces quinze localités, disséminées sur des points très-éloignés du territoire, se trouveraient ici réunies à l'exclusion des neuf autres.

20 C'est au soubassement de cette statue décorée de palmes & de rinceaux, dit Ménard, qu'appartenait probablement la belle inscription découverte en 1751 dans l'escalier semi-circulaire de la fontaine, évidemment restauré avec les débris de l'Augusteum & du Balneum. Elle était gravée dans les mêmes termes & dans le même ordre, sur deux dalles de marbre de la même taille, encastrées en sens opposé dans le massif du soubassement, qui atteignait à ce qu'il parait des proportions considérables:

IMP CAESARI DIVI-F
AVGVSTO COS-NONVM
DESIGNATO DECIMVM
IMP OCTAVOM

Nous ferons remarquer incidemment qu'el'e ne porte point de nom de dédicant, à l'inverse de notre cippe inscrit qui ne porte, lui, que des noms de dédicant, sans indication de destinataire. Surmontés de figures allégoriques à la façon des victoriolae qui flanquaient le grand autel de Lyon, tel que nous le représentent les monnaies du Kovov des Trois Gaules, nos deux piédestaux n'avaient pas de rotum à formuler ni de divinité à invoquer, puisque leurs inscriptions n'étaient que le complément & comme les pièces à l'appui d'un votum, énoncé solennellement & explicitement au-dessous de la statue.

Les noms écrits en gros caractères qui se détachaient de distance en distance de la colonne principale, représentaient, suivant toute apparence, les localités importantes du territoire qui aurait eu ainsi dès l'époque romaine ses petites villes & probablement ses chefs-lieux secondaires, disséminés autour de la métropole ". Celles d'VGERNVM (Beaucaire, Voir plus haut) & d'VCETIA (Uzès), les seules dont notre fragment nous ait conservé les noms, figurent encore aujourd'hui parmi les villes importantes de la circonscription géographique dont Nemausus est resté le chef-lieu. Les noms barbares & presque inconnus dont se compose la colonne principale répondraient, dans cette donnée, aux oppida ignobilia des vingt-quatre pagi de Strabon & de Pline". Mais il devenait beaucoup plus difficile, cette fois, d'en retrouver l'emplacement & d'en reconnaître les noms anciens sous des appellations contemporaines, altérées plus ou moins profondément par les transformations que l'idiome local a subies, en passant du latin au roman & du roman au français". La rareté des

2 Ils y sont de plus précédés chacun d'un point arrondi & profond, qui devait avoir aussi son sens & sa valeur. Ménard explique la forme génitive qu'ils affectent, en sous-entendant le mot castrum, que l'on retrouve, au quatrième siècle il est vrai, associé au nom d'Ucetia: Castrum Uceciense, alias civitas Uceciensis. (Notit. provinc. & civit. Gall. chez D. BOUQUET, t. 1, p. 224.)

En divisant, comme nous le proposons, le catalogue en deux séries de douze noms distribués & répartis dans le même ordre, le second cippe aurait, comme le premier, ses deux noms en majuscules placés l'un à la troisième, l'autre à la huitième ligne; de sorte que le catalogue aurait fini sur le second autel exactement comme il commençait sur le premier, par quatre oppida ignobilia. Rappelons incidemment, à propos de ces quatre noms en vedette, que les premiers magistrats de la curie étaient désignés, à Nimes, sous le titre exceptionnel de III viri iuri dicundo & de 1111 viri ab aerario.

23 De là l'intérêt exceptionnel de notre inscription, la seule, si nous ne nous trompons, qui nous ait conservé le catalogue, malheureusement incomplet, des circonscriptions géographiques du territoire d'une vile romaine, avec l'indication des localités plus ou moins importantes qui formaient les chefslieux de ces circonscriptions.

14 M. Germer-Durand, qui a repris dans ces derniers temps (1.1. pass.), après M. Léon Renier (Annuaire de la Société des Antiq. de France, année 1856, passim), ce travail d'attribution géographique commencé au siècle dernier par l'historien Ménard, croit retrouver, comme ce dernier, le lieu de TEDUSIA dans le village de Thésiers, canton d'Aramon (en roman Teziès, comme UCETIA, Uzès), & celui de Brugelia dans le village de Bruyès ou Bruieis, canton d'Aigaliers, dont les titres, il est vrai, ne remontent pas au delà du quinzième siecle. - VIRINN(ae?), qui occupe le huitième rang dans notre catalogue, aurait laissé son nom au village actuel de Védrinnes, près de Vauvert, au confluent du Vistre & du Rhony, comme VATRUTE, Vié-Cioutat aujourd'hui. aurait emprunté le sien à la rivière homonyme de la Troude, qui baigne le pied des hauteurs sur lesquelles l'oppidum était situé.

dont ils dépendent encore aujourd'hui pour le spirituel. Un ancien géographe met mal à propos ces peuples dans l'Aquitaine, dont certainement ils n'ont jamais fait partie.

débris & le peu d'importance des ruines que l'on rencontre sur le sol qu'ils paraissent avoir occupé sembleraient indiquer, comme Pline le laisse entendre, que la plupart d'entre eux en étaient restés à l'état de village 6, arrêtés dans leur mouvement d'expansion par l'ascendant que la ville paraît avoir pris d'assez bonne heure, & qu'elle a conservé pendant toute l'époque romaine.

Ce que l'on peut affirmer au moins, en s'en tenant aux indications fournies par notre catalogue, quelque incomplet qu'il nous soit parvenu, c'est que l'Ager Nemausensis avait conservé dans l'organisation définitive de la province une étendue que l'on ne s'expliquerait point sans l'importance territoriale & politique de l'ancienne nationalité des Volkes Arécomikes, à l'époque qui avait précédé la conquête. Il suffirait, pour en être convaincu, de rapprocher par la pensée, d'un côté les deux villes d'Ugernum & d'Andusia, situées aux deux extrémités de ce territoire; de l'autre, celles de Sextantio & d'Ucetia, dont les attributions ne peuvent pas être sérieusement contestées. En dépit des démembrements qu'il paraît avoir subis 27 d'abord par l'établissement de la colonie de Narbo Martius, à laquelle il avait fallu créer un territoire en terre ferme, plus tard par la fondation de la colonie de Baeterrae que paraît avoir suivie de près celle des villes latines de Cessero & de Sextantio 28, il s'étendait encore de la rive gauche du Rhône (Ugernum) jusqu'à la rive droite de l'Hérault, qu'il atteignait vers ses sources par la ville celtique d'Andusia. La ville grecque d'Agatha, située, comme nous l'avons dit, à l'embouchure du fleuve, devait appartenir aussi à l'Ager Nemausensis dont aucune indication formelle ne le

25 Sicut XXIII (oppida ign bilia) Nemausiensibus a!tributa. (PLIN. I. 3, c. 4 [5].)

26 Ouverts en pleine campagne (vici), fortifies de fossés & de retranchements en terre (oppida), sur les hauteurs ou au confluent des rivières (condate, becco), qu'ils paraissent avoir recherché de préférence.

27 Nous avons déjà remarqué que ces démembrements paraissent avoir porté plutôt sur les territoires annexés, par voie de conquête ou de traité, à l'Ager Volcarum, que sur le territoire immédiat de la nation qui aurait conservé jusqu'au quatrième siècle ses limites à peu près exactes, & probablement ses circonscriptions intérieures.

28 La ville de Sextantio (alias Substantio, Sostantio, &c.), qui parait avoir possédé le jus latinum & même le titre honorifique de colonie, comme semblent l'indiquer plusieurs inscriptions archaiques découvertes à Murviel (Sextantio ?)) & à Castelnau, près Muviel (HERZ. Gall. Narb. p. 125, & App. n. 87-88). l'aurait perdu de très-bonne heure, s'il faut en juger par notre inscription, confirmée à son tour par le témoignage officiel de Pine (... a Commentariis Agrippae), qui ne la mentionne plus parmi les villes latines de la Province.

distingue. Du côté du nord, où il confinait avec ceux des Albenses & des Gabali, il s'étendait sans interruption jusqu'à l'Ardèche & aux monts Lozère, car ce n'est que sous Honorius, à la fin du quatrième siècle, que le territoire d'Ucetia, érigé en Civitas, a été détaché de l'Ager Nemausensis, auquel il avait appartenu jusqu'alors. Pline, qui écrivait peu de temps probablement après la rédaction de notre catalogue, attribue formellement cette chaîne de montagnes à la Provincia Nemausensis, comme il l'appelle peut-être avec intention 29.

30

Du côté du sud où il était borné par la mer, bordée ici d'une chaîne continue d'étangs & de lagunes, les seules localités indiquées d'une manière un peu précise par les écrivains anciens sont, avec le Castellum Latara ou Latera (Voyez plus haut), le cap & la montagne de Cette, situés en face de la presqu'île & de la petite ville de Mèze (sur l'étang de Thau) 1o, & la bourgade de Magalona qui doit remonter, comme celle de Mansa, à l'époque celtique. Les comptoirs massaliotes qui paraissent avoir jalonné ce double rivage à une époque antérieure", avaient déjà disparu dès le temps de Méla, qui expliquait la rareté des villes sur cette côte, par l'absence de ports & par le caractère inhospitalier de la plage, battue tour à tour par le Circius & par l'Africus. [E. B.]

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19 Laus caseo Romae..... e provinciis, Nemausensi praecipua, Lesurae Gabalicique pagi. (PLIN. l. 11, c. 42. D. BOUQUET, t. 1, p. 60.)

30 Que Méia parait confondre, pour le remarquer en passant, avec le cap Setius..... Mesa collis, incinctus mari pene undique ac nisi quod angusto aggere continenti annectitur, insula. (MÉLA, 1. 2, c. 5.)

31 Consulter à ce sujet un passage fort altéré d'Avienus (Ora maritima, vers 610 & suiv.), où figurent les noms grecs de Polygium & de Naustalo, qui ont suggéré bien des conjectures aux géographes modernes. (UCKERT, Geogr. der Griech und Roem. Weimar, 1832, p. 412, seqq. & M. de SAULCY, Étude topographique sur l'Ora maritima d'Avienus; Revue archéologique, année 1867, p. 8o & suiv.) - De nouvelles découvertes de bas-reliefs & d'inscriptions grecques du meilleur temps (Voir M. GERMER-DURAND, Découv. archéol. de l'année 1869, p. 64 & suiv.), ont ramené récemment l'attention sur la petite ville de Saint-Gilles, que les géographes du dernier siecle confondaient avec l'antique Héraclée du Rhône (Voir ETIENNE DE BYZANCE, sub voce, & PLINE, 1. 3, c. 4), qui existait encore à l'époque romaine, comme le prouvent d'anciennes inscriptions latines découvertes sur l'emplacement qu'elle occupe toujours. Celle de Calun (Kakov[?]) ne nous est connue, au contraire, que par des documents de date récente, qui la désignent tantôt comme un cours d'eau tributaire des Fossae Marianae, tantôt comme une ville voisine de Sextantio & d'Agatha. (Anonym. Ravenn. 1. 5, D. BOUQUET, t. 1, p. 121, 122.)

An de Rome 636

An de Rome 636

t. 1, p. 61.

La ville principale des Helviens étoit Alba Helvorum ou Helviorum, ou Alba Helvia & Alba Augusta, qu'on croit être la ville d'Alps', située à deux lieues au nord-ouest de Viviers. Cette ville, qui jouissoit du droit latin2, étoit autrefois fameuse par la quantité & la qualité des vins que produisoit son terroir, mais surtout par un plant de vigne qui, au rapport de Pline3, fleurissoit en un jour & dont on se servit ensuite dans le reste de la Province. Le siége épiscopal fut d'abord établi dans cette ville & y subsista jusqu'à ce qu'ayant été entièrement ruinée par Crocus, roi des Allemands ou des Vandales, il fut transféré à Viviers. Les plus anciennes notices des cités des Gaules ne font mention que de la ville d'Alps ou Albe, sous le nom de Civitas Albensium. Les notices postérieures ajoutent ces mots : nunc Vivarium ou Vivaria, ce qui prouve que Viviers, qu'on ne connoît que par ces notices, ne devint capitale du pays qu'après la destruction d'Albe, c'est-à-dire après le commencement du cinquième siècle.

La ville du Bourg-Saint-Andéol portoit, suivant le martyrologe d'Adon, le nom de Gentibus dans le temps que ce saint y fut martyrisé, au second siècle de l'ère chrétienne; d'autres prétendent, avec plus de vraisemblance, que la ville du Bourg n'est point différente du lieu appelé Borgagiates, Burgagiates & Bergoitas dans les anciens titres de l'église de Viviers. Tous les pays dont on vient de parler faisoient partie de l'ancienne Province Narbonnoise & étoient situés en decà du Rhône.

« On croit communément, dit Millin', que
Viviers est situé dans l'endroit où était Alba Hel-
viorum, appelée aussi Alba Augusta, & qui était
la capitale des Helvii'. Mais d'Anville n'adopte
pas cette opinion, & il place, avec Lancelot, Alba
Augusta dans le lieu où est aujourd'hui Aps, à
trois lieues de Viviers, où l'on rencontre de nom-
breux débris d'antiquités. » C'est aussi l'opinion
des Bénédictins.

Le sol de Viviers, cette ancienne métropole des
Helvi, n'est séparé, au midi, du lieu d'Aps que
le torrent de Scoutai. Du sommet du roc ba-
par
saltique, sur lequel est assis le château, la vue erre
́au nord sur une petite plaine coupée par quelques
monticules, sous lesquels gît la ville romaine. Ils
sont presque tous plantés en vignes; quelques ar-
bres poussent péniblement leurs racines dans des
ruines infertiles. Si l'on trouve dans le village
quelques inscriptions encastrées dans les murs, elles
y ont été portées par les propriétaires du sol qui
les recélait. Sous cet aspect, Aps ne peut être re-

Voyage dans les départements du Midi, t. 2, p. 113 & suiv.

⚫ Adrien de Valois, Notitia Galliarum, p. 245.

gardé que comme le musée d'Albe. L'étendue de cette ville était fort grande, si l'on en juge par les monuments qu'on trouve au nord & au couchant dans un rayon de près de deux kilomètres. Un quartier du territoire d'Aps, baigné par le Scoutai, est connu sous le nom de Palais. C'est dans ce quartier qu'on trouve surtout des médailles, des plaques de marbre, quelques statuettes en bronze, des débris de tuiles, des clefs romaines, des morceaux de poterie, des lampes, des vases à parfums, & jusqu'à des tas d'écailles d'huîtres. Pendant l'été de 1810, un propriétaire fouillant dans son champ aperçut des cellules carrées régulières, pavées d'une mosaïque grise. On croit que ce local était occupé par des bains où l'eau était portée du village élevé de Saint-Pons, voisin d'Aps, au moyen de tuyaux en plomb. On a trouvé, dans ce dernier lieu, un de ces tuyaux orné d'une inscription romaine & dirigé des bords d'un ruisseau vers Alba Helviorum. [E. M.]

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