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mon Diocese, menant une vie qui n'é-
toit d'un ferviteur de Dieu, il s'en
pas
répandit de mauvais bruits, qui me
faifoient beaucoup de peine. Mais com-
me je ne voulois rien croire temerai-
rement contre luy, je ne fis autre chose
que de le veiller de plus prés, pour
voir fi je pourrois avoir des preuves
certaines de fa mauvaise vie. J'ay donc
trouvé premierement qu'il avoit détour-
né de l'argent qu'un villageois avoit
mis en dépoft entre fes mains; & que
quand on luy a demandé ce qu'il en
avoit fait, il n'a rien eu de bon à dire.
En fecond lieu il a été convaincu par
fon propre aveu de ce fait icy: que la
veille de Noël, qu'il étoit jeûne dans
l'Eglife de Gippy, comme par tout ail-
leurs, ayant été quelque temps avec un
Prêtre de même lieu, il le quitta fur les
cinq heures, comme pour se rendre à
fon Eglife, & qu'au lieu de cela il demeu-
ra chez une femme suspecte, fans avoir
aucun Clerc qui l'accompagnât: qu'il
y dîna, y foupa,& y paffa la nuit. C'est ce
qu'il n'a pû nier, & qu'il ne fçût le mau-
vais bruit qu'avoit cette femme, puif-
qu'un de nos Clercs d'Hippone a été dé-
gradé pour avoir logé chez elle. Je n'ay
donc fondé mon jugement que fur les

chofes qu'il n'a pu cacher; & j'ay laissé au
jugement de Dieu toutes celles qu'il a
niées. Voilà ce qui a fait
que je n'ay ofé
luy laiffer le foin de cette Eglife; fur
tout étant comme elle eft environnée
d'heretiques, dont la rage ne demande
qu'à trouver à mordre fur les Miniftres
de Jefus-Chrift. Neanmoins comme il
m'a prié de le renvoyer parmy les Prê-
tres du village d'Armeman dans le terri-
toire de Bouilles, d'où il étoit venu vers
nous, & de le charger pour eux de quel-
que lettre, qui leur marquât précise-
ment quelle étoit fa faute, de peur
qu'ils ne le foupçonnaffent de quelque
chofe de pis, je l'ay fait par pure com-
paffion, pour voir s'il pourra mener une
meilleure vie parmy eux, fans Y. faire

neanmoins aucune fonction de fes or-
dres. C'eft dequoy j'ay crû vous devoir
informer pour aller au devant des fur-
prifes qu'on vous pourroit faire.

2. Du jour que je l'ay jugé jufques à Pâques, qui doit être cette année le huitième des Ides d'Avril, il y a cent jours; & je le dis à vôtre fainteté à caufe de l'ordonnance du Concile dont je l'ay averty luy-même de bonne foy, & felon laquelle s'il ne fe pourvoir dans l'année, en cas qu'il croye avoir lieu de

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II. CLASSE. AN. 402.

que

fe pourvoir, il n'y fera plus receu en
quelque Tribunal
ce foit. Quant à
nous, mon tres-faint Pere, & tres-vene-
rable Seigneur, fi quand nous trouve-
rons de ces fortes de déreglemens dans
la vie des Clercs, & fur tout de ceux qui
commencent à n'étre pas en bonne re-
putation, nous manquons de les punir
felon qu'il a été arrêté dans le Concile,
nous voilà réduits à entrer dans l'exa-
men de chofes qu'on ne fçauroit veri-
fier; & il faudra ou condamner les accu-
fez fur des faits douteux, ou les laiffer
impunis faute d'une connoiffance fuffi-
fante.

Pour moy j'ay crû devoir interdire un Prêtre convaincu d'avoir dîné & foupé un jour de jeûne obfervé dans le lieu-même où il étoit, & de l'avoir fait chez une femme diffamée, aprés s'étre défait de fon Collegue Prêtre dans le même lieu, & d'avoir couché dans la maison de cette femme fans qu'il y eût aucun Clerc qui l'accompagnât; & je n'oferois pas aprés cela luy confier le foin d'une Eglife. Peut-étre que s'il demandoit d'étre jugé par fix Evêques feC'eft un lon le Concile * qui veut qu'il y en ait ce Carthage te- nombre là pour juger un Prêtre diffinitivement, leur jugement fe trouveroit

Concile de

nu fous un

nommé Gra

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contraire au mien; mais enfin confie qui
voudra une Eglife de fon Diocese à de
tels Prêtres; pour moy j'avoue que je
n'en ay aucune que je leur vouluffe con-
fier; fur tout lors qu'ils n'ont d'ailleurs
aucune bonne reputation qui puiffe ba-
lancer ce qu'on a contre eux, & le leur
faire pardonner. Car s'ils venoient à tom-
ber aprés cela dans quelque plus grand
defordre, je m'en croirois coupable, &
ne m'en confolerois jamais.

LETTRE LXVI. *

11. CLASSE., AN. 401.

tus l'an 348.
ou 349.
Can. II.

* Ecrite l'an 402. C'étoit au

Saint Augustin fait des reproches à Crifpin paravant la Evêque Donatifte à Calame de ce qu'il 173. & celle rebaptifoit ceux de Mapale aprés les avoir 66. eft preforcez par menaces à embrasfer fa com

1.

munion.

S. AUGUSTIN à CRISPIN.

V

Ous deviez craindre Dieu au lieu de vous faire craindre vousmême, & d'employer la force pour parvenir à rebaptifer ceux de Mapale. Mais puifque l'autorité d'un particulier eft redoutée jufqu'à ce point dans fon village, pourquoy celle de l'Empereur ne le ferat'elle pas dans une Province de fon Empire? Si c'eft par la qualité des perfonnes que cela fe doit regler, vous n'étes

fentement la

170,

II. CLASSE.

A N. 402.

celle du

que le proprietaire de ce fonds-là, & il en eft le fouverain : fi c'eft par fonds, c'eft vôtre heritage à la verité, a mais c'est fon Royaume. Si c'est par ce qui fait agir l'un & l'autre vous ne cherchez qu'à entretenir la division, & luy la veut faire ceffer. Mais ce n'eft pas la crainte des puiffances feculieres que je voudrois vous infpirer, quoique je peuffe vous pourfuivre pour vous faire payer la peine de dix livres d'or portée par l'Edit de l'Empereur. Et ce feroit une mauvaise raison pour vous exempter de payer cette amande ordonnée contre ceux qui rebaptifent, que d'alleguer que c'eft à prix d'argent que vous acheptez ceux que vous rebaptifez, & que vous y avez confumé tout vôtre bien. Mais encore une fois ce n'est pas la crainte des puiffances feculieres que je voudrois vous infpirer, c'eft celle de Jefus Chrift. Car je voudrois fçavoir ce que vous luy repondriez s'il vous difoit.Quoy, Crispin, vous comptez pour beaucoup ce qu'il

a. CRISPIN ayant acheté une terre à bail emphiteotique, dans un fonds qui appartenoit à l'Empereur, eut l'infolence d'y rebaptifer tout d'un coup 80. perfonnes qui gemiffoient de cette violence, mais qui ne pouvoient refifter à celuy qui la leur faifoit. On peut voir cela plus au long au 2. Livre contre les lettres de Petilen chapitre 83.

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