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Nuit qui fauvas l'Anglais, prompt à fuir nos vaiffeaux, C'est toi que j'en attefte, & toi, Guerre inteftine, Qui tiens la dernière ruine

Pendante fur le front de ces tyrans des eaux.

O vous qu'ils opprimaient, Fils des mêmes Ancêtres,
Racontez leurs revers, enhardiffez nos coups,
Colons Républicains, par la victoire absouts
D'avoir banni d'injuftes Maîtres;

Français par l'amitié, depuis ce jour vengeur,
Où Vergennes, du Monde affurant la balance,
Confacra votre indépendance,

Et défit Albion par un traité vainqueur.

Peignez votre Univers, où leur pouvoir expire,
De leur domaine ingrat retranché pour jamais;
La Liberté transfuge oppofant à l'Anglais

Empire élevé contre Empire,

Leurs climats épuifés d'hommes & de tréfors,
Les champs Américains dévorant leurs Armées,
Leurs flottes en vain confumées "

Leur triple Etat courant s'engloutir fur vos bords.

Et nous fommes Français ; & dans nos ports timides, Ce refte de vaincus veut impofer des lois!

Eveillez-vous, Guerriers, & rendez à nos Rois

Le trône des États humides:

Jufqu'en leur Forts ailés entrez victorieux;
Frappez ces Légions, leur dernière espérance;
Que le bruit de votre vengeance

'Aille au fond des tombeaux réjouir nos Aïeux.

Déjà font accourus, tout rayonnans de gloire,
Orgueilleux de revivre en vos Chefs indomptés,
Et Duquesne & Forbin, tous ces Héros vantés,

Dont les mers gardent la mémoire;

Ils vous fuivent, brûlant de combattre avec vous: Les voyez-vous, Guerriers, ces Fantômes terribles, De leurs bras encore invincibles,

Pouffer vers l'ennemi vos vaiffeaux en courroux?

<< Ici font les Anglais; des dangers qu'il affronte » Chacun de vous aura fon père spectateur:

» Marchez, vous difent-iis; devant vous eft l'honneur; Derrière, à vos côtés, la honte ».

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Mânes de nos Héros, vous ferez fatisfaits;

Vous ne rentrerez point dans l'éternel filence,
Affligés d'avoir vu la France

Réduite à regretter l'opprobre de la paix.

ODE

IMITÉE DE PLUSIEURS PSEAUMES,

Faite par

ΑΙ

M. GILBERT huit jours avant sa mort.

'AI révélé mon cœur au Dieu de l'innocence; Il a vu mes pleurs pénitens;

Il guérit mes remords, il m'arme de constance ;Les malheureux font fes enfans.

Mes ennemis riant, ont dit dans leur colere:
Qu'il meure & fa gloire avec lui!

Mais à mon cœur calmé le Seigneur dit en père :
Leur haîne fera ton appui.

A tes plus chers amis ils ont prêté leur rage:
Tout trompe ta fimplicité;

Celui que tu nourris court vendre ton image,
Noire de fa méchanceté.

Mais Dieu t'entend gémir, Dieu vers qui te ramène Un vrai remords né des douleurs ;

Dieu qui pardonne enfin à la Nature humaine,

D'être foible dans les malheurs.

J'éveillerai

J'éveillerai

pour toi la pitié, la justice
De l'incorruptible avenir;

Eux-mêmes épureront, par leur long artifice,
Ton honneur qu'ils penfent ternir.

Soyez béni, mon Dieu, vous qui daignez me rendre
L'innocence & fon noble orgueil;

Vous qui, pour protéger le repos de ma cendre,
Veillerez près de mon cercueil !

Au banquet de la vie, infortuné convive,
J'apparus un jour, & je meurs :

Je meurs, & fur ma tombe, où lentement j'arrive,
Nul ne viendra verfer des pleurs.

Salut, champs que j'aimais, & vous, douce verdure
Et vous, riant exil des bois !

Ciel, pavillon de l'homme, admirable nature,
Salut pour la dernière fois!

Ah! puiffent voir long-temps votre beauté facrée
Tant d'amis fourds à mes adieux !

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Qu'ils meurent pleins de jours, que leur mort foit pleurée! Qu'un ami leur ferme les yeux !

F

LE DIX HUITIEME SIECLE.

NE

=0=

SATIRE A M. FRÉRON.

E prétends plus, Fréron, par tes favans efforts, Détrôner le faux-goût qui règne fur nos bords: Depuis que nous pleurons l'Innocence exilée, Sous tes mâles Ecrits vainement accablée, On voit renaître encor l'hydre des fots Rimeurs, Et la chûte des Arts fuit la perte des Mœurs.

Un Monftre dans Paris croît & fe fortifie, Qui, paré du manteau de la Philofophie, Que dis-je ? de fon nom fauffement revêtu, Etouffe les talens & détruit la vertu : Dangereux Novateur, par fon cruel fyftême, Il veut du ciel défert chaffer l'Etre fuprême; Et du corps expiré l'ame éprouvant le fort, L'homme arrive au néant par une double mort. Ce Montre toutefois n'a point un air farouche, Et le nom des vertus eft toujours dans fa bouche: D'abord, de l'Univers Réformateur discret, Il femait fes Ecrits à l'ombre du fecret:

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