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agreables par la découverte qui eft d'autant plus belle, qu'elle a plus d'éloignement, & que les objets en font plus variez, & la feconde chofe à obferver, eft que les pentes foient reglées de telle maniere, que nonobftant les Perrons & les Glacis on découvre du bout de l'Allée principale la masse de tout l'Edifice, ce qui s'entend des Jardins de Campagne, où l'air libre donne moyen de s'étendre & de profiter de l'étendue du lieu car pour les Jardins qui font renfermez dans les Villes, il faut s'accommoder à la place qui en eft ordinairement petite, parce que le terrain y eft cher, & qu'on y eft. ferré de près par les maifons voifines qui en bornent la veuë. Ces petits Jardins de Ville font ordinairement dreffez de niveau parfait.

Mais pour revenir aux Jardins dont l'étendue permet une ingenieufe compofition: Le Parterre qui eft la premiere piece qui fe prefente en entrant, doit eftre de la largeur du corps du Bâtiment, les Allées des coftez prifes en dehors, & fa longueur de telle proportion, que du bout on puiffe diftinguer toutes les parties de l'Edifice. Il faut que les Ornement de broderie foient fans confufion, & pour les remarquer plus diftinctement, le fonds en doit eftre labouré, & de terre noire, & le dedans des feüilles fablé, ce qui fe doit faire ainfi aux Parterres dont les Platte-bandes font coupées, & qui ont un petit chemin qui les détache de la broderie: & au contraire à ceux dont les Platte-bandes ne font point coupées, & qui n'ont point de chemin qui les fepare, il faut que le dedans des feuilles & des fleurons de la broderie foit noir, & le champ du Parterre fablé comme les grands Allées. Le Buis doit eftre petit & bien garny; il est de peu d'entretien & de longue duré. Le Parterre eft entouré de Plattebandes de quatre pieds de largeur pour les petits, & de cinq à fix pieds pour les grands on les garnit de fleurs & d'arbriffeaux verds, comme Epiceas, Ifs, Houx, Buiffons ardens, &c. & les encognures font de diverfes figures avec enroulemens qui forment des spirales à chaque tournant, Cette

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varieté prefque infinie de Parterres fe reduit à quatre fortes. On ne fçauroit donner de regle certaine pour en marquer les proportions comme à l'Architecture: tout ce qu'on en peut dire eft, que cet Art vient de la Geometrie, les Parterres eftans compofez partie de lignes droites & de lignes courbes, d'enroulemens mêlez avec des Grotefques, Morefques, Arabefques, Frifes, Targes, Guillochis, & tous autres Ornemens qui peuvent tomber dans la penfée, & qui peuvent eftre deffincz & diftinguez fur terre, & leur beauté confifte à n'être jamais repetez.

Le premier Parterre eft celuy qui eft fait de broderie entouré d'une Platte-bande découpée, & d'un chemin fablé qui fepare le champ de la broderie d'avec la Platte-bande. Ce Parterre doit toûjours eftre mis deffous les feneftres de la Maison, comme le plus beau & le plus noble.

Le fecond eft compofé d'un maffif de buis, au milieu duquel tourne en ligne parallele un cordon de gazon du tiers de fa largeur, & les grandes places qui reftent de differentes figures, ce maffif placé, font remplies de broderie.

Le troifiéme Parterre eft de pieces coupées en compartimens pour mettre des fleurs, & compofé d'enroulemens de lignes droites & courbes, dans lequel on fe peat promener par les fentiers faits à ce fujet en lignes paralleles aux pieces. Ce Parterre eft entourré comme les autres d'une Platte-bande coupée en divers endroits, garnie d'arbriffeaux & de fleurs. Tous les chemins en doivent eftre fablez, & les pieces du compartiment remplies de bonne terre, mêlée de terreau ou de terre noire pour les détacher du fond.

La quarriéme eft un Parterre en compartimens de gazon compofé comme celuy cy-deffus, à l'exception que les pieces én doivent eftre beaucoup plus grandes & plus larges, afin d'avoir au tour de chaque piece une petite Platte-bande de deux pieds feulement, remplie de terre noire pour mettre des fleurs, & il faut feparer le trait de buis du gazon que coupe parallele au contour de chaque piece; ce Parterre

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a fa Platte-bande comme les autres, & les fentiers plus larges que ceux du Parterre de fleurs, à caufe que les compartimens font plus étendus ; auffi ne fe peur-il faire que dans un grand espace, & c'est ce qu'on appelle Parterre à l'Angloife.

On peut, quand la saison eft douce, changer la décoration des Jardins, en y mettant des caiffes d'Orangers, de Grenadiers, de Jasmins, de Lauriers-rofes, &c. (dont on fait des Allées) & en garniffant les Parterres & les Planches de Vafes de diverfes fleurs avec des caiffes aux encôgnures des carreaux; & lors que les fleurs commencent à fe faner, s'il y en a une pepiniere de referve dans des pots, on les peut changer, enterrant les pots, comme on le pratique aux Jardins de Trianon, & cette varieté eft la plus magnifique qui fe puiffe imaginer.

Les Allées, tant celles qui feparent les Parterres, que celles qui diftinguent les Bofquets, font ou paralleles à la ligne qui palle par le milieu du Baftiment, ou de traverse, retournées 'équerre, ou biaifes fur cette ligne, ou diagonales. Les Allées entre les Parterres ou à l'entour, ne doivent pas avoir moins de douze à quinze pieds, & peuvent eftre beaucoup plus grandes & proportionnées tant aux Parterres qu'aux autres pieces qui les accompagnent, & qui forment l'étendue de ce qui fe prefente à découvert en defcendant au Jardin. Les Allées font ordinairement de niveau, & quelquefois avec de la pente, qui ne doit jamais eftre trop roide; parce que, quand elle excede trois pouces par toife, les ravines les gâtent; à quoy on peut remedier par du gazon qu'on met au milieu des plus grandes, & au pied de leurs paliffades, comme à l'Allée Royale de Verfailles. Il faut que les Allées foient fablées, & un peu élevées au milieu de leur largeur, afin que l'eau puiffe s'écouler des deux coftez. La meilleure précaution dont on fe puiffe fervir pour conferver les Allées, c'eft de faire un Aire de recoupes de pierres de dix-huit ces, bien battue & reduite à un pied d'épaiffeur ou environ, fur laquelle il ne faut que peu de fable pour les entretenir

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dans une grande propreté; parce qu'il n'y croift que fort peu d'herbes, & les taupes ne les peuvent endommager.

Les Cours, Avenues, & Allées principales, tant de front que de traverfe, font fouvent accompagnées de Contre-allées de la moitié de leur largeur, à moins que l'étenduë de la façade du Bâtiment ne faffe fortir de cette regle, parce que la plus grande beauté des Avenues d'ormes, eft que les branches des arbres des principales Allées fe touchent par leurs extrémitez, & les Contre-allées forment des Berceaux. Il eft neceffaire pour cet effet de les élaguer de temps en temps pour les faire profiter, & on doit difpofer leurs branches pour cette forme. A l'égard des Allées de charmille, leurs Contre-allées doivent eftre fort étroites fans proportion avec les Allées, afin d'y pouvoir trouver l'ombre & le frais. Les principales Allées, comme celles qui font oppofées directement aux façades des Palais, font plantées de Maroniers d'Inde & d'Ifs entre-deux; parce que les Ifs qui font taillez en pyramide, garniffent les tiges des Maronniers qui font nuës. On peut auffi faire des Allées ou Routes dans un Parc, elles fuffifent de cinq à fix toifes: & il s'en fait même de moindres, excepté la principale qui regarde le Bâtiment, qui doit eftre plus large, afin d'en prolonger la veuë autant qu'elle fe peut étendre; car comme c'eft un avantage qu'elle foit terminée par l'horizon du lointain, c'eft auffi un défaut de la finir dans un mur de clôture. Il eft neceffaire qu'il y ait des Paliffades de charmille le long des murs de l'Enclos, qui fouvent en rachettent les biais ou coudes, les Allées eftant droites. Quand plufieurs Allées fe rencontrent à un même point, elles forment une Etoile, ou une figure ronde ou à pans, du centre de laquelle il faut ménager les plus beaux points de veuë. Pour la pente des Routes, comme fouvent l'inégalité du terrain les rend trop roides, & qu'il n'y peut avoir de gazon, d'Aire de recoupes, ni de fable, puifqu'on s'y doit promener en caroffe; il les faut accommoder de telle forte, qu'avec la terre qu'on ofte de la crefte, ou fommet d'une éminence le

long d'une Allée, on en comble le fonds, quand même on devroit un peu enterrer les arbres des coftez. Il faut tâcher en aplaniffant le tout, que la pente foit d'une feule ligne; c'eft pourquoy afin de connoiftre la quantité de terre qn'on en doit ofter, il le faut fervir d'un bon niveau, & en une ou plufieurs ftations marquer exactement la pente naturelle de l'état du terrain, parce que c'eft par ces Profils qu'on regle les points de veuë, enforte qu'un objet ne nuife point à l'autre, & qu'on apperçoive tout ce qui peut eftre veu d'un même afpect.

Les Bois font anciens ou nouvellement plantez : & comme c'eft un grand avantage de trouver un vieux plant de haute futaye, parce qu'on poffede ce qui ne peut croiftre qu'avec beaucoup d'années; il en faut abattre le moins qu'on peut lors qu'on y taille des Allées, des Routes, & des Bofquets : & fi ces Bois font à claire voye en certains endroits, c'est dans ces Clairieres qu'on peut faire des Bolquets fans couper beaucoup de bois, ni remuer quantité de terre, parce qu'il en faut accommoder les figures aux differentes fituations, qui ont toûjours leurs avantages, lors qu'on en fçait profiter. Il y a plufieurs manieres de décorer ces Bofquets, comme de Theatres, de Labyrinthes, de Salles de Bal, & de Feftin, de Belvederes, & de plufieurs autres figures dont on voit affez d'exemples. Mais fi l'on plante un jeune Bois fur un terrein inégal, il faut planter les plus grands arbres dans les fonds, parce qu'ils s'y portent mieux à caufe de l'humidité, & les Bofquets figurez fur les hauteurs pour joüir de la veuë.

On fait auffi dans les Bofquers de certains Parterres de gazon en compartimens de diverfes figures, enfoncez ou relevez en glacis couverts de gazon, & bordez d'arbres verds, qu'on nomme Boulingrins, & fous ce nom on en comprend d'autres qui different plus ou moins de cette compofition, dont les plus riches, qui font entourez de paliffades de charmille, percées d'arcades, forment un Jardin particulier, comme le Boulingrin de Saint Germain en Laye. Les Quincon

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