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Du Perier, la Poëfie Latine, & qu'il a jugé à propos de fe reftraindre dans le Lyrique. En quoi il a fait voir qu'il connoifloit parfaitement fes propres forces; & qu'il a été incompablement plus fage qu'un tas de Poëtes téméraires qui fe croyent capables de tout faire, & qui embraffent tous les fujets qui fe prefentent à eux & qui les tentent.

Ces circonstances ne fervent pas peu à diminuer l'étonnement que nous pourrions avoir du fuccès avec lequel il a réuffi en ce genre, & elles nous perfuadent affés que Mr. Ménage ne s'eft pas trop éloigné de la vérité (1), lors qu'il l'a appellé le Prince des Poetes Lyriques. Mais tant que Mr. du Perier laiffera fes Piéces écartées fans les raffembler en un Recueil, comme font les autres Poëtes, il ne fera pas facile aux Critiques de juger de cette principauté, ni de faire ce jufte parallèle de fa Poëfie avec celle de Mr. de Santeuil, que le Public attend avec d'autant plus d'impatience qu'il a pris de part au fameux défi que ces deux illuftres concurrens fe font donné à la vue de toute la Ville & de la Cour, pour décider des prétentions qu'ils ont eues au préjudice l'un de l'autre fur le fceptre Poëtique.

Tant que durera cette indifférence de Mr. du Perier pour fes propres Ouvrages, & tant que fes Odes feront fugitives, elles pourront bien éviter les jugemens des Cri

1. Egid. Menagius Ode ad Car. Pererium pag. 21. Tdem Elegia xiv. pag. 37. & Eleg. xv. ubi Santolium cum Pererio de fceptro Poëtico difceptantes

con

Critiques, & nous envier une connoiffan- Du Perier. parfaite du caractére de leur Auteur, mais au moins celles qu'on a vûës fuffiront pour nous faire connoître que fes vers ont de la nobleffe, de la force, & en même tems une douceur qui n'a rien de badin, qu'ils font bien travaillés, qu'ils font plutôt les fruits d'un bon jugement que d'u ne grande fécondité, & que s'il s'eft borné à l'étude d'Horace, de Virgile & de Vida, comme quelques-uns le publient, c'est afin de rendre fa Poëfie plus pure, fachant que le mélange de beaucoup de chofes eft fouvent fuivi de corruption.

J'avertirai feulement ici, que les Imprimeurs de Geneve voulant peut-être profiter de l'absence ou du moins de la facilité de Mr. Richelet, ont eu la hardieffe de fubftituer le nom de Mr. du Perier à celui de Pelletier, dans un vers de Mr. Despréaux rapporté dans le Dictionnaire de cet Auteur en ces termes (2).

Et j'ai tout du Perier

Roulé dans mon office en cornets de papier.

La faute d'impreffion eft trop malicieufe pour n'être pas remarquée, & elle fait injure à trois perfonnes tout-à-la fois, fous prétexte de tirer un méchant Poète d'un mauvais pas, par la commodité de la mefure & de la rime.

conciliare nititur pag. 59. 60. &c. Ren. Rapin, Ode pag. 170.

2. P. Rich. Diet. Fr. p. 86. au mot Office.

MR.

MR. DE PINCHESNE,

(Eftienne Martin) d'Amiens, qu'on dit être neveu de feu Mr. de Voiture, Poëte François.

Pinchefne. 1541.cheffe eft un des plus connus N peut dire que Mr. de Pind'entre les difciples de Mr. Ménage pour la Poëfie Françoife, du moins ne peut-on pas nier qu'il ne foit un des plus reconnoifans, puis qu'il en a voulu laiffer au milieu de fes Ecrits des marques éternelles à la postérité, lorfqu'il lui parle en ces termes:

Souffre que

l'amitié te rende en ces écrits Ce que je dois au foin que tu pris de mes

rimes;

Et ce qu'en te lifant dans les tiennes j'appris (1).

Nous ferions injuftes d'accufer Mr. de Pinchefire d'une négligence pareille à celle de Mr. du Perier, puis qu'il a bien voulu ramaffer toutes fes Piéces, & les donner au Public in-4. [en 1670.] fous le titre de Poefies Héroiques où fe voyent les Eloges du Roi, des Princes & Princelles de fon fang & de toute fa Cour. Ce font des Sonnets faits à plaifir, dont la principale qualité eft l'éxactitude de la rime, de forte que fans faire injure à la mémoire du Président May

1. Eft. Mart. de Pinch. Sonnet à l'Abb. Ménage pag. 139.

Maynard, on peut dire que Mr. de Pin- Pinchefne. chefne a eu l'avantage fur lui en ce point, puis que celui-là ne faifoit fouvent que des Epigrammes de quatorze vers, au lieu que celui-ci fait de la verfification de quatorze lignes accrochées par cinq rimes. Car il faudroit être dépourvû de fens commun pour ofer nier que tous ces Sonnets font autant de Piéces de vers où l'on trouve,

Qu'en deux Quatrains de mefure pareille La Rime avec deux fons frappe huit fois l'oreille;

Et qu'enfuite fix vers artiftement rangés
Y font en deux tercets par le fens partagés.

Voila ce que Mr. de Pinchefne a crû pouvoir faire de plus recommandable pour Phonneur de fon fiécle, comme il nous le témoigne dans fes Ecrits (2). Ceux qui ne feront point contens de cela pourront chercher dans les Sonnets des autres de quoi fe fatisfaire.

Ceux-ci ont pourtant encore une vertu affés finguliére qui a été remarquée par l'Auteur du Lutrin (3). Car il paroît, par ce qu'il en rapporte, que la fureur Poëtique qui donne fouvent la fiévre chaude aux autres Poëtes, avoit dégénéré en fiévre lente dans la veine de notre Auteur, & que fes vers en communiquent les effets qui font la pâleur & le dégoût dans l'efprit de ceux qui les lifent.

2. Le même dans la Préfacé de fes Poëfies. 3. Chant cinquième du Lutrin Vers 163. 164.

Le

E défir de finir ce Recueil joint au peu d'utilité qu'il y a dans la Lecture des Poëfies médiocres, me fait refoudre à ne point parler d'un grand nombre de Poëtes Verfificateurs François de nos jours, & de quelques faifeurs de vers Latins. Mais je prie ceux qui ne font pas de ce nombre, & dont je ne parlerai pourtant pas, de croire qu'il n'y a point d'autre caufe de mon filence & de mes omiffions que le défaut de connoiffance où je fuis à leur égard; & que je ne manquerai pas de publier leur mérite dès que j'aurai eu l'avantage de voir leurs Poëfies, ou d'apprendre dans les Ouvrages des Critiques, les jugemens que l'on en fait on les fentimens qu'on en doit avoir.

MR. CORNEILLE LE JEUNE, (Thomas) Frere de Pierre, de l'Académie Françoife, Poëte François, aujourd'hui vivant (1).

T. Cor- 1542. L

@eille.

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E célébre nom de Corneille vit encore aujourd'hui avec honneur dans l'Académie & dans la Républi que des Lettres par le moyen de celui qui le porte: & nous pouvons dire au moins, qu'il n'eft guéres inférieur à fon frere pour le nombre des Piéces de Théatre qu'il a compofées. Nous avons de lui la Comédie des Engagemens du Ha

1. T. Mort l'an 1709. dans fa 84. année.

3.

zard

4. L'Agéfilas eft de Corneille l'ainé. 3. Rofteau, Sentim, fur quelques Ouvrages d'An

teurs

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