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Gouverne ment Malais.

Empire du

bow.

CHAPITRE XVII.

Gouvernement Malais. Empire de Menang-
cabow. Etendue de la puiffance ancienne
& actuelle du Sultan. Ses titres. Litté
rature & Arts parmi les Habitans. Epo-
que de leur converfion au Mahométifme.
Acception générale du mot Malais.
Conftitution des Etats. Bencoolen. In-
drapour. Anac Songey. Palembang.
Jambee, &c.

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JE vais maintenant donner une idée des Gou-
vernemens Malais, comme étant diftingués de
ceux des Sumatranois originaires, auxquels les
Malais donnent le nom d'orang ooloo ou payfans,
& quelquefois celui d'orang doofoon ou villa-
geois, parce qu'ils habitent dans les villages.

Le principal fiège de l'Empire des Malais & Menangca. de toute l'île, eft Menangcabow. Il est fitué à-peuprès au centre de l'île; s'étendant au nord, mais principalement au fud de la ligne, environ foixante à cent milles. Telles font les limites actuelles d'une Monarchie qui n'avoit anciennement d'au

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tres bornes que l'île même, & dont le Souverain étoit refpecté jufques dans les parties les plus lointaines de l'Orient. Le Pays eft, généralement parlant, une vafte plaine, bornée par des montagnes, dénuée de bois, & bien cultivée, en comparaifon des autres. Il a une communication aifée avec les deux côtés de l'île; il eft plus près de la côte à l'oueft, mais à l'eft il a l'avantage de plufieurs grandes rivières, telles que Racan, Indergeree, Siack, Jambee, & même Palembang, avec laquelle on affure qu'il communique par le moyen d'un lac, d'où fortent les deux dernières, ainfi que la rivière Cattown du côté eppofé. Les Colonies des Malais de Menangcabow, font établies fur diverfes branches de la rivière Jambee, ou plutôt fur ces petites rivières qui s'y jettent, favoir Leemoon, Battang Aly, Pacallang-Jamboo, & quelques autres. Ils y ramaffent une grande quantité de poudre d'or.

Le nom de Menangcabow vient, dit-on, des mot's menang, vaincre, & carbow, bifon; & cela, d'après l'hiftoire,'que je crois fabuleuse, d'un fameux combat, entre les bifons & les tigres, dont ce pays fut le théâtre, & dans lequel les premiers remportèrent une victoire complète. Tel eft le récit des Naturels; mais je dois obferver qu'ils aiment fingulièrement les fictions; & je pense que cette étymologie n'a d'autre fondement qu'une ref

Puiffance du Sultan,

1

femblance accidentelle dans le fon des mots (1).
La puiffance actuelle & les reffources du Sul-
tan font à peine au - deffus de celles d'un Raja
ordinaire. Cependant il maintient encore tous fes
anciens droits & prérogatives, qui ne lui font
point difputés, tant qu'il ne cherche pas à les
foutenir par la force. Les Rois d'Acheen, d'In-
drapour, de Moro Moco, de Palembang & de
Jambee, reconnoiffent tenir de lui leur autorité,
comme étant leur Seigneur fuzerain; quelques-
uns lui payent même un foible tribut de politeffe ;
mais ils font néanmoins absolument indépendans
de lui. Sa perfonne eft facrée, & l'obscurité &
l'air de mystère qui environnent fa Cour, joints à
l'influence des Prêtres Mahométans, qui le regar-
dent comme le Chef de leur Religion, entretiennent
cette vénération. En un mot, fon autorité peut
être comparée à celle qu'avoient en Europe, il
n'y a pas long-temps, les Souverains Pontifes:
étant fondée fur une opinion fuperftitieuse, elle
épouvante le foible; mais le puiffant s'en moque.
Ce Prince tâche de faire ce que des armées feules
pourroient effectuer de
, par

pompeux

édits, qui

(1) Quelques Géographes ont placé Menangcabow au centre de la Prefqu'île de Malacca, au lieu de

l'île de Sumatra.

font reçus avec des démonftrations extérieures du plus profond refpect, mais qui ne font exécutés qu'autant qu'ils s'accordent avec les intérêts politiques des Princes auxquels il les adreffe. L'Empire de Menangcabow fubfifte, felon les Sumatranois, depuis la plus haute antiquité; mais comme ils n'ont ni annales, ni registres, ni aucun autre document hiftorique, il eft impoffible de déterminer fon origine, même par approximation. Il n'y a pas de doute qu'il ne foit très-ancien, puifqu'il en porte les preuves, & qu'il est reconnu pour tel par la tradition. Quand les Européens le vifitèrent pour la première fois, il étoit déjà dans fon déclin, comme on le voit par l'im portance & l'indépendance dont jouiffoient dèslors les Rois d'Acheen, de Pedeer & de Pafay, dont le premier obtint du Sultan de Menangcabow la conceffion de la côte de la mer jufqu'à Bencouten, quoique fon autorité en 1613 ne

s'étendît pas au-delà de Barros, & que fes prétentions n'aillent pas actuellement plus loin que Padang.Tous les anciens Navigateurs qui fréquen tèrent cette île, parmi lefquels le plus intelligent & le plus exact étoit certainement le Capitaine Beaulieu, qui y vint en 1620, parlent de Menangcabow, foit directement, foit indirectement, comme d'un pays de la plus grande importance, principalement à caufe du coinmerce de l'or, que

Habitans faifoient prefque feuls, & parce qu'il fourniffoit les pays voifins de cris, d'armes à feu, & d'étoffes. Comme ils ne pouvoient pas avoir des liaisons immédiates avec aucune Puiffance de l'intérieur, & que les Princes avec qui ils avoient des relations de commerce ne vouloient pas faire connoître les richeffes d'un autre Etat, dont la comparaifon avec le leur eût pu leur être défavantageufe, les defcriptions que ces Navigateurs nous ont données de cet Empire font obfcures & imparfaites, & fans l'or qu'on en tranf portoit fur les côtes de la mer, il eft probable qu'ils n'en auroient fait aucune mention. Beaulieu parle des Rois d'Acheen, de Palembang, & d'Indrapour, comme de Souverains indépendans; mais puifque ces Princes reconnoiffent tenir du Roi de Menangcabow leur autorité, cela prouve feulement qu'ils avoient alors fecoué le joug d'un Empire déjà déchu de fa grandeur, & penchant vers fa ruine (1).

(1) Voici ce que j'ai trouvé fur le Royaume de Menangcabow dans les Auteurs, en différens temps. «< Sumatra, grande & belle íle, dont la ville principale est Pedir, enfuite Pacem, Achem & Campar. Au centre eft Menancabo, qui eft la principale fource de l'or». Odardus Barbofa, 1519, dans Ramufio. << On fait

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à Menancabo d'excellens poignards, appelés cris,

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