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tre fa dignité & celle de fes nobles, ou des autres Princes, le Sultan de Menangcabow aime mieux, par cettè politique, laiffer la mesure de fon importance indéfinie, & en même temps épargner fa poudre. Il faut obferver que les Malais en général aiment extrêmement à tirer le canon; ce qu'ils ne négligent jamais de faire dans les jours de grandes, fêtes & dès qu'ils apperçoi vent la nouvelle lune, celle fur-tout qui marque le commencement de leur pooaffo, ou fête annuelle. Lejaune étant regardé comme une couleur royale, le Sultan & fa Cour portent toujours & exclufivement à toute autre des habits de cette cou→ leur. Son préfent ordinaire, quand il envoie quelque Ambassadeur, (car aucun Sumatranois n'imagine pouvoir faire une demande formelle, en quelque occafion que ce foit, fans offrir un présent) est une ou plufieurs paires de chevaux blancs; comme étant l'emblême de la pureté de fon caractère & de fes intentions. Tous ceux de la famille royale, & plufieurs même qui n'ont aucun droit à ce titre, font traités, par-tout où ils vont, non-feulement avec le plus profond refpect, mais encore, dans quelques parties de l'île d'ailleurs indépendantes, avec une telle vénération, que les Habitans fe-laiffent infulter, voler, & même battre par eux, fans faire la moindre réfiftance, qu'ils regarderoient comme

Littérature.

une profanation dangereufe, approchant du facrilége (1).

Comme les autres Sumatranois, les Habitans de Menangcabow n'ont aucun registre ou annales: au moins nous n'en avons jamais vu la moindre trace dans les diverfes négociations que nous avons eues avec eux. Ils font très-experts dans l'art d'écrire en caractères Arabes; mais toute leur littérature ne' confifte qu'en extraits du koran, & en cabars ou Contes hiftoriques, qui reffemblent beaucoup à

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(1) Un de ces Princes, qui s'appeloit Jeanderpatooan Siri Hamet Shah, héritier de l'Empire de Menangcabow, en conféquence de quelque différend qu'il eut avec les Hollandois, vint s'établir chez les Anglois à Bencoolen, en 1687, à fon retour d'un voyage dans le Lampoon ; & comme il étoit fort confidéré des gens du Pays, il gagna toute la confiance de M. Bloom, alors Gouverneur. Il opprima quelques-uns des Chefs voifins, qui étoient mal intentionnés pour les Anglois, & particulièrement Raja Moodo de Songey Lamo, & un Jennang (Lieutenant) du Roi de Bantam: il fit battre une monnoie, appelée petees, établit un marché, & écrivit une lettre à la Compagnie, lui promettant de la mettre en poffeffion du commerce de toute l'île. Mais peu de temps après, on découvrit qu'il avoit formé le projet de détruire l'établissement,

en conféquence, il fut chaffé de Bencoolen. Les mémoires font mention de troupes levées contre lui, quelque tems après, par le Sultan d'Indrapour.

nos anciens Romans, mais dans lefquels on trouve bien moins de naïveté. Ils font fameux pour la compofition des chanfons, appelées pantoon, dont j'ai parlé ci-deffus. Elles font répandues dans toute l'ile, & quoiqu'on en compofe également dans plufieurs autres parties, les leurs tiennnent le premier rang, comme venant d'un lieu plus favorifé des Muses.

Les arts

en général font portés parmi eux à un plus grand degré de perfection, que chez les autres Naturels de Sumatra. Les Malais font les feuls qui font les ouvrages de filigrane en or & en argent, dont nous avons donné une defcription particulière. Menangcabow a auffi été célèbre par fon grand trafic en or, étant placé au milieu des mines d'où il eft principalement tiré. On y fait beaucoup de toile, qu'on exporte hors de l'île. Dès les premiers temps, les Habitans ont manufacturé des armes à feu, pour leur pre ufage, & pour fournir à ceux de la partie Septentrionale de l'île, qui font les plus guerriers; & cette branche de commerce fubfifte encore alljourd'hui ils fondent, forgent & préparent euxmêmes le fer & l'acier. Je ne puis fixer l'époque où ils ont commencé de jeter en fonte des canons, & fait des armes à feu; mais s'ils ont appris cet art des Européens, ce dont il y a raifon de douter, ils doivent l'avoir appris bien promp

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pro- feu.

Toile,

Armes

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tement, puifque les premières relations des Por tugais difent qu'ils en faifoient ufage. Ils n'ont que des fufils à mêche, fatinga, n'ayant point adopté l'ufage des chiens & de la pierre à feu (1): leurs canons font d'une bonne trempe, & d'un calibre excellent, comme on peut en juger par la jufteffe avec laquelle ils vifent. En confidérant les grandes difficultés qui accompagnent les procédés qu'exigent les diverfes préparations du fer, je ferois. porté à croire, nonobftant les affurances qu'on m'a données du contraire, qu'ils ont tiré leur acier des Nations occidentales; mais outre que je fais que la petite quantité de cet article qui eft aujourd'hui importée d'Europe, ne peut nullement fuffire à leur confommation, il est évident que leurs cris & autres armes blanches, font faits d'une efpèce d'acier, entièrement différent des nôtres ; & il n'eft pas douteux qu'il ne foit Poudre à de leurs propres manufactures. Ils font de la poudre en grande quantité; mais foit par défaut de proportion dans les ingrédiens, foit parce que la granulation en eft imparfaite, elle est Armes blan, très-foible. Outre les fufils, leurs armes font le coojoor ou lance, le roodoos, le calewang,

tirer,

ehes

le

(1) Ils appellent les fufils frappan, des Hollandois, qui peut-être ont été les premiers qui s'en font fervis, dans l'Inde,

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buddil, le pamandah, le fewar & le cris, qui font, pour la plupart, d'une forme entre celle d'un cimeterre & d'un couteau; quelques-unes, comme le roodoos, qui eft une espèce d'épée courte & large, & le calewang, font pendues au côté, & les autres placées fur le devant, dans un ceinturon qui paffe plufieurs fois autour du corps. Le fewar eft un petit inftrument comme un ftylet, dont ils fe fervent fur-tout pour les affaffinats. Le cris eft une espèce de poignard, Cris d'une conftruction particulière, porté par toutes

les claffes d'Habitans. La lame a quatorze pouces de long, & l'acier en eft d'une trempe extrêmement dure. Elle n'eft ni unie, ni polie comme les lames de nos armes ; mais, par un fingulier procédé, elle offre l'apparence d'une compofition dans laquelle on apperçoit les veines d'un métal différent. Elle n'eft pas droite. comme celle d'une épée, ni courbée uniformément; mais comme une ligne courbe à inflexion, ou telle que l'épée flamboyante que les Peintres nous repréfentent dans la main de l'Ange qui garde les portes du Paradis terreftre. Il eft probable que cette forme de lame du cris rend fes bleffures plus dangereufes. Le manche ou la poignée eft ordinairement d'ivoire, ou de bois d'une belle veine (1), ornée d'or, ou d'une compofition de

(1) En quelques endroits ils emploient le corail

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