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pourrions avoir d'envieux ou de parti-
fans de s'échauffer fur nos differends,
je vous declare que je ne vous parle
comme je fais que parce que je veux
conferver avec vous une amitié fince-
re & veritablement Chrêtienne, & qu'il
n'y ait rien fur mes levres que
de con-
forme à ce que j'ay dans le cœur. Car
aprés avoir paffé ma vie avec des faints
& avoir blanchy dans les travaux de la
vie Monaftique, il ne me convient pas
d'écrire contre un Evêque de ma com-
munion, & un Evêque que j'ay com-
mencé d'aimer avant que de le connoî-
tre, qui m'a prevenu par les marques
de fon amitié, & que j'ay eu la joye de
voir venir comme un foleil levant dans
la fcience des Ecritures, lors que j'étois
fur mon couchant.

Si ce que j'ay vû contre moy n'est pas de vous, declarez-le donc, & cefsez de me preffer de répondre à un écrit à quoy vous n'avez point de part. Si au contraire il eft de vous, avoücz-le librement; & fi ce que j'écriray pour ma défense vous fait de la peine, ne vous en prenez qu'à vous qui m'attaquez, &· non pas à moy que vous mettez dans la neceffité de vous répondre.

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II.

CLASSE.
AN. 404

5. Vous me dites encore que fi je «CH.III.

11.

CLASSE.

AN 404.

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trouve quelque chofe à redire dans vos » ouvrages, & que je veuille vous en aver» tir, non feulement vous prendrez mes "corrections en bonne part, & comme de frere à frere, mais que vous les regarderez comme une marque d'amitié qui vous fera plaifir, & que vous me de» mandez.

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Mais pour vous dire encore fur cela ce que je penfe, c'eft un deffi que vous me faites; c'eft un coup d'éperon que vous donnez à un vieillard qui ne cherche que du repos ; c'est le langage d'un homme qui veut faire parade de fon fçavoir.

Il ne me feroit pas bien feant à mon âge de rien faire qui pût donner lieu de croire, que j'euffe aucun chagrin contre un homme dont je devrois au contraire prendre le party. Mais du refte s'il fe rencontre des chofes dans les Prophetes, & dans l'Evangile même, à quoy des efprits malicieux croyent pouvoir trouver à redire, croyez vous que dans vos ouvrages, & fur tout dans ceux où vous expliquez les endroits les plus difficiles de l'Ecriture, on ne trouvât pas que vous Vous êtes quelquefois écarté du droit chemin Ce n'est pas que j'aye encore rien trouvé à reprendre dans vos Livres ;

je ne les
ay même jamais leus, & nous
n'en avons icy aucun, hors vos Solilo-
ques, & quelques commentaires fur les
Pfeaumes, où je pourrois faire voir, fi je
voulois les examiner, que vous vous
éloignez, non du fens que je donne à
l'Ecriture, car ce ne feroit rien, & je ne
fuis rien moy-même, mais de celuy que
les anciens interpretes Grecs y ont don-
né. A Dieu, mon tres-cher amy, que
je cheris comme mon Fils, & que je
pourrois regarder ainfi du côté de l'âge,
mais que vôtre dignité me fait regarder
& refpecter comme mon Pere. Quand
vous m'écrirez quelque chofe, faites je
vous prie, que je l'aye le premier, &
fouvenez-vous de la priere que je vous
en fais.

LETTRE LXXIII. *

Saint Auguftin voyant que Saint Terôme fe tenoit bleffe de fes lettres, tâche de l'appaifer par celle-cy, & s'y prend avec l'hu milité d'un vray Saint: il luy fait voir neanmoins qu'il n'avoit pas dû les prendre comme il avoit fait. Enfuite il luy marque qu'il a reçû fon Apologie contre Ruffin & deplore de la maniere du mon

a

a. RUFFIN Prêtre de l'Eglife d'Aquilée, comme

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II.

CLASSE

A N. 4C4.

de la plus touchante & la plus fainte, l'aigreur qu'il voyoit entre deux hommes qui avoient été autrefois dans une fi grande amitié.

AUGUSTIN faluë en Jesus-Christ son tres aimable frere & Collegue dans le Şacerdoce, le tres venerable Seigneur JEROME.

CHAP. I. I.

J

E

croy que vous avez reçû prefentement la lettre que je vous ay écrite par le ferviteur de Dieu le Diacre Cyprien nôtre cher fils, par laquelle vous aurez appris que celle dont le Diacre Sifinnius vous a porté une copie cft veritablement de moy. Ainsi je ne doute point que, comme un autre

Gennade le remarque, avoit été Moine de profeffion, premierement intime amy de faint Jerôme, & enfuite un de fes plus grands adverfaires, comme il paroît par tout ce qu'ils ont écrit l'un contre l'autre. Il paffa la plus grande partie de fa vie dans l'Orient & à Jerufalem, d'où il revint à Rome vers l'an 397. & enfuite à Aquilée. Il mourut fur la fin de l'an 410. en Sicile, où il avoit accompagné la jeune Melanie & fa famille. Il a traduit plufieurs ouvrages d'Origene; l'Hiftoire d'Eufebe de Cefarée, à laquelle il a ajouté deux Livres, & plufieurs traitez des faints Peres outre plufieurs qu'il a compofez luy-méme, & que le Pape Gelafe avec un Concile Romain de 70. Evêques mit au rang des Livres apocriphes & défendus, à caufe de ce que faint Jerôme y a repris. L'écrit de Ruffin,qui eft dans les notes du Pere Garnier fur Mercator, eft apparemment de Ruffin de Syrie.

a

,

Entellus a sa,

11.

a

les mains armées de gante- CLASSE. lets, & de courroyes garnis de bales de AN. 404. plomb, vous ne fondiez déja fur moy, comme fit ce vieux luitteur fur le prefomptueux Darés. Je ne laiffe pas neanmoins de repondre par celle-cy à celleque vous avez bien voulu m'écrire par nôtre faint fils Afterius, dans laquelle vous me donnez beaucoup de marques de vôtre charité & de vôtre amitié ; mais où il paroît auffi quelque aigreur,& quelque peine contre moy, & où il me femble que vous ne me careffiezen quelques endroits, que pour me furprendre par les coups que vous me portez un moment aprés.

Mais ce que j'y ay trouvé de plus difficile à accorder, c'eft qu'aprés m'avoir dit que vous n'avez pas voulu croi- « re legerement que cette lettre vint de « moy, de peur que me trouvant bleffé « par la reponse que vous m'auriez faite, « je ne me plaigniffe, & avec raison, qu'avant que de répondre vous deviez vous affeurer que je l'euffe écrite,vous ajoûtez que fi elle eft de moy, je vous le declare, & que je vous en envoye une copie

a. ENTELLUS étoit un vieux luitteur, qui fut defié an combat par Darés, dans ces jeux qu'Enée celebra en l'honneur de fon Pere Anchife, & qui tout caffé qu'il étoit, donna encore des marques de fa force, en affommant un taureau d'un coup de poing. Virg. Æneid. s.

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