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plus intéreffantes du fiecle dernier, auroit produit toute l'utilité qu'on devoit en attendre, fi l'on avoit formé un Catalogue exact de toutes les Familles déclarées Nobles ou Roturieres à cette époque. Par l'exécution de ce Catalogue, la racine des ufurpations auroit été coupée, la condition de tous les Sujets du Royaume fixée, & la Nobleffe, déformais exempte du foin de faire des preuves, auroit joui paifiblement & fans trouble des priviléges de fon origine.

L'ufurpation des titres de la Nobleffe par les Roturiers, & des titres de la haute Nobleffe, par celle qui lui eft inférieure, n'eft pas le feul vice qui attaque cet Ordre effentiel à la Monarchie, qui fait le lien entre le Souverain & le Peuple; il en est d'autres encore qui, ajoutés à ceux-ci, préfagent fa ruine & fon extinct on.

Cette manie de quitter les Provinces, & d'abandonner les campagnes qui de

viennent défertes, l'attachement aux maximes de Cour, l'envie d'y jouir de quelques diftinctions paffageres, le goût effrené des plaifirs de la Capitale, le luxe, la diffolution des mœurs qu'il entraîne, le célibat, voilà les maux qui détruifent la Nobleffe, & qui altérent tous les Ordres de l'Etat.

Combien de Familles illuftres, combien de noms célebres font venus fe perdre dans cette Capitale fameufe, où s'engloutiffent journellement, comme dans un abîme fans fond, toutes les races, toutes les fortunes & toutes les

vertus.

La Cour des Rois brillera toujours d'un éclat affez impofant, les Grands Officiers de leur Couronne, & ceux de leur Maifon, feront toujours affez nombreux pour lefervice de leur personne & la juste splendeur de leur Trône, les Capitales feront Qujours affez peuplés d'habitans; mais les campagnes n'auront jamais trop de

riches poffeffeurs de terre pour les vivifier; l'infortuné Villageois trop d'appui, trop de fecours dans fes travaux & dans fes peines, & les hommes en général trop d'exemples de fageffe & de raifon, qui leur apprennent combien eft préférable aux vains & tumultueux amusemens des villes, le bonheur d'une vie douce, naturelle & fimple.

Combien nous refte t-il de Familles iffues des anciens pofleffeurs de Seigneuries fous la premiere & la feconde Race de nos Rois? Je ne réfoudrai point ce problême; je craindrois d'anéantir un trop grand nombre de prétentions, & peutêtre d'être injufte malgré moi. Combien en exifte-t-il qui puiffent remonter leur origine au delà de l'époque des premiers Anobliffemens ? un très-petit nombre. Combien y a-t-il de Nobles en France? je l'ignore. Cette fupputation, pour qu'elle fût exacte, ne pourroit être que le résultat d'une opération vafte & générale.

Mais ce dont je fuis certain, c'eft que dans la recherche de la Nobleffe faite en France en 1666, il a été trouvé environ 2084 Familles Nobles dans la Province de Bretagne, environ 1322 dans la Généralité de Caen, environ 1686 dans la Généralité d'Alençon, environ 14 dans celle de Champagne, environ 1627 dans la Province de Languedoc, environ 766 dans la Généralité de Limoges, & environ 693 dans la Généralité de Touraine Anjou & Maine (*).

Une vérité de cette efpece, que je puis encore avancer, fans craindre de me tromper; c'est que de cette multitude innombrable de perfonnes qui compofent l'Ordre des Privilégiés, à peine un vingtieme peut-il prétendre véritable

(*) J'aurois defiré donner une notice générale de la Nobleffe de toutes les Généralités du Royaume; mais le défaut de Table & de Catalogue dans les Regiftres des Recherches de ces temps-là ne m'a pas permis de donner plus d'étendue à l'Etat qui précéde.

ment à la Nob'effe immémoriale & d'an cienne race. Si cette diftinction est juste, que doit penfer la faine politique de la quantité des Offices en France qui conférent la Noblesse héréditaire. Je n'entreprendrai point de difcuter les avan tages & lès inconvéniens de ces inftitutions. D'autres l'ont fait avant moi, & je ne répéterai point ce qu'ils ont dit fur cette matiere, puifque tout le monde le fait.

ABRÉGÉ

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