Imágenes de páginas
PDF
EPUB

138

CY

COMMENCE

A

LE MONOLOGUE

DE

LA BOTTE

DE FOING.

OUS femble-il point que pour dan

cer,

Flufter, ou pour parolles faintes, Pigner, mirer, ou s'agencer, Ung homme fe peult advancer à fes attainces? parvenir Vous femble-il que pour mignotis · Aubades, virades, & tours, Entre nous mignons fringantis, Plaifans, gorgias, & fain&tifz, Puiffions jouyr de noz amours? Eft-il poffible pour fervir, Reveille matin, ou aubade, La grace s'amye deffervir? Sequin fequet fans mal fentir, S'esbatre pour une paffade,

Eft-il poffible d'avoir bruyt Pour bagues, gorgiasetez,

Bailler aux Dames le deduyt
Ferme comme ung fanglier en ruyt
A faire les joyeusetez?

[ocr errors]

De francz courages & voulentez, Soyez enclins & appreftez, Franc pour dire qui eft ceans Bavés, gallez, raillez, faillez, Et puis on dira, telz & telz Ont grant accointance leans. Danceurs, mignons, fringans, & gentz, Chaffeurs, volleurs, tous telles gens. Ung fonge, ung bruyt, ung angelot, Vous femble-il que ce ne foit riens, Ha! par le corps bieu je m'en tiens? De ceulx-là, mais n'en dictes mot. Je fuis tousjours gent & mignot, Sus mon cheval qui va le trot, Pour faire le fault cop cop, Je faictz moy cela à tous cop, C'est ce qui me faict eftre en grace, Ung fin mignon, ung dorelot, Arriere fatin, camelot,'

[ocr errors]

Puis que le veloux vient en place.
Pluftoft paffe, pluftoft rapaffe,
Voulentiers je deiffe fe j'ofaffe,
Mais qu' on fe tinft de cacqueter;
Quant je la voy, car je parlatte,
Mais par le corps bieu je m'en laffe,
Car el' ne me veult efcouter.
Avez vous point veu cy entrer,
N'agueres une godinette,

Qui vient rire, esbatre, dancer?
C'est une petite noyrette,
Non pas noyrette, mais brunette,
Une mignonne tant fadine,
Une robe d'ung gris bien faicte,

D'ung-fin gris changeant, bonne mine:
La belle piece à la poitrine
Tiflu cramoyfi, large à la bondine,
Er du hault jufque au bondon,
Elle eft auffi droicte que ung jon.
Pardonnez moy, elle n'y eft don,
Je cuydoye qu'clle fuft ceans,
Il y a je ne fçay quantz ans
Qu'ilz furent mariez enfemble
Elle & Monfieur mais il luy femble
Eftre tout pefant, tout remis;
Il vous a les yeulx endormis,
Rouges, & le corps tant mauffade,
Penchant devant, la couleur fade,
Les jambes auffi menuettes
Comme fufeaulx, les joies retraites,
Il eft fi tendre & fi flouet,

:

Qu'il femble à le veoir bien fouvent,
Qu'il cuft befoing d'ung coup de fouet
Pour le faire tirer avant.

Il va tousjours traine gainant
Sur fon cheval emmy les ruës,
Tout en fongeant, le bcc au vent,
Sçavoir s'il verroit nulles gruës.
Unes jambes tant mal fonduës
Grant chapperon, & large cotte,
Les efpaulles auffi bouffuës,
Qu'il femble droites moules à hofte.
Et fi a la mine fi fotte,

Que quant il parle, qui vouldroit
Dire qui fonge ou qui radotte,
Par le fang bien on le croyroit.
Et fçavez vous quoy? qui le verroit à
Sans fa longue robe fourrée,
En pourpoint, on le jugeroit
Une droite fouche couppée.

Mais elle, poac c'eft une fée,
Ung bon petit corfet bien prins,
Qui faict auffi bien la faffée,
Que femme qui foit au pays.
Tousjours ung tas de petit ris,
Ung tas de petites fornettes,
Tant de petitz charivaris,
Tant de petites façonnettes,
Petis gans, petites mainnettes,
Petite bouche à barbeter,
Ba, ba, ba font ces godinettes
Quant elles veullent cacqueter.
Elle m'a fait fouvent monter
A cheval, faire mes effors,
Aller, chevaucher, tempefter,
Et courir à cry & à cors.
Ung jour je venoye de dehors,
Sur mon hacquenet tout houfé,
Or eftoys-je de fon gent corps
Desja furprins & abbufé,
Et de fait j'avoye propofé,
Pour l'amour d'elle, d'eftre fin;
Mignon, gorgias, bien prifé
Des Dames: là eftoit ma fin.
J'entendoye affez mon latin,
Car pour eftre plus fricquelet :
J'avoye le pourpoint de fatin,
J'entens fatin par le colet,
Et aux manches le chappelet
Joyculx, la manche attachée
De velours à ung beau fillet
Troys doibs de large, la belle efpée,
Robe à grant manche defcouppée,
Affin que l'on veift là defloubz.
Floc, floc faifoit ma hacquenée,
Quant elle vouloit marcher doulx,

Elle cuyda tomber deux coups,
Non pas tomber, mais el' choppa,
Les regardans eftoyent là tous,
J'en ouy bien ung qui parla,
Et tout en raillant m'appella,
Et me dit que je chevauchoye
En clerc, en latin, tout cela;
Mais par le fang bieu non faifoye,
Car feurement je me tenoye,
Genoux ferrez bien empefchez,
Et me femble franc, que j'eftoye
Pour faire banfler couvrechiefz :
Si ma befte feilt ces mefchiefz,
Et qu'elle cuyda faire ung fault,
Que voulez vous fang bieu, fçachez
Que je fçay bien ce qu'il luy fault:
Je vous chevauchoys royde & hault.
La plupart des gens me fuyvit,
Difans, vela ung beau ribault,
Se n'eft pas dommaige qu'il vit.
Une Damoyfelle me vit

A fon huys à tout fon attours,
Mais elle rentra, car elle craignit
Que ma befte ne luy feist paour;
Et de fait je feiz tous mes tours,
On me veit de tant de maisons,
Que s'il euft faict ung peu plus jour,
On m'euft veu de delà les pontz.

Or revenons à noz moutons
Ma perfonne fuft defcenduë,

Et

pour faire les comptes rons,
Je veiz ma Dame emmy la rue;
Je m'en voys la bouche tenduë
Là où elle eftoit à fa porte,
Je la baife, je la faluë,
Demandant comme elle fe porte:

« AnteriorContinuar »