Imágenes de páginas
PDF
EPUB

s'enfuit pas du résultat de ces épreuves, que les Officiers d'artillerie en doivent conclure que ces effets feront les mêmes dans toutes fortes de terrains, c'eft à leur intelligence de déterminer le choix des circonftances, où ils devront préférer le boulet à la cartouche, ainfi que des distances où ils devront employer l'une ou l'autre de ces cartouches, pour en obtenir un plus grand effet.

J'ai cru devoir me difpenfer, en rendant compte de ces changemens, d'entrer dans des détails qui tiennent au méchanisme de l'Artillerie, & qui font abfolument du reffort des Officiers du Corps Royal. Les résultats généraux que je viens d'expofer, étant suffisans aux Officiers de ligne, pour leur donner une idée avantageufe de la nouvelle conftitution de l'Artillerie. Ils jugeront par la fuite que les mouvemens de l'Infanterie & de la Cavalerie ayant été perfectionnés, on a été néceffairement conduit à en faire autant relativement à ceux de l'Artillerie, & que devant combattre avec eux, il l'a fallu mettre en état de les suivre & de ne les abandonner jamais.

C

CHAPITRE IV.

Emplacement & exécution de l'Artillerie.

Principes généraux.

L'Exécution de l'Artillerie, est, l'art de l'emplacer, de diriger fon feu, de faire le plus grand mal poffible à l'Ennemi, & de donner la plus grande protection aux Troupes qu'elle foutient. Les Troupes & l'Artillerie, devant fe protéger mutuellement, il eft indispensable à l'Artillerie de connoître la Tactique des Troupes, ou au moins les résultats de leurs principaux mouvemens, & l'effet plus ou moins grand qu'elle doit produire fur telle ou telle manoeuvre, de juger de leur importance, & de la néceffité d'accé lerer fon feu, ou de changer de pofition. Il n'eft pas moins important que l'Officier d'Infanterie & de Cavalerie, qui doit commander toutes les Armes, & par conféquent l'Artillerie, connoiffe la portée des différentes bouches-àfeu, la maniere de les emplacer, & les réfultats généraux de leur exécution. J'ose ef

pérer que, par la lecture de mon Ouvrage, il fe fera une idée nette & précise de tous ces objets. Avec ces connoiffances il évitera de contrarier l'Officier d'Artillerie qui fera à fes ordres; il aura en lui une pleine confiance, parce qu'il fera en état de juger de l'intelligence de fa difpofition, ou d'en ordonner autrement, relativement à fes lumieres, & de connoître par lui-même la protection que les Troupes peuvent en recevoir.

Commençons par indiquer quelles font les distances où l'on peut compter fur les effets de l'Artillerie. Nous avons dit que les plus petites pieces, qui font celles de quatre, avoient au moins cinq cens toifes de portée tirées fous l'angle de trois degrés; & qu'à cette distance les coups, fans être bien affurés, fèroient encore beaucoup de mal par leur multitude; qu'au delà de cette diftance, les objets font trop peu distincts pour qu'on puiffe tirer avec quelque juftesse. Nous confidérons donc cinq cens toises comme le plus grand éloignement où l'on puiffe faire ufage de ce calibre. Ce n'eft pas qu'on ne puiffe tirer du canon à des portées plus confidérables, puifque fous l'angle de fix degrés feulement, le canon de douze

porte à huit cent quatre-vingt toifes, celui de huit & de quatre-à-peu près autant; & quoique ces portées foient très-rapprochées, elles font cependant un effet proportionné à leur calibre. Pour prouver en même temps que la diftance de cinq cens toifes n'eft pas trop éloignée, il suffira de savoir qu'à Metz, pendant tout un été, fous les yeux de M. le Maréchal de Broglie, & d'autres Officiers Généraux, ainfi qu'en présence d'une Garnison nombreuse, une batterie de canon, du nouveau modèle, compofée de deux pieces de douze, de deux pieces de huit & de deux de quatre a renversé, à quatre cent cinquante toifes, un but représentant le front d'une colonne, dont l'étendue pouvoit être de cinq troifes, sur cinq pieds huit pouces de haut, & dans lequel on a principalement remarqué, par le calibre des boulets, que les petites pieces avoient à-peu-près autant fourni que les groffes. On peut même ajouter que ces exercices fe font réitérés plufieurs fois avec fuccès, fous les yeux des mêmes Spectateurs, quoique le canon fût en mouvement, alternativement avec les bricoles & la prolonge.

La plus grande portée à la Guerre, doit donc être de cinq cens toifes pour le canon; quoique

les gros calibres portent beaucoup plus loin; mais on peut s'en tenir là, à caufe de la difficulté d'ajuster à des portées plus éloignées.

Les obus pointés au deffus de fept degrés ont des portées très-confidérables; mais alors ils s'enterrent, ne ricochent point & perdent par conféquent leur plus grand effet. La portée la plus convenable de l'obufier eft à quatre cent foixante toifes fous quatre degrés environ, parce qu'à cette diftance l'obus fait communément quatre ou cinq ricochets, furtout fi le terrain est favorable.

Quant à la cartouche de l'obufier, c'eft aux Officiers à déterminer l'instant le plus avantageux pour l'employer le plus utilement poffible, S'il fe trouvoit des circonftances où il fût néceffaire de tirer du canon, au delà des distances indiquées, comme à fix ou fept cens toifes, alors, pour s'affurer de quelques effets, il faudroit employer un grand nombre de pieces pour fuppléer, tant à la difficulté du tire, qu'aux irrégularités des grandes portées; tirer lentement, afin de laiffer le temps de bien ajuster, & augmenter progreffivement la vivacité du feu, à mefure que les distances feroient plus rapprochées.

Malgré la vérité de ces principes, il est à

« AnteriorContinuar »