la preuve qu'ils donnent.

pour juftifier une méthode auffi extraordinaire. C'est aux Marins à déterminer jufqu'à quel point cette pratique peut être avantageufe, comme les plus capables d'en juger: la feule chofe dontje fuis sûre, c'est que nous fimes ufage de notre ancre fans en éprouver le moindre inconvénient, quoique la furface de la mer s'élevât à une telle hauteur que dix braffes de notre cable étoient alternativement ensevelies, ou entièrement dehors de l'eau : il eft vrai que les ancêtres de ceux qui établirent les premiers une forte de commerce dans cette Ifle, eurent recours au fimple expédient d'un panier avant que la navigation eût fait un affez grand progrès dans leur pays, & c'eft probablement par cette raifon que leur postérité a conservé la même méthode (1).

(1) Il est certain que les premières ancres ont été faites avec de la pierre ou du

A la première nouvelle que le peuple de Saint-Kilda eut de notre arrivée fur fes côtes, les hommes, les femmes & jufqu'aux enfants accoururent du village pour nous fecourir. A en juger fimplement par la manière dont ils fe

bois chargés de plomb. -Diodore de Sicile, rapporte que les Phéniciens dans leur premier voyage en Espagne ayant pris plus d'argent que leurs vaiffeaux n'en pouvoient porter, ôterent le plomb de leurs ancres, & mirent de l'argent à sa place -Les habitants de l'Islande font ufage d'une pierre fort large à laquelle ils font un trou au milieu qu'ils bouchent en entier avec une pièce de bois. En Chine ? au Japon & à Siam on ne fait les ancres que de bois auquel on lie de grandes pierres.-L'ignorance des premiers âges, & l'attachement obftiné des hommes aux coutumes de leurs ancêtres, pour lefquelles ils confervent la plus grande vénération, eft fans doute la caufe de l'imperfection de leurs inftru

ments.

comportèrent fur le rocher dont nous étions affez proche, il paroît évident qu'ils ont affez d'humanité pour être vivement affectés des malheurs de leurs

,

:

femblables il nous étoit impoffible de comprendre la fignification de leurs difcours accompagnés de cris; nous eumes feulement lieu de préfumer qu'ils étoient très-touchés de notre danger, Cependant par leurs fignaux réitérés nous conclumes à la fin que d'après leur opinion, nous pouvions aborder fans péril : nous confiant donc à leur industrie, fupérieure à celle de tout autre peuple, notre courage d'ailleurs étant tout-à-fait épuifé, nous fuivimes leur indication fans perdre de temps; mais après nous être approchés de la Selle, malgré tous nos efforts réunis, nous fumes bientôt réduits à la trifte néceffité de nous en écarter, à l'Oueft de ce rocher, if

Un

peu

y a une baie fablonneufe qui n'eft ac

ceffible

que dans les baffes eaux. On y trouve un endroit propre à prendre terre, quoiqu'extrêmement dangereux; & c'eft pour cette raifon qu'on tente rarement d'y débarquer, à moins que le temps ne foit très-favorable. Les Kildiens coururent en foule à cette baie ; après nous avoir indiqué ce lieu par leurs fignes, nous y obéimes fans héfiter. Auffi-tôt ils fe précipitèrent dans la mer & vinrent jufqu'à nous. avec une intrépidité furprenante; entreprise d'un courage inoui, dans laquelle aucune autre race d'hommes n'eût ofé rifquer de s'engager, à moins qu'elle n'eût vu fa famille la plus chère dans un femblable péril. Voici la difpofition qu'ils prirent pour exécuter leur projet. Après s'être divifés & rangés en deux bandes, les deux plus robuftes d'entr'eux marchèrent en avant dans la mer chacun à la tête de fa petite troupe, Ceux enfuite qui étoient

,

les feconds en force & en ftature, faifirent les deux conducteurs par le milieu du corps, & le refte de ceux qui compofoient chaque rangée depuis un bout jufqu'à l'autre s'attacha de même à celui qui étoit immédiatement devant lui, paffant à gué en avant jusqu'à celui qui étoit à la tête de fa bande; chacun enfuite, felon l'ordre dans lequel il fe tenoit, fe faifit de notre barque.

Ceux qui vont tous les ans à SaintKilda ont toujours foin de prendre la précaution de tourner une corde trèsforte au tour de la poupe de leur bateau, & en lient une autre à la proue; dès que les Kildiens nous eurent environnés ils firent paffer auffi-tôt ces deux cordes de main en main, jufqu'à ce que les femmes & les enfants qui fe tenoient fur le rivage vinffent à & les aidaffent dans leur tra

eux ,

vail. Cette première opération, fi né