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CHAPITRE XIII.

Remarques & éclairciffemens fur les Loix
& Coutumes. Manière de plaider. Nature
du témoignage. Serment. Succeffion
Profcription. Vol. Meurtre, & compen-
fation pour le meurtre. Récit d'une
relle. Dettes. Efclavage.

que

LE code précédent, d'Addat, ou Coutumes Remarquen

précédentes,

du pays, étant rédigé pour l'ufage des Naturels fur les Loix ou des perfonnes bien inftruites de leurs mœurs on général, & préfenté non comme une expli

Tome 11.

A

Manière de plaider.

cation des coutumes, mais fimplement comme une règle de droit, on n'y a employé que le moins de mots poffibles; & de là vient que plufieurs endroits doivent être obfcurs pour la plupart des lecteurs. C'eft pourquoi je vais revenir fur les paffages qui ont befoin d'explication, & tâcher de développer l'efprit & l'effet de celles de ces Loix fpécialement qui femblent le plus contraires à nos idées de juftice diftributive. Ce commentaire eft d'autant plus néceffaire, qu'il eft évident que quelques-unes de ces Loix, qu'on a régardées comme contraires à la profpérité des Habitans, ont été altérées & corrigées par les perfonnes éclairées qui agiffoient comme repréfentans de la Compagnie Angloife. Je dois tâcher de rappeller l'idée des inftitutions originaires.

Le demandeur & le défendeur plaident ordinairement leur propre caufe; mais fi les circonftances les en empêchent, ils peuvent pinjam mooloot, emprunter une bouche, ainfi qu'ils s'expriment. L'avocat peut être un Proatteen, ou toute autre perfonne indifféremment : fon ministère est gratuit; cependant celui qui gagne la caufe lui donne ordinairement une gratification, que les Proatteens ne manquent jamais d'exiger rigoureufement de leurs cliens, quand leur conduite n'eft pas furveillée. Le Proatte en qui fe rend caution des dommages reçoit aufli en particulier,

quelque récompenfe; mais il n'y a nul falaire fixé & d'obligation.

Témoigna

Le témoignage eft employé, parmi ces Peuples, d'une manière bien différente de celle ge. ufitée dans nos Cours de Justice. Ils n'y admettent jamais les deux parties, & le témoin ne fait pas d'abord ferment de dire la vérité. Quand il s'agit d'établir un fait, foit du côté du demandeur, foit du côté du défendeur, on lui demande s'il peut produire quelque témoignage qui certifie la vérité de ce qu'il avance. Sur fa réponse affirmative, il eft fommé de nommer la perfonne. Ce témoin ne doit pas être parent, ni partie intéreffée, ni même habitant du même village; il doit être folvable, ayant famille, & un domicile fixe : à ces conditions, fon témoignage peut être reçu. Le fait à prouver lui eft expofé; s'il le confirme, il ne lui refte plus, ainsi qu'à la partie intéreffée, qu'à faire ferment qu'il a dit la vérité; & c'est ainfi que le fait est établi. Ils ont une règle touchant la partie qui doit produire le témoignage. En voici un exemple. A pourfuit B en juftice pour dettes; B nie la dette; A eft alors obligé de prouver par témoins la dette; finon, B peut fe libérer de la dette. en jurant qu'il ne l'a point contractée. Si B'reconnoît que la dette a autrefois exifté, mais qu'elle a été payée, c'est à lui de prouver, par

Serment.

témoins, le paiement; finon, A doit confirmer l'existence de la dette par fon ferment. C'est un ufage invariable, obfervé dans tous les cas où il eft queftion de propriété.

Comme leur maniere de rendre témoignage diffère de la nôtre, la nature du ferment diffère auffi parmi eux de l'idée que nous nous en fommes formée. En plufieurs cas, ils font obligés de jurer pour des faits qu'il n'eft pas poffible dans la nature des chofes qu'ils fachent être vrais. A pourfuit B en juftice pour une dette contractée par le père ou le grand-père de B envers le père ou le grand père de A. Les parties fuppofées contractantes font mortes, & il n'exifte aucun témoin du fait. Comment décider l'affaire ? Il refte à Bà faire ferment que fon père ou fon grand-père ne fut jamais débiteur de celui de A'; ou que s'il le fut, la dette a été payée. Cette manière de décider les caufes feroit regardée parmi nous comme bien étrange; mais chez eux, il faut abfolument quelque chofe de femblable. Comme ils n'ont aucune espèce de comptes écrits, ni rien qui tienne lieu de journal ou de registre, il feroit abfolument impoffible aux demandeurs, dans une infinité de cas, d'établir la dette par une preuve pofitive; & s'ils étoient déboutés de leur demande, comme chez nous, faute de preuves, plufieurs d'entreux perdroient des dettes réelles, par la malhonnêteté des débiteurs, qui ne manqueroient pas de les nier. D'un autre côté, s'il n'étoit pas

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