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II.

CLASSE.

AN. 494.

non fufpecte, afin que nous puiffions entrer en lice fans aigreur & fans alteration, fur l'explication de l'Ecriture. Car comment fera-ce fans aigreur & fans alteration, fi vous étes en difpofition de me bleffer par vôtre réponfe? Si au contraire vous ne me devez rien répondre, dont je puiffe me trouver bleffé, comment dites-vous, que c'eft de peur que je n'euffe fujet de me plaindre

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me

voyant bleffé par vôtre réponse, que vous avez voulu vous affeurer que la lettre étoit de moy, avant de me répondre; c'est à dire avant de me bleffer? car quel fujet aurois-je de me plaindre fi je n'étois point bleffé: Vous étes donc en difpofition de n'écrire que des chofes qui peuvent bleffer, & cela étant, com, ment pouvons-nous entrer en lice fans aigreur, fur l'explication des Ecritures? Quant à moy, Dieu me garde de me trouver bleffé quand vous pourrez, & que vous voudrez bien me faire voir par de bonnes raifons, que vous avez mieux entendu que moy le paffage de l'Apôtre dont il s'agit, & quelque autre endroit que ce foit de l'Ecriture Sainte. Dieu me garde même de regarder autrement que comme un avantage, & une obligation que je vous auray,

toutes les leçons que vous me donne-
rez, & toutes les corrections
voudrez bien me faire.

que vous

2. Mais enfin, mon cher frere, il faut bien que vous vous trouviez bleffe de ce que je vous ay écrit, puifque vous comptez que vos réponses me doivent bleffer. Car je ne fçaurois me perfuader que fans vous croire bleffé, vous puiffiez étre en difpofition de m'écrire des chofes qui me bleffent. Que fi vous avez crû que fans qu'il y eût rien de capable de bleffer dans vos réponses, je fulle aflez extravagant pour m'en tenir blessé; je le fuis déja par ce jugement même que vous avez fait de moy. Mais je ne puis croire que fans avoir rien vû qui vous ait pu donner cette mauvaise opinion de moy, vous ne laiffiez pas de l'avoir conçue, vous qui craignez fi fort de juger temerairement, que vous n'avez pas voulu croire qu'une lettre fût de moy quoique vous y reconnuffiez mon ftile, Car un homme qui a bien vû que j'aurois fujet de me plaindre, fi fans preuve fuffifante il prenoit pour étre de moy, une lettre qui n'en fût pas, doit avoir vû à beaucoup plus forte raifon que j'en aurois encore davantage, fi fans avoir rien vû en moy qui luy pût

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donner lieu de me croire affez extrava

AN. 404. gant, pour me tenir offenfé d'un écrit où il n'y auroit rien d'offenfant, il faifoit de moy un auffi mauvais jugement que celuy-là. Dieu me garde de vous croire capable de l'avoir fait.

CHAP. II.

Douceur &

3. IL ne refte donc rien qui vous ait pû faire prevoir que je ferois bleffé de vos réponfes, finon que vous fuffiez en difpofition de les faire effectivement capables de me bleffer, dés que vous feriez affeuré que la lettre viendroit de moy. Et comme je ne puis croire que vous euffiez deffein de me bleffer injustement, il faut que je vous aye bleffé par cette lettre, que je ne puis nier d'avoir écrite ; & cela étant,en vain irois-je contre le torrent; je n'ay qu'à reconnoître ma faute, & à vous en demander pardon.

Je vous conjure donc par la douceur de Jefus-Chrift, de me pardonner fi je humilité de vous ay bleffé, & de ne me point rendre S. Auguft. le mal pour le mal, en me bleffant à vôtre tour. Or ce que j'appelle me blesser, ce feroit de me cacher les fautes que vous pourriez trouver dans mes paroles ou dans mes actions : car de reprendre en moy ce qui ne feroit pas à reprendre, ce feroit vous blefler vous même

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Belle leçon pour ceux

qui s'é

uns

contre les autres dans

plûtôt que moy. Auffi feroit-ce une chofe tres-indigne de vôtre vertu, & de la fainte vie que vous avez embraffée que de cenfurer par un principe d'aigreur, & par pure envie de me faire de la peine, chauffent ce qu'un principe de verité vous feroit les approuver dans le fond de vôtre cœur. Confolez-moy donc avec toute la ten- la difpute. dreffe d'un pere, fi vous ne trouvez pas par où m'attaquer; ou reprenez-moy, fi vous croyez que je le merite. Quand même je ne le meriterois pas, il n'importe, pourveu que vous le faffiez avec amitié. Car vous pourriez ne pas juger felon la verité, & ne pas laiffer d'agir felon la charité. Et de ma part quand ce que vous reprendrez fe pourroit deffendre, & qu'il ne meriteroit pas vôtre cenfure, je la recevray toujours avec reconnoiffance, lorsqu'elle partira d'un principe d'amitié; fi au contraire je la merite, je reconnoîtray tout à la fois & vôtre bien-veillance,& ma faute; & j'efpere qu'avec la mifericorde de Dieu vous ne me trouverez ny incorrigible , ny meconnoiffant.

4. Pourquoy donc l'attente de vos réponses, peut-être dures, mais tou jours falutaires, me feroit-elle fremir comme Darés fremiffoit à la vue des

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gantelets d'Entellus? Car au lieu que Darés ne pouvoit regarder Entellus que comme fon ennemy, & non pas comme fon Medecin, & les gantelets de ce celebre luitteur comme les inftrumens dé fa défaite, & non pas comme ceux de fa guerifon; fi je fçay recevoir vos corrections avec douceur d'efprit,je n'en fentiray point de douleur; & quand il árriveroit par un effet de la foibleffe humaine, ou de mon peu de vertu, que je fuffe contrifté de la correction que vous me ferez, quoique bien fondée, toujours vaut-il mieux faire fentir la douleur de l'incifion, que de ne pas guerir le mal fous pretexté d'épargner le malade. C'eft ce qu'a bien vu celuy qui a dit que DES ENNEMIs qui nous difent des injures, nous font d'ordinaire plus de bien, que des amis qui n'ofent nous reprendre: car ceux-là, quoiqu'ils ne cher chent qu'à nous piquer, nous disene quelquefois des veritez qui nous redreffent; au lieu que les autres craignant de faire quelque tort à la douceur de l'amitié,ne prennent pas avec nous toute la liberté que l'amour de la juftice leur devroit faire prendre.

Me voila donc étendu par terre devant vous dans l'aire du Seigneur, com

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